"La cathédrale est fendue, il ne reste plus de toi. La cathédrale de ma rue a brûlé autrefois, La ville s'était mise à pleurer quand elle fut bombardée. Aujourd'hui on la visite, le passé passe et puis nous quitte." La cathédrale: espérance mathématique de Marie Modiano.
AnonymeIl y a 6 ans

"La cathédrale est fendue,
il ne reste plus de toi.
La cathédrale de ma rue a brûlé autrefois,
La ville s'était mise à pleurer quand elle fut bombardée.
Aujourd'hui on la visite,
le passé passe et puis nous quitte."

La cathédrale: espérance mathématique de Marie Modiano.

J'ai cru pouvoir briser la profondeur de l'immensité Par mon chagrin tout nu sans contact sans écho Je me suis étendu dans ma prison aux portes vierges Comme un mort raisonnable qui a su mourir Un mort non couronné sinon de son néant Je me suis étendu sur les vagues absurdes Du poison absorbé par amour de la cendre La solitude m'a semblé plus vive que le sang Je voulais désunir la vie Je voulais partager la mort avec la mort Rendre mon cour au vide et le vide à la vie Tout effacer qu'il n'y ait rien ni vitre ni buée Ni rien devant ni rien derrière rien entier J'avais éliminé le glaçon des mains jointes J'avais éliminé l'hivernale ossature Du vou qui s'annule Tu es venue le feu s'est alors ranimé L'ombre a cédé le froid d'en bas s'est étoilé Et la terre s'est recouverte De ta chair claire et je me suis senti léger Tu es venue la solitude était vaincue J'avais un guide sur la terre je savais Me diriger je me savais démesuré J'avançais je gagnais de l'espace et du temps J'allais vers toi j'allais sans fin vers la lumière La vie avait un corps l'espoir tendait sa voile Le sommeil ruisselait de rêves et la nuit Promettait à l'aurore des regards confiants Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard Ta bouche était mouillée des premières rosées Le repos ébloui remplaçait la fatigue Et j'adorais l'amour comme à mes premiers jours. Les champs sont labourés les usines rayonnent Et le blé fait son nid dans une houle énorme La moisson la vendange ont des témoins sans nombre Rien n'est simple ni singulier La mer est dans les yeux du ciel ou de la nuit La forêt donne aux arbres la sécurité Et les murs des maisons ont une peau commune Et les routes toujours se croisent. Les hommes sont faits pour s'entendre Pour se comprendre pour s'aimer Ont des enfants qui deviendront pères des hommes Ont des enfants sans feu ni lieu Qui réinventeront les hommes Et la nature et leur patrie Celle de tous les hommes Celle de tous les temps. Paul Eluard
Sémiramis Il y a 6 ans

J'ai cru pouvoir briser la profondeur de l'immensité
Par mon chagrin tout nu sans contact sans écho
Je me suis étendu dans ma prison aux portes vierges
Comme un mort raisonnable qui a su mourir
Un mort non couronné sinon de son néant
Je me suis étendu sur les vagues absurdes
Du poison absorbé par amour de la cendre
La solitude m'a semblé plus vive que le sang

Je voulais désunir la vie
Je voulais partager la mort avec la mort
Rendre mon cour au vide et le vide à la vie
Tout effacer qu'il n'y ait rien ni vitre ni buée
Ni rien devant ni rien derrière rien entier
J'avais éliminé le glaçon des mains jointes
J'avais éliminé l'hivernale ossature
Du vou qui s'annule

Tu es venue le feu s'est alors ranimé
L'ombre a cédé le froid d'en bas s'est étoilé
Et la terre s'est recouverte
De ta chair claire et je me suis senti léger
Tu es venue la solitude était vaincue
J'avais un guide sur la terre je savais
Me diriger je me savais démesuré
J'avançais je gagnais de l'espace et du temps

J'allais vers toi j'allais sans fin vers la lumière
La vie avait un corps l'espoir tendait sa voile
Le sommeil ruisselait de rêves et la nuit
Promettait à l'aurore des regards confiants
Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard
Ta bouche était mouillée des premières rosées
Le repos ébloui remplaçait la fatigue
Et j'adorais l'amour comme à mes premiers jours.

Les champs sont labourés les usines rayonnent
Et le blé fait son nid dans une houle énorme
La moisson la vendange ont des témoins sans nombre
Rien n'est simple ni singulier
La mer est dans les yeux du ciel ou de la nuit
La forêt donne aux arbres la sécurité
Et les murs des maisons ont une peau commune
Et les routes toujours se croisent.

Les hommes sont faits pour s'entendre
Pour se comprendre pour s'aimer
Ont des enfants qui deviendront pères des hommes
Ont des enfants sans feu ni lieu
Qui réinventeront les hommes
Et la nature et leur patrie
Celle de tous les hommes
Celle de tous les temps.

Paul Eluard

"L'amour est fêlure Une faille dans le mur De ton coeur tellurique L'amour est un désastre La perle des défaite Le regret, peut être L'amour météorite Qui meurt dans la fuite D'une étoile-filante L'amour est une absence Vibrant dans le silence D'un fantôme amoureux L'amour feu d'artifice Qui glisse entre tes cuisses S'immisce dans l'ivresse L'amour un sacrifice De rose et d'épices Sur la peau lisse de ton coeur L'amour château de sable Emporté par la vague AU royaume de la mer L'amour un océan Où se noient les pucelles Les garçons imprudents L'amour est un chien fou Qui court sur l'autoroute L'amour est un loup doux Hurlant sa lune blanche L'amour chien de lumière Victorieux vagabond Grâces et ténèbres Chien fou à genoux L'amour est un chien fou Qui glapit sous les coups L'amour est un loup doux Priant sa lune pleine L'amour chien de l'aurore Nu dans le matin de l'été Grâces et mystères Chien fou à genoux L'amour chien de lumière Victorieux vagabond Grâces et ténèbres Chien fou à genoux" amour chien fou Arthur H
suffragettes AB Il y a 6 ans

"L'amour est fêlure
Une faille dans le mur
De ton coeur tellurique
L'amour est un désastre
La perle des défaite
Le regret, peut être
L'amour météorite
Qui meurt dans la fuite
D'une étoile-filante
L'amour est une absence
Vibrant dans le silence
D'un fantôme amoureux
L'amour feu d'artifice
Qui glisse entre tes cuisses
S'immisce dans l'ivresse
L'amour un sacrifice
De rose et d'épices
Sur la peau lisse de ton coeur
L'amour château de sable
Emporté par la vague

AU royaume de la mer
L'amour un océan
Où se noient les pucelles
Les garçons imprudents

L'amour est un chien fou
Qui court sur l'autoroute
L'amour est un loup doux
Hurlant sa lune blanche

L'amour chien de lumière
Victorieux vagabond
Grâces et ténèbres
Chien fou à genoux

L'amour est un chien fou
Qui glapit sous les coups
L'amour est un loup doux
Priant sa lune pleine

L'amour chien de l'aurore
Nu dans le matin de l'été
Grâces et mystères
Chien fou à genoux
L'amour chien de lumière
Victorieux vagabond
Grâces et ténèbres
Chien fou à genoux"

amour chien fou Arthur H

[b][center]Tempête et calme[/center][/b] L'ombre Suit Sombre Nuit ; Une Lune Brune Luit. Tranquille L'air pur Distille L'azur ; Le sage Engage Voyage Bien sûr ! L'atmosphère De la fleur Régénère La senteur, S'incorpore, Evapore Pour l'aurore Son odeur. Parfois la brise Des verts ormeaux Passe et se brise Aux doux rameaux ; Au fond de l'âme Qui le réclame C'est un dictame Pour tous les maux ! Un point se déclare Loin de la maison, Devient une barre ; C'est une cloison ; Longue, noire, prompte, Plus rien ne la dompte, Elle grandit, monte, Couvre l'horizon. L'obscurité s'avance Et double sa noirceur ; Sa funeste apparence Prend et saisit le coeur ! Et tremblant il présage Que ce sombre nuage Renferme un gros orage Dans son énorme horreur. Au ciel, il n'est plus d'étoiles Le nuage couvre tout De ses glaciales voiles ; Il est là, seul et debout. Le vent le pousse, l'excite, Son immensité s'irrite ; A voir son flanc qui s'agite, On comprend qu'il est à bout ! Il se replie et s'amoncelle, Resserre ses vastes haillons ; Contient à peine l'étincelle Qui l'ouvre de ses aquilons ; Le nuage enfin se dilate, S'entrouvre, se déchire, éclate, Comme d'une teinte écarlate Les flots de ses noirs tourbillons. L'éclair jaillit ; lumière éblouissante Qui vous aveugle et vous brûle les yeux, Ne s'éteint pas, la sifflante tourmente Le fait briller, étinceler bien mieux ; Il vole ; en sa course muette et vive L'horrible vent le conduit et l'avive ; L'éclair prompt, dans sa marche fugitive Par ses zigzags unit la terre aux cieux. La foudre part soudain ; elle tempête, tonne Et l'air est tout rempli de ses longs roulements ; Dans le fond des échos, l'immense bruit bourdonne, Entoure, presse tout de ses cassants craquements. Elle triple d'efforts ; l'éclair comme la bombe, Se jette et rebondit sur le toit qui succombe, Et le tonnerre éclate, et se répète, et tombe, Prolonge jusqu'aux cieux ses épouvantements. Un peu plus loin, mais frémissant encore Dans le ciel noir l'orage se poursuit, Et de ses feux assombrit et colore L'obscurité de la sifflante nuit. Puis par instants des Aquilons la houle S'apaise un peu, le tonnerre s'écoule, Et puis se tait, et dans le lointain roule Comme un écho son roulement qui fuit ; L'éclair aussi devient plus rare De loin en loin montre ses feux Ce n'est plus l'affreuse bagarre Où les vents combattaient entre eux ; Portant ailleurs sa sombre tête, L'horreur, l'éclat de la tempête De plus en plus tarde, s'arrête, Fuit enfin ses bruyants jeux. Au ciel le dernier nuage Est balayé par le vent ; D'horizon ce grand orage A changé bien promptement ; On ne voit au loin dans l'ombre Qu'une épaisseur large, sombre, Qui s'enfuit, et noircit, ombre Tout dans son déplacement. La nature est tranquille, A perdu sa frayeur ; Elle est douce et docile Et se refait le coeur ; Si le tonnerre gronde Et de sa voix profonde Là-bas trouble le monde, Ici l'on n'a plus peur. Dans le ciel l'étoile D'un éclat plus pur Brille et se dévoile Au sein de l'azur ; La nuit dans la trêve, Qui reprend et rêve, Et qui se relève, N'a plus rien d'obscur. La fraîche haleine Du doux zéphir Qui se promène Comme un soupir, A la sourdine, La feuille incline, La pateline, Et fait plaisir. La nature Est encor Bien plus pure, Et s'endort ; Dans l'ivresse La maîtresse, Ainsi presse Un lit d'or. Toute aise, La fleur S'apaise ; Son coeur Tranquille Distille L'utile Odeur. Elle Fuit, Belle Nuit ; Une Lune Brune Luit. Jules Verne
Sémiramis Il y a 6 ans

Tempête et calme


L'ombre
Suit
Sombre
Nuit ;
Une
Lune
Brune
Luit.

Tranquille
L'air pur
Distille
L'azur ;
Le sage
Engage
Voyage
Bien sûr !

L'atmosphère
De la fleur
Régénère
La senteur,
S'incorpore,
Evapore
Pour l'aurore
Son odeur.

Parfois la brise
Des verts ormeaux
Passe et se brise
Aux doux rameaux ;
Au fond de l'âme
Qui le réclame
C'est un dictame
Pour tous les maux !

Un point se déclare
Loin de la maison,
Devient une barre ;
C'est une cloison ;
Longue, noire, prompte,
Plus rien ne la dompte,
Elle grandit, monte,
Couvre l'horizon.

L'obscurité s'avance
Et double sa noirceur ;
Sa funeste apparence
Prend et saisit le coeur !
Et tremblant il présage
Que ce sombre nuage
Renferme un gros orage
Dans son énorme horreur.

Au ciel, il n'est plus d'étoiles
Le nuage couvre tout
De ses glaciales voiles ;
Il est là, seul et debout.
Le vent le pousse, l'excite,
Son immensité s'irrite ;
A voir son flanc qui s'agite,
On comprend qu'il est à bout !

Il se replie et s'amoncelle,
Resserre ses vastes haillons ;
Contient à peine l'étincelle
Qui l'ouvre de ses aquilons ;
Le nuage enfin se dilate,
S'entrouvre, se déchire, éclate,
Comme d'une teinte écarlate
Les flots de ses noirs tourbillons.

L'éclair jaillit ; lumière éblouissante
Qui vous aveugle et vous brûle les yeux,
Ne s'éteint pas, la sifflante tourmente
Le fait briller, étinceler bien mieux ;
Il vole ; en sa course muette et vive
L'horrible vent le conduit et l'avive ;
L'éclair prompt, dans sa marche fugitive
Par ses zigzags unit la terre aux cieux.

La foudre part soudain ; elle tempête, tonne
Et l'air est tout rempli de ses longs roulements ;
Dans le fond des échos, l'immense bruit bourdonne,
Entoure, presse tout de ses cassants craquements.
Elle triple d'efforts ; l'éclair comme la bombe,
Se jette et rebondit sur le toit qui succombe,
Et le tonnerre éclate, et se répète, et tombe,
Prolonge jusqu'aux cieux ses épouvantements.

Un peu plus loin, mais frémissant encore
Dans le ciel noir l'orage se poursuit,
Et de ses feux assombrit et colore
L'obscurité de la sifflante nuit.
Puis par instants des Aquilons la houle
S'apaise un peu, le tonnerre s'écoule,
Et puis se tait, et dans le lointain roule
Comme un écho son roulement qui fuit ;

L'éclair aussi devient plus rare
De loin en loin montre ses feux
Ce n'est plus l'affreuse bagarre
Où les vents combattaient entre eux ;
Portant ailleurs sa sombre tête,
L'horreur, l'éclat de la tempête
De plus en plus tarde, s'arrête,
Fuit enfin ses bruyants jeux.

Au ciel le dernier nuage
Est balayé par le vent ;
D'horizon ce grand orage
A changé bien promptement ;
On ne voit au loin dans l'ombre
Qu'une épaisseur large, sombre,
Qui s'enfuit, et noircit, ombre
Tout dans son déplacement.

La nature est tranquille,
A perdu sa frayeur ;
Elle est douce et docile
Et se refait le coeur ;
Si le tonnerre gronde
Et de sa voix profonde
Là-bas trouble le monde,
Ici l'on n'a plus peur.

Dans le ciel l'étoile
D'un éclat plus pur
Brille et se dévoile
Au sein de l'azur ;
La nuit dans la trêve,
Qui reprend et rêve,
Et qui se relève,
N'a plus rien d'obscur.

La fraîche haleine
Du doux zéphir
Qui se promène
Comme un soupir,
A la sourdine,
La feuille incline,
La pateline,
Et fait plaisir.

La nature
Est encor
Bien plus pure,
Et s'endort ;
Dans l'ivresse
La maîtresse,
Ainsi presse
Un lit d'or.

Toute aise,
La fleur
S'apaise ;
Son coeur
Tranquille
Distille
L'utile
Odeur.

Elle
Fuit,
Belle
Nuit ;
Une
Lune
Brune
Luit.

Jules Verne

Merci! Je trouve que ça sent un peu trop les Djinns de papy Victor (paru en 1829, Jules Verne avait 1 an, il n'était donc pas, des deux, le visionnaire :) ) Les Djinns Murs, ville, Et port, Asile De mort, Mer grise Où brise La brise, Tout dort. Dans la plaine Naît un bruit. C'est l'haleine De la nuit. Elle brame Comme une âme Qu'une flamme Toujours suit ! La voix plus haute Semble un grelot. D'un nain qui saute C'est le galop. Il fuit, s'élance, Puis en cadence Sur un pied danse Au bout d'un flot. La rumeur approche. L'écho la redit. C'est comme la cloche D'un couvent maudit ; Comme un bruit de foule, Qui tonne et qui roule, Et tantôt s'écroule, Et tantôt grandit, Dieu ! la voix sépulcrale Des Djinns !... Quel bruit ils font ! Fuyons sous la spirale De l'escalier profond. Déjà s'éteint ma lampe, Et l'ombre de la rampe, Qui le long du mur rampe, Monte jusqu'au plafond. C'est l'essaim des Djinns qui passe, Et tourbillonne en sifflant ! Les ifs, que leur vol fracasse, Craquent comme un pin brûlant. Leur troupeau, lourd et rapide, Volant dans l'espace vide, Semble un nuage livide Qui porte un éclair au flanc. Ils sont tout près ! - Tenons fermée Cette salle, où nous les narguons. Quel bruit dehors ! Hideuse armée De vampires et de dragons ! La poutre du toit descellée Ploie ainsi qu'une herbe mouillée, Et la vieille porte rouillée Tremble, à déraciner ses gonds ! Cris de l'enfer! voix qui hurle et qui pleure ! L'horrible essaim, poussé par l'aquilon, Sans doute, ô ciel ! s'abat sur ma demeure. Le mur fléchit sous le noir bataillon. La maison crie et chancelle penchée, Et l'on dirait que, du sol arrachée, Ainsi qu'il chasse une feuille séchée, Le vent la roule avec leur tourbillon ! Prophète ! si ta main me sauve De ces impurs démons des soirs, J'irai prosterner mon front chauve Devant tes sacrés encensoirs ! Fais que sur ces portes fidèles Meure leur souffle d'étincelles, Et qu'en vain l'ongle de leurs ailes Grince et crie à ces vitraux noirs ! Ils sont passés ! - Leur cohorte S'envole, et fuit, et leurs pieds Cessent de battre ma porte De leurs coups multipliés. L'air est plein d'un bruit de chaînes, Et dans les forêts prochaines Frissonnent tous les grands chênes, Sous leur vol de feu pliés ! De leurs ailes lointaines Le battement décroît, Si confus dans les plaines, Si faible, que l'on croit Ouïr la sauterelle Crier d'une voix grêle, Ou pétiller la grêle Sur le plomb d'un vieux toit. D'étranges syllabes Nous viennent encor ; Ainsi, des arabes Quand sonne le cor, Un chant sur la grève Par instants s'élève, Et l'enfant qui rêve Fait des rêves d'or. Les Djinns funèbres, Fils du trépas, Dans les ténèbres Pressent leurs pas ; Leur essaim gronde : Ainsi, profonde, Murmure une onde Qu'on ne voit pas. Ce bruit vague Qui s'endort, C'est la vague Sur le bord ; C'est la plainte, Presque éteinte, D'une sainte Pour un mort. On doute La nuit... J'écoute : - Tout fuit, Tout passe L'espace Efface Le bruit.
musashi Il y a 6 ans

Merci! Je trouve que ça sent un peu trop les Djinns de papy Victor (paru en 1829, Jules Verne avait 1 an, il n'était donc pas, des deux, le visionnaire )

Les Djinns

Murs, ville,
Et port,
Asile
De mort,
Mer grise
Où brise
La brise,
Tout dort.

Dans la plaine
Naît un bruit.
C'est l'haleine
De la nuit.
Elle brame
Comme une âme
Qu'une flamme
Toujours suit !

La voix plus haute
Semble un grelot.
D'un nain qui saute
C'est le galop.
Il fuit, s'élance,
Puis en cadence
Sur un pied danse
Au bout d'un flot.

La rumeur approche.
L'écho la redit.
C'est comme la cloche
D'un couvent maudit ;
Comme un bruit de foule,
Qui tonne et qui roule,
Et tantôt s'écroule,
Et tantôt grandit,

Dieu ! la voix sépulcrale
Des Djinns !... Quel bruit ils font !
Fuyons sous la spirale
De l'escalier profond.
Déjà s'éteint ma lampe,
Et l'ombre de la rampe,
Qui le long du mur rampe,
Monte jusqu'au plafond.

C'est l'essaim des Djinns qui passe,
Et tourbillonne en sifflant !
Les ifs, que leur vol fracasse,
Craquent comme un pin brûlant.
Leur troupeau, lourd et rapide,
Volant dans l'espace vide,
Semble un nuage livide
Qui porte un éclair au flanc.

Ils sont tout près ! - Tenons fermée
Cette salle, où nous les narguons.
Quel bruit dehors ! Hideuse armée
De vampires et de dragons !
La poutre du toit descellée
Ploie ainsi qu'une herbe mouillée,
Et la vieille porte rouillée
Tremble, à déraciner ses gonds !

Cris de l'enfer! voix qui hurle et qui pleure !
L'horrible essaim, poussé par l'aquilon,
Sans doute, ô ciel ! s'abat sur ma demeure.
Le mur fléchit sous le noir bataillon.
La maison crie et chancelle penchée,
Et l'on dirait que, du sol arrachée,
Ainsi qu'il chasse une feuille séchée,
Le vent la roule avec leur tourbillon !

Prophète ! si ta main me sauve
De ces impurs démons des soirs,
J'irai prosterner mon front chauve
Devant tes sacrés encensoirs !
Fais que sur ces portes fidèles
Meure leur souffle d'étincelles,
Et qu'en vain l'ongle de leurs ailes
Grince et crie à ces vitraux noirs !

Ils sont passés ! - Leur cohorte
S'envole, et fuit, et leurs pieds
Cessent de battre ma porte
De leurs coups multipliés.
L'air est plein d'un bruit de chaînes,
Et dans les forêts prochaines
Frissonnent tous les grands chênes,
Sous leur vol de feu pliés !

De leurs ailes lointaines
Le battement décroît,
Si confus dans les plaines,
Si faible, que l'on croit
Ouïr la sauterelle
Crier d'une voix grêle,
Ou pétiller la grêle
Sur le plomb d'un vieux toit.

D'étranges syllabes
Nous viennent encor ;
Ainsi, des arabes
Quand sonne le cor,
Un chant sur la grève
Par instants s'élève,
Et l'enfant qui rêve
Fait des rêves d'or.

Les Djinns funèbres,
Fils du trépas,
Dans les ténèbres
Pressent leurs pas ;
Leur essaim gronde :
Ainsi, profonde,
Murmure une onde
Qu'on ne voit pas.

Ce bruit vague
Qui s'endort,
C'est la vague
Sur le bord ;
C'est la plainte,
Presque éteinte,
D'une sainte
Pour un mort.

On doute
La nuit...
J'écoute : -
Tout fuit,
Tout passe
L'espace
Efface
Le bruit.

Je pourrais me libérer du poids du monde dans tes bras, je pourrais l’ôter de mon crâne, le jeter dans un coin au fin fond de l’appartement ; je pourrais rester près de toi, dans la légèreté de ton corps, à l’écoute de la chute du temps dans une clepsydre invisible. Le monde, cependant, insiste auprès de moi. Il est là, au fond de l’appartement, avec sa pesanteur. Il attend que quelqu’un le prenne et redescende l’escalier, courbé, comme si tout ce que nous avions à faire était de le porter en haut, en bas, dans ces escaliers sans ascenseur. Et moi, près de toi, en t’enlaçant, j’espère que le monde ne bougera pas de son coin, au fond de l’appartement. Je t’étreins comme si ton corps me délivrait de ce poids, qu’il n’était pas là, ne m’attendait pas pour que je le descende et le remonte dans ces escaliers d’un immeuble sans ascenseur. Mais l’amour se charge lui aussi du poids du monde. Et les mots avec lesquels nous nous séparons, avant que je le soulève à nouveau et t’abandonne à la légèreté, apportent déjà l’écho des choses que j’ai jetées au fond de l’appartement, où je ne veux pas que tu ailles, pour que tu n’aies pas à porter, toi aussi, le poids du monde. Nuno Júdice - [b]Le poids du monde[/b] *** Quand la tendresse paraît déjà fatiguée de son office, et que le sommeil, la plus précaire des barques, tarde encore, quand tes yeux jaillissent bleus et recherchent dans les miens une navigation sûre, c’est que je te parle des mots désemparés et déserts, par le silence fascinés. Eugénio de Andrade - [b]Le silence[/b] *** Sur mon cheval blanc, Mon cheval rapide, Ainsi qu’un faucon Je m’envolerai, Sur les champs, les mers, Au pays lointain J’irai rattraper Ma belle jeunesse, Et j’appaîtrai, Gaillard comme avant, Plaisant à nouveau Aux jeunes beautés. Hélas ! il n’est pas De retour possible, Le soleil jamais Ne monte au couchant. Alexis Koltzov - [b]Chant d’un vieillard[/b] *** Ce sont ces bateaux qui traversent la pluie, avec l’indécision de leurs coques, leurs cales humides après les pôles et les moussons, mâts brisés au passage des caps, blessures de phare sur le visage des figures de proue, qui sortent d’un brouillard de cigarettes, quand je demande l’heure au serveur derrière son zinc, et les marins morts s’éloignent, cachant des montres dans la chair putréfiée de leurs poignets, montant vers cette chambre où les tentures déchirées servent à recouvrir la table où les jeux avaient lieu, dans l’ennui des paris, comme si le véritable bluff ne sortait pas de tes côtes, ô vénus travestie des falaises nocturnes, courant la rade et ses ruelles, comme si ton destin n’était pas de trébucher sur des femmes immobiles, celles qui attendent celui qui sort, les poches pleines, après la dernière tournée, pour lui voler la force de son sexe gonflé avec l’aube. Ce sont ces navires qui ont naufragé quand tu m’as dit l’heure, la première de la vie qui naît avec les prémices du jour, la lumière phtisique de l’aurore hivernal, quand la pluie commence à tomber, dans un rythme doux, nettoyant les rues d’une boue de mégots et de papiers, se superposant à ta voix qui me raconte ton arrivée jusqu’ici, comme si je voulais savoir d’où tu venais, maintenant que tu es là, et tout ce qui m’intéresse c’est la grisaille qui naît de tes yeux, les rayures de ta veste contre le vert de l’arbre qui apparaît dans l’embrasure, la bande de lumière que tu m’occultes avec tes mots d’oiseau blanc, chargés d’insomnie, étalés sur le plancher comme des cartes disposées pour une interminable patience, car j’attends que tu achèves pour que les portes s’ouvrent, toutes, et que les bateaux reviennent à l’intérieur de la chambre, avec leur chargement d’esclaves et d’épices. * Et quand ces navires arrivent?les voiles gonflées comme les ailes d’une migration d’oiseaux aveugles, je les célèbre, corbeaux échoués dans une hémoptysie de pétales, vomissant des coquilles, tandis que tu m’entraines vers la tempête du lit défait, où les marins ont laissés les empreintes de minuit, et nous embarquons, sachant qu’aucun port n’offrira d’escale pour souffler les bougies de qui n’a jamais fêté d’anniversaire, maintenant qu’une navigation de draps démontés agite la coque, et tu m’ouvres l’écoutille sur tous les corps immergés dans cette mer, sur lesquels plane un vol de libellules d’albâtre suspendues au cou d’une déesse nue par le gardien de l’éternité, à qui je demande le mot de passe pour sortir de tes bras, ô reine d’un échiqiuer sans damier ni échecs, me condamnant à sauter entre des fous et des pions, jusqu’à parvenir à la haie où l’on voit d’autres haies, si l’on suit l’écho de ta voix. * Ces bateaux que l’horizon régurgite, posés sur la vitre comme les mouches ivres d’automne, dans l’agonie de la vigne, pénètrent ce golfe amoureux de murmures et d’orgasmes?jetant leurs ancres sur le pubis sablonneux des coraux, où je plonge derrière ton ombre, ô nymphe blême dont j’ai perdu le sourire dans l’obscurité des escaliers, tandis que tu allumais ma cigarette, et nous aurions pu lire à la lueur d’une allumette les graffitis obscènes sur la plâtre du mur, déchiffrant les codes brutaux de l’amour, aux sons de portes claquant à l’étage du dessus, du grincement des lits lointains, des gémissements étouffés par des mains fermes, maîtrisant le gouvernail qui force cette route de hasard, comme si le destin n’avait pas été écrit sur la détermination de tes lèvres, sibylle muette du couchant, et le soleil ne s’est pas éteint dans tes seins, quand mes mains cherchent la sortie de ton corps, et que tu me racontes l’histoire du labyrinthe dans une rumeur d’antiques extases. Et c’est ici, à terre, que je reconstitue le chemin qui m’a mené au centre de toi, par-dessus les haies et les navires, foulant des oiseaux et des lunes, entendant ta voix qui ne cesse en soupirant de monter vers moi, marée et colline, jusqu’à la cime de l’âme, où je murmure ton nom, dans un baptême d’écumes saoules se fracassant dans le tumulte des morts. Nuno Júdice - [b]Une ode terrestre[/b]
AnonymeIl y a 6 ans

Je pourrais me libérer du poids du monde dans tes bras,
je pourrais l’ôter de mon crâne, le jeter dans un coin
au fin fond de l’appartement ; je pourrais rester
près de toi, dans la légèreté de ton corps, à l’écoute
de la chute du temps dans une clepsydre invisible.

Le monde, cependant, insiste auprès de moi. Il est là,
au fond de l’appartement, avec sa pesanteur. Il attend
que quelqu’un
le prenne et redescende l’escalier, courbé, comme
si tout ce que nous avions à faire était de le porter
en haut, en bas, dans ces escaliers sans ascenseur.

Et moi, près de toi, en t’enlaçant, j’espère que le monde
ne bougera pas de son coin, au fond de l’appartement.
Je t’étreins
comme si ton corps me délivrait de ce poids,
qu’il n’était pas là, ne m’attendait pas pour que je le
descende
et le remonte dans ces escaliers d’un immeuble sans
ascenseur.

Mais l’amour se charge lui aussi du poids du monde.
Et les mots
avec lesquels nous nous séparons, avant que je le soulève
à nouveau
et t’abandonne à la légèreté, apportent déjà l’écho des
choses
que j’ai jetées au fond de l’appartement, où je ne veux
pas que tu ailles,
pour que tu n’aies pas à porter, toi aussi, le poids du monde.

Nuno Júdice - Le poids du monde

***

Quand la tendresse
paraît déjà fatiguée de son office,

et que le sommeil, la plus précaire des barques,
tarde encore,

quand tes yeux jaillissent
bleus

et recherchent
dans les miens une navigation sûre,

c’est que je te parle des mots
désemparés et déserts,

par le silence fascinés.

Eugénio de Andrade - Le silence

***

Sur mon cheval blanc,
Mon cheval rapide,
Ainsi qu’un faucon
Je m’envolerai,

Sur les champs, les mers,
Au pays lointain
J’irai rattraper
Ma belle jeunesse,

Et j’appaîtrai,
Gaillard comme avant,
Plaisant à nouveau
Aux jeunes beautés.

Hélas ! il n’est pas
De retour possible,
Le soleil jamais
Ne monte au couchant.

Alexis Koltzov - Chant d’un vieillard

***

Ce sont ces bateaux qui traversent la pluie, avec l’indécision de leurs coques, leurs cales humides
après les pôles et les moussons, mâts brisés au passage des caps, blessures de phare sur le visage des figures de proue, qui sortent d’un brouillard de cigarettes, quand je demande l’heure au serveur derrière son zinc, et les marins morts s’éloignent, cachant des
montres dans la chair putréfiée de leurs poignets, montant vers
cette chambre où les tentures déchirées servent
à recouvrir la table où les jeux avaient lieu, dans l’ennui des paris, comme si le véritable bluff
ne sortait pas de tes côtes, ô vénus travestie des falaises nocturnes, courant la rade et ses ruelles, comme si ton destin n’était pas de trébucher sur
des femmes immobiles, celles qui attendent celui qui sort, les poches pleines, après la dernière tournée, pour lui voler la force de son sexe gonflé avec l’aube.
Ce sont ces navires qui ont naufragé quand tu
m’as dit l’heure, la première de la vie qui naît avec
les prémices du jour, la lumière phtisique de l’aurore hivernal, quand la pluie commence à tomber, dans un rythme doux, nettoyant les rues d’une boue de
mégots et de papiers, se superposant à ta voix qui
me raconte ton arrivée jusqu’ici, comme si
je voulais savoir d’où tu venais, maintenant que tu es là, et tout ce qui m’intéresse c’est la grisaille qui naît
de tes yeux, les rayures de ta veste contre le vert
de l’arbre qui apparaît dans l’embrasure, la bande de lumière
que tu m’occultes avec tes mots d’oiseau
blanc, chargés d’insomnie, étalés sur le
plancher comme des cartes disposées pour
une interminable patience, car j’attends que
tu achèves pour que les portes s’ouvrent, toutes,
et que les bateaux reviennent à l’intérieur de la chambre, avec leur chargement d’esclaves et d’épices.

*

Et quand ces navires arrivent?les voiles gonflées comme les ailes d’une migration d’oiseaux aveugles, je les célèbre, corbeaux échoués dans une hémoptysie
de pétales, vomissant des coquilles, tandis que tu m’entraines
vers la tempête du lit défait, où les marins
ont laissés les empreintes de minuit, et nous embarquons, sachant qu’aucun port n’offrira d’escale pour souffler les bougies de qui n’a jamais fêté d’anniversaire, maintenant
qu’une navigation de draps démontés agite la coque, et tu m’ouvres l’écoutille sur tous les corps immergés dans cette mer, sur lesquels plane un vol de libellules d’albâtre suspendues au cou d’une déesse
nue par le gardien de l’éternité, à qui je demande le mot de passe
pour sortir de tes bras, ô reine d’un échiqiuer
sans damier ni échecs, me condamnant à sauter
entre des fous et des pions, jusqu’à parvenir à la haie où l’on voit d’autres haies, si l’on suit l’écho de ta voix.

*

Ces bateaux que l’horizon régurgite, posés sur la vitre comme les mouches ivres d’automne, dans l’agonie de la vigne, pénètrent ce golfe amoureux de murmures et d’orgasmes?jetant leurs ancres sur le pubis sablonneux
des coraux, où je plonge derrière ton ombre, ô nymphe blême dont j’ai perdu le sourire dans l’obscurité des escaliers,
tandis que tu allumais ma cigarette, et nous aurions pu lire à la lueur d’une
allumette les graffitis obscènes sur la plâtre du mur, déchiffrant les codes brutaux de l’amour, aux sons de portes
claquant à l’étage du dessus, du grincement des lits lointains, des gémissements étouffés par des mains fermes, maîtrisant le gouvernail qui force cette route de hasard, comme si le destin n’avait pas été écrit sur la détermination de tes lèvres, sibylle muette du couchant, et le soleil ne s’est pas éteint dans tes seins, quand mes mains cherchent la sortie de ton corps, et que tu me racontes
l’histoire du labyrinthe dans une rumeur d’antiques extases.

Et c’est ici, à terre, que je reconstitue le chemin qui m’a mené au centre de toi, par-dessus les haies et les navires,
foulant des oiseaux et des lunes, entendant ta voix qui ne cesse en soupirant de monter vers moi, marée et colline, jusqu’à
la cime de l’âme, où je murmure ton nom, dans un baptême d’écumes saoules se fracassant dans le tumulte des morts.

Nuno Júdice - Une ode terrestre

.
AnonymeIl y a 6 ans

.

"heurtée dans le basaltique mutisme des ibis accrochée aux brides des rivières souterraines livrée aux folles forêts d'hydres où les sermons des étés épais gargarisent de rêveuses rivalités la nuit nous avale et nous rejette à l'autre bout de la tanière remuant des êtres que la grammaire des yeux n'a pas encore délimités sur l'espace du lendemain de lents encerclements de corail égorgent les hautes fourches des volontés rocheuses les échancrures dans ton coeur il fait un temps lourd de gravier d'affamé et combien de baraques à l'abri de ton front ont écrit le large deuil de mousse sur la poitrine tombant en ruine d'amas d'avenirs couvertes de tares embrouillées mêlées aux embuscades des lianes quand les bancs de troubles poissons s'infiltrent de mort opaque et de chevelures. (...) taillée est désormais la proue des remparts selon la figure de nage mais maintenant tes yeux guident le cyclone hautaine ténébreuse intention et sur mer jusqu'à la limite où se décharge la mort de prométhéennes cataractes d'échos tonnent dans nos consciences engourdies c'est souffrir quand la terre se souvient de vous et vous secoue battu chien de village et pauvre tu erres reviens sans cesse au point de départ inconsolé avec le mot une fleur au coin de la bouche une fleur phtisique chahutée par l'âcre nécropole des tonnes de vent se sont déversées dans la sourde citadelle de la fièvre une quille à la merci d'un élan étourdi que suis-je un point de départ inconsolé auquel je reviens fumant le mot au coin de la bouche une fleur battue par la rugueuse fièvre du vent et rocailleux dans mes vêtements de schiste j'ai voué mon attente au tourment du désert oxydé au robuste avènement du feu." extrait du chapitre 19 dans "l'homme approximatif" de tzara
suffragettes AB Il y a 6 ans

"heurtée dans le basaltique mutisme des ibis
accrochée aux brides des rivières souterraines
livrée aux folles forêts d'hydres
où les sermons des étés épais gargarisent de rêveuses
rivalités
la nuit nous avale et nous rejette à l'autre bout de la tanière
remuant des êtres que la grammaire des yeux n'a pas encore délimités sur l'espace du lendemain
de lents encerclements de corail
égorgent les hautes fourches des volontés rocheuses
les échancrures dans ton coeur il fait un temps lourd de
gravier d'affamé
et combien de baraques à l'abri de ton front ont écrit le large deuil de mousse sur la poitrine
tombant en ruine d'amas d'avenirs
couvertes de tares embrouillées mêlées aux embuscades des lianes
quand les bancs de troubles poissons s'infiltrent de mort opaque et de chevelures.
(...)
taillée est désormais la proue des remparts selon la figure de nage
mais maintenant tes yeux guident le cyclone
hautaine ténébreuse intention
et sur mer jusqu'à la limite où se décharge la mort
de prométhéennes cataractes d'échos tonnent dans nos consciences engourdies
c'est souffrir quand la terre se souvient de vous et vous secoue
battu chien de village et pauvre tu erres
reviens sans cesse au point de départ inconsolé avec le mot
une fleur au coin de la bouche une fleur phtisique
chahutée par l'âcre nécropole
des tonnes de vent se sont déversées dans la sourde citadelle de la fièvre
une quille à la merci d'un élan étourdi que suis-je
un point de départ inconsolé auquel je reviens fumant
le mot au coin de la bouche
une fleur battue par la rugueuse fièvre du vent
et rocailleux dans mes vêtements de schiste j'ai voué mon attente
au tourment du désert oxydé
au robuste avènement du feu."

extrait du chapitre 19 dans "l'homme approximatif" de tzara

Tzara <3
AnonymeIl y a 6 ans

Tzara <3

[b]La pauvre fleur disait au papillon céleste[/b] La pauvre fleur disait au papillon céleste : - Ne fuis pas ! Vois comme nos destins sont différents. Je reste, Tu t'en vas ! Pourtant nous nous aimons, nous vivons sans les hommes Et loin d'eux, Et nous nous ressemblons, et l'on dit que nous sommes Fleurs tous deux ! Mais, hélas ! l'air t'emporte et la terre m'enchaîne. Sort cruel ! Je voudrais embaumer ton vol de mon haleine Dans le ciel ! Mais non, tu vas trop loin ! - Parmi des fleurs sans nombre Vous fuyez, Et moi je reste seule à voir tourner mon ombre A mes pieds. Tu fuis, puis tu reviens ; puis tu t'en vas encore Luire ailleurs. Aussi me trouves-tu toujours à chaque aurore Toute en pleurs ! Oh ! pour que notre amour coule des jours fidèles, Ô mon roi, Prends comme moi racine, ou donne-moi des ailes Comme à toi ! [i] Victor Hugo[/i]
Sémiramis Il y a 6 ans

La pauvre fleur disait au papillon céleste


La pauvre fleur disait au papillon céleste :
- Ne fuis pas !
Vois comme nos destins sont différents. Je reste,
Tu t'en vas !

Pourtant nous nous aimons, nous vivons sans les hommes
Et loin d'eux,
Et nous nous ressemblons, et l'on dit que nous sommes
Fleurs tous deux !

Mais, hélas ! l'air t'emporte et la terre m'enchaîne.
Sort cruel !
Je voudrais embaumer ton vol de mon haleine
Dans le ciel !

Mais non, tu vas trop loin ! - Parmi des fleurs sans nombre
Vous fuyez,
Et moi je reste seule à voir tourner mon ombre
A mes pieds.

Tu fuis, puis tu reviens ; puis tu t'en vas encore
Luire ailleurs.
Aussi me trouves-tu toujours à chaque aurore
Toute en pleurs !

Oh ! pour que notre amour coule des jours fidèles,
Ô mon roi,
Prends comme moi racine, ou donne-moi des ailes
Comme à toi !

Victor Hugo

"Je me suis imprégné de ta présence Je me forme en toi et me transforme Je baigne dans le parfum sédentaire de tes vins Mais milles chèvres basculent dans le vide Et s’accrochent aux parois de ton chant Quand se lève l’aurore de ta voix Il n’y a plus de nuit puisque tout est conscience et ferveur scintillante C’est à travers toi que les arbres sont en fleur Et déjà le printemps se réveille grelottant du froid dépassé Tout oubli prend sa racine dans ton rire Tête haute je m’enfonce dans la forêt frémissante de ta joie." du recueil "jongleur de temps" de tzara
suffragettes AB Il y a 6 ans

"Je me suis imprégné de ta présence
Je me forme en toi et me transforme
Je baigne dans le parfum sédentaire de tes vins
Mais milles chèvres basculent dans le vide
Et s’accrochent aux parois de ton chant
Quand se lève l’aurore de ta voix
Il n’y a plus de nuit puisque tout est conscience et ferveur scintillante
C’est à travers toi que les arbres sont en fleur
Et déjà le printemps se réveille grelottant du froid dépassé
Tout oubli prend sa racine dans ton rire
Tête haute je m’enfonce dans la forêt frémissante de ta joie."

du recueil "jongleur de temps" de tzara

[b]Luceafărul[/b] de [i]Mihai Eminescu[/i] A fost odată ca-n poveşti, A fost ca niciodată. Din rude mari împărăteşti, O prea frumoasă fată. Şi era una la părinţi Şi mândră-n toate cele, Cum e Fecioara între sfinţi Şi luna între stele. Din umbra falnicelor bolţi Ea pasul şi-l îndreaptă Lângă fereastră, unde-n colţ Luceafărul aşteaptă. Privea în zare cum pe mări Răsare şi străluce, Pe mişcătoarele cărări Corăbii negre duce. Îl vede azi, îl vede mâini, Astfel dorinţa-i gata; El iar, privind de săptămâni, Îi cade draga fată. Cum ea pe coate-şi răzima Visând ale ei tâmple, De dorul lui şi inima Şi sufletu-i se împle. Şi cât de viu s-aprinde el În orişicare sară, Spre umbra negrului castel Când ea o să-i apară. ... Şi pas cu pas pe urma ei Alunecă-n odaie, Ţesând cu recile-i scântei O mreajă de văpaie. Şi când în pat se-ntinde drept Copila să se culce, I-atinge mâinile pe piept, I-nchide geana dulce; Şi din oglindă luminiş Pe trupu-i se revarsă, Pe ochii mari, bătând închişi Pe faţa ei întoarsă. Ea îl privea cu un surâs, El tremura-n oglindă, Căci o urma adânc în vis De suflet să se prindă. Iar ea vorbind cu el în somn, Oftând din greu suspină: - O, dulce-al nopţii mele domn, De ce nu vii tu? Vină! Cobori în jos, luceafăr blând, Alunecând pe-o rază, Pătrunde-n casă şi în gând Şi viaţa-mi luminează! El asculta tremurător, Se aprindea mai tare Şi s-arunca fulgerător, Se cufunda în mare; Şi apa unde-au fost căzut În cercuri se roteşte, Şi din adânc necunoscut Un mândru tânăr creşte. Uşor el trece ca pe prag Pe marginea ferestei Şi ţine-n mână un toiag Încununat cu trestii. Părea un tânăr voievod Cu păr de aur moale, Un vânăt giulgi se-ncheie nod Pe umerele goale. Iar umbra feţei străvezii E albă ca de ceară - Un mort frumos cu ochii vii Ce scânteie-n afară. - Din sfera mea venii cu greu Ca să-ţi urmez chemarea, Iar cerul este tatăl meu Şi mumă-mea e marea. Ca în cămara ta să vin, Să te privesc de-aproape, Am coborât cu-al meu senin Şi m-am născut din ape. O, vin'! odorul meu nespus, Şi lumea ta o lasă; Eu sunt luceafărul de sus, Iar tu să-mi fii mireasă. Colo-n palate de mărgean Te-oi duce veacuri multe, Şi toată lumea-n ocean De tine o s-asculte. - O, eşti frumos, cum numa-n vis Un înger se arată, Dară pe calea ce-ai deschis N-oi merge niciodată; Străin la vorbă şi la port, Luceşti fără de viaţă, Căci eu sunt vie, tu eşti mort, Şi ochiul tău mă-ngheaţă. ... Trecu o zi, trecură trei Şi iarăşi, noaptea, vine Luceafărul deasupra ei Cu razele-i senine. Ea trebui de el în somn Aminte să-şi aducă Şi dor de-al valurilor domn De inim-o apucă: - Cobori în jos, luceafăr blând, Alunecând pe-o rază, Pătrunde-n casă şi în gând Şi viaţa-mi luminează! Cum el din cer o auzi, Se stinse cu durere, Iar ceru-ncepe a roti În locul unde piere; În aer rumene văpăi Se-ntind pe lumea-ntreagă, Şi din a chaosului văi Un mândru chip se-ncheagă; Pe negre viţele-i de păr Coroana-i arde pare, Venea plutind în adevăr Scăldat în foc de soare. Din negru giulgi se desfăşor Marmoreele braţe, El vine trist şi gânditor Şi palid e la faţă; Dar ochii mari şi minunaţi Lucesc adânc himeric, Ca două patimi fără saţ Şi pline de-ntuneric. - Din sfera mea venii cu greu Ca să te-ascult ş-acuma, Şi soarele e tatăl meu, Iar noaptea-mi este muma; O, vin', odorul meu nespus, Şi lumea ta o lasă; Eu sunt luceafărul de sus, Iar tu să-mi fii mireasă. O, vin', în părul tău bălai S-anin cununi de stele, Pe-a mele ceruri să răsai Mai mândră decât ele. - O, eşti frumos cum numa-n vis Un demon se arată, Dară pe calea ce-ai deschis N-oi merge niciodată! Mă dor de crudul tău amor A pieptului meu coarde, Şi ochii mari şi grei mă dor, Privirea ta mă arde. - Dar cum ai vrea să mă cobor? Au nu-nţelegi tu oare, Cum că eu sunt nemuritor, Şi tu eşti muritoare? - Nu caut vorbe pe ales, Nici ştiu cum aş începe - Deşi vorbeşti pe înţeles, Eu nu te pot pricepe; Dar dacă vrei cu crezământ Să te-ndrăgesc pe tine, Tu te coboară pe pământ, Fii muritor ca mine. - Tu-mi cei chiar nemurirea mea În schimb pe-o sărutare, Dar voi să ştii asemenea Cât te iubesc de tare; Da, mă voi naşte din păcat, Primind o altă lege; Cu vecinicia sunt legat, Ci voi să mă dezlege. Şi se tot duce... S-a tot dus. De dragu-unei copile, S-a rupt din locul lui de sus, Pierind mai multe zile. ... În vremea asta Cătălin, Viclean copil de casă, Ce umple cupele cu vin Mesenilor la masă, Un paj ce poartă pas cu pas A-mpărătesii rochii, Băiat din flori şi de pripas, Dar îndrăzneţ cu ochii, Cu obrăjei ca doi bujori De rumeni, bată-i vina, Se furişează pânditor Privind la Cătălina. Dar ce frumoasă se făcu Şi mândră, arz-o focul; Ei, Cătălin, acu-i acu Ca să-ţi încerci norocul. Şi-n treacăt o cuprinse lin Într-un ungher degrabă. - Da' ce vrei, mări Cătălin? Ia du-t' de-ţi vezi de treabă. - Ce voi? Aş vrea să nu mai stai Pe gânduri totdeauna, Să râzi mai bine şi să-mi dai O gură, numai una. - Dar nici nu ştiu măcar ce-mi ceri, Dă-mi pace, fugi departe - O, de luceafărul din cer M-a prins un dor de moarte. - Dacă nu ştii, ţi-aş arăta Din bob în bob amorul, Ci numai nu te mânia, Ci stai cu binişorul. Cum vânătoru-ntinde-n crâng La păsărele laţul, Când ţi-oi întinde braţul stâng Să mă cuprinzi cu braţul; Şi ochii tăi nemişcători Sub ochii mei rămâie... De te înalţ de subsuori Te-nalţă din călcâie; Când faţa mea se pleacă-n jos, În sus rămâi cu faţa, Să ne privim nesăţios Şi dulce toată viaţa; Şi ca să-ţi fie pe deplin Iubirea cunoscută, Când sărutându-te mă-nclin, Tu iarăşi mă sărută. Ea-l asculta pe copilaş Uimită şi distrasă, Şi ruşinos şi drăgălaş, Mai nu vrea, mai se lasă, Şi-i zice-ncet: - Încă de mic Te cunoşteam pe tine, Şi guraliv şi de nimic, Te-ai potrivi cu mine... Dar un luceafăr, răsărit Din liniştea uitării, Dă orizon nemărginit Singurătăţii mării; Şi tainic genele le plec, Căci mi le umple plânsul Când ale apei valuri trec Călătorind spre dânsul; Luceşte c-un amor nespus, Durerea să-mi alunge, Dar se înalţă tot mai sus, Ca să nu-l pot ajunge. Pătrunde trist cu raze reci Din lumea ce-l desparte... În veci îl voi iubi şi-n veci Va rămânea departe... De-aceea zilele îmi sunt Pustii ca nişte stepe, Dar nopţile-s de-un farmec sfânt Ce nu-l mai pot pricepe. - Tu eşti copilă, asta e... Hai ş-om fugi în lume, Doar ni s-or pierde urmele Şi nu ne-or şti de nume, Căci amândoi vom fi cuminţi, Vom fi voioşi şi teferi, Vei pierde dorul de părinţi Şi visul de luceferi. ... Porni luceafărul. Creşteau În cer a lui aripe, Şi căi de mii de ani treceau În tot atâtea clipe. Un cer de stele dedesubt, Deasupra-i cer de stele - Părea un fulger ne'ntrerupt Rătăcitor prin ele. Şi din a chaosului văi, Jur împrejur de sine, Vedea, ca-n ziua cea dentâi, Cum izvorau lumine; Cum izvorând îl înconjor Ca nişte mări, de-a-notul... El zboară, gând purtat de dor, Pân' piere totul, totul; Căci unde-ajunge nu-i hotar, Nici ochi spre a cunoaşte, Şi vremea-ncearcă în zadar Din goluri a se naşte. Nu e nimic şi totuşi e O sete care-l soarbe, E un adânc asemene Uitării celei oarbe. - De greul negrei vecinicii, Părinte, mă dezleagă Şi lăudat pe veci să fii Pe-a lumii scară-ntreagă; O, cere-mi, Doamne, orice preţ Dar dă-mi o altă soarte, Căci tu izvor eşti de vieţi Şi dătător de moarte; Reia-mi al nemuririi nimb Şi focul din privire, Şi pentru toate dă-mi în schimb O oră de iubire... Din chaos, Doamne,-am apărut Şi m-aş întoarce-n chaos... Şi din repaos m-am născut, Mi-e sete de repaos. - Hyperion, ce din genuni Răsai c-o-ntreagă lume, Nu cere semne şi minuni Care n-au chip şi nume; Tu vrei un om să te socoţi Cu ei să te asameni? Dar piară oamenii cu toţi, S-ar naşte iarăşi oameni. Ei numai doar durează-n vânt Deşerte idealuri - Când valuri află un mormânt, Răsar în urmă valuri; Ei doar au stele cu noroc Şi prigoniri de soarte, Noi nu avem nici timp, nici loc Şi nu cunoaştem moarte. Din sânul vecinicului ieri Trăieşte azi ce moare, Un soare de s-ar stinge-n cer S-aprinde iarăşi soare; Părând pe veci a răsări, Din urmă moartea-l paşte, Căci toţi se nasc spre a muri Şi mor spre a se naşte. Iar tu, Hyperion, rămâi Oriunde ai apune... Cere-mi cuvântul meu dentâi - Să-ţi dau înţelepciune? Vrei să dau glas acelei guri, Ca dup-a ei cântare Să se ia munţii cu păduri Şi insulele-n mare? Vrei poate-n faptă să arăţi Dreptate şi tărie? Ţi-aş da pământul în bucăţi Să-l faci împărăţie. Îţi dau catarg lângă catarg, Oştiri spre a străbate Pământu-n lung şi marea-n larg, Dar moartea nu se poate... Şi pentru cine vrei să mori? Întoarce-te, te-ndreaptă Spre-acel pământ rătăcitor Şi vezi ce te aşteaptă. ... În locul lui menit din cer Hyperion se-ntoarse Şi, ca şi-n ziua cea de ieri, Lumina şi-o revarsă. Căci este sara-n asfinţit Şi noaptea o să-nceapă; Răsare luna liniştit Şi tremurând din apă Şi umple cu-ale ei scântei Cărările din crânguri. Sub şirul lung de mândri tei Şedeau doi tineri singuri: - O, lasă-mi capul meu pe sân, Iubito, să se culce Sub raza ochiului senin Şi negrăit de dulce; Cu farmecul luminii reci Gândirile străbate-mi, Revarsă linişte de veci Pe noaptea mea de patimi. Şi de asupra mea rămâi Durerea mea de-o curmă, Căci eşti iubirea mea dentâi Şi visul meu din urmă. Hyperion vedea de sus Uimirea-n a lor faţă: Abia un braţ pe gât i-a pus Şi ea l-a prins în braţe... Miroase florile-argintii Şi cad, o dulce ploaie, Pe creştetele-a doi copii Cu plete lungi, bălaie. Ea, îmbătată de amor, Ridică ochii. Vede Luceafărul. Şi-ncetişor Dorinţele-i încrede: - Cobori în jos, luceafăr blând, Alunecând pe-o rază, Pătrunde-n codru şi în gând, Norocu-mi luminează! El tremură ca alte dăţi În codri şi pe dealuri, Călăuzind singurătăţi De mişcătoare valuri; Dar nu mai cade ca-n trecut În mări din tot înaltul: - Ce-ţi pasă ţie, chip de lut, Dac-oi fi eu sau altul? Trăind în cercul vostru strâmt Norocul vă petrece, Ci eu în lumea mea mă simt Nemuritor şi rece.
Sémiramis Il y a 6 ans

Luceafărul de Mihai Eminescu


A fost odată ca-n poveşti,
A fost ca niciodată.
Din rude mari împărăteşti,
O prea frumoasă fată.

Şi era una la părinţi
Şi mândră-n toate cele,
Cum e Fecioara între sfinţi
Şi luna între stele.

Din umbra falnicelor bolţi
Ea pasul şi-l îndreaptă
Lângă fereastră, unde-n colţ
Luceafărul aşteaptă.

Privea în zare cum pe mări
Răsare şi străluce,
Pe mişcătoarele cărări
Corăbii negre duce.

Îl vede azi, îl vede mâini,
Astfel dorinţa-i gata;
El iar, privind de săptămâni,
Îi cade draga fată.

Cum ea pe coate-şi răzima
Visând ale ei tâmple,
De dorul lui şi inima
Şi sufletu-i se împle.

Şi cât de viu s-aprinde el
În orişicare sară,
Spre umbra negrului castel
Când ea o să-i apară.

...

Şi pas cu pas pe urma ei
Alunecă-n odaie,
Ţesând cu recile-i scântei
O mreajă de văpaie.

Şi când în pat se-ntinde drept
Copila să se culce,
I-atinge mâinile pe piept,
I-nchide geana dulce;

Şi din oglindă luminiş
Pe trupu-i se revarsă,
Pe ochii mari, bătând închişi
Pe faţa ei întoarsă.

Ea îl privea cu un surâs,
El tremura-n oglindă,
Căci o urma adânc în vis
De suflet să se prindă.

Iar ea vorbind cu el în somn,
Oftând din greu suspină:
- O, dulce-al nopţii mele domn,
De ce nu vii tu? Vină!

Cobori în jos, luceafăr blând,
Alunecând pe-o rază,
Pătrunde-n casă şi în gând
Şi viaţa-mi luminează!

El asculta tremurător,
Se aprindea mai tare
Şi s-arunca fulgerător,
Se cufunda în mare;

Şi apa unde-au fost căzut
În cercuri se roteşte,
Şi din adânc necunoscut
Un mândru tânăr creşte.

Uşor el trece ca pe prag
Pe marginea ferestei
Şi ţine-n mână un toiag
Încununat cu trestii.

Părea un tânăr voievod
Cu păr de aur moale,
Un vânăt giulgi se-ncheie nod
Pe umerele goale.

Iar umbra feţei străvezii
E albă ca de ceară -
Un mort frumos cu ochii vii
Ce scânteie-n afară.

- Din sfera mea venii cu greu
Ca să-ţi urmez chemarea,
Iar cerul este tatăl meu
Şi mumă-mea e marea.

Ca în cămara ta să vin,
Să te privesc de-aproape,
Am coborât cu-al meu senin
Şi m-am născut din ape.

O, vin'! odorul meu nespus,
Şi lumea ta o lasă;
Eu sunt luceafărul de sus,
Iar tu să-mi fii mireasă.

Colo-n palate de mărgean
Te-oi duce veacuri multe,
Şi toată lumea-n ocean
De tine o s-asculte.

- O, eşti frumos, cum numa-n vis
Un înger se arată,
Dară pe calea ce-ai deschis
N-oi merge niciodată;

Străin la vorbă şi la port,
Luceşti fără de viaţă,
Căci eu sunt vie, tu eşti mort,
Şi ochiul tău mă-ngheaţă.

...

Trecu o zi, trecură trei
Şi iarăşi, noaptea, vine
Luceafărul deasupra ei
Cu razele-i senine.

Ea trebui de el în somn
Aminte să-şi aducă
Şi dor de-al valurilor domn
De inim-o apucă:

- Cobori în jos, luceafăr blând,
Alunecând pe-o rază,
Pătrunde-n casă şi în gând
Şi viaţa-mi luminează!

Cum el din cer o auzi,
Se stinse cu durere,
Iar ceru-ncepe a roti
În locul unde piere;

În aer rumene văpăi
Se-ntind pe lumea-ntreagă,
Şi din a chaosului văi
Un mândru chip se-ncheagă;

Pe negre viţele-i de păr
Coroana-i arde pare,
Venea plutind în adevăr
Scăldat în foc de soare.

Din negru giulgi se desfăşor
Marmoreele braţe,
El vine trist şi gânditor
Şi palid e la faţă;

Dar ochii mari şi minunaţi
Lucesc adânc himeric,
Ca două patimi fără saţ
Şi pline de-ntuneric.

- Din sfera mea venii cu greu
Ca să te-ascult ş-acuma,
Şi soarele e tatăl meu,
Iar noaptea-mi este muma;

O, vin', odorul meu nespus,
Şi lumea ta o lasă;
Eu sunt luceafărul de sus,
Iar tu să-mi fii mireasă.

O, vin', în părul tău bălai
S-anin cununi de stele,
Pe-a mele ceruri să răsai
Mai mândră decât ele.

- O, eşti frumos cum numa-n vis
Un demon se arată,
Dară pe calea ce-ai deschis
N-oi merge niciodată!

Mă dor de crudul tău amor
A pieptului meu coarde,
Şi ochii mari şi grei mă dor,
Privirea ta mă arde.

- Dar cum ai vrea să mă cobor?
Au nu-nţelegi tu oare,
Cum că eu sunt nemuritor,
Şi tu eşti muritoare?

- Nu caut vorbe pe ales,
Nici ştiu cum aş începe -
Deşi vorbeşti pe înţeles,
Eu nu te pot pricepe;

Dar dacă vrei cu crezământ
Să te-ndrăgesc pe tine,
Tu te coboară pe pământ,
Fii muritor ca mine.

- Tu-mi cei chiar nemurirea mea
În schimb pe-o sărutare,
Dar voi să ştii asemenea
Cât te iubesc de tare;

Da, mă voi naşte din păcat,
Primind o altă lege;
Cu vecinicia sunt legat,
Ci voi să mă dezlege.

Şi se tot duce... S-a tot dus.
De dragu-unei copile,
S-a rupt din locul lui de sus,
Pierind mai multe zile.

...

În vremea asta Cătălin,
Viclean copil de casă,
Ce umple cupele cu vin
Mesenilor la masă,

Un paj ce poartă pas cu pas
A-mpărătesii rochii,
Băiat din flori şi de pripas,
Dar îndrăzneţ cu ochii,

Cu obrăjei ca doi bujori
De rumeni, bată-i vina,
Se furişează pânditor
Privind la Cătălina.

Dar ce frumoasă se făcu
Şi mândră, arz-o focul;
Ei, Cătălin, acu-i acu
Ca să-ţi încerci norocul.

Şi-n treacăt o cuprinse lin
Într-un ungher degrabă.
- Da' ce vrei, mări Cătălin?
Ia du-t' de-ţi vezi de treabă.

- Ce voi? Aş vrea să nu mai stai
Pe gânduri totdeauna,
Să râzi mai bine şi să-mi dai
O gură, numai una.

- Dar nici nu ştiu măcar ce-mi ceri,
Dă-mi pace, fugi departe -
O, de luceafărul din cer
M-a prins un dor de moarte.

- Dacă nu ştii, ţi-aş arăta
Din bob în bob amorul,
Ci numai nu te mânia,
Ci stai cu binişorul.

Cum vânătoru-ntinde-n crâng
La păsărele laţul,
Când ţi-oi întinde braţul stâng
Să mă cuprinzi cu braţul;

Şi ochii tăi nemişcători
Sub ochii mei rămâie...
De te înalţ de subsuori
Te-nalţă din călcâie;

Când faţa mea se pleacă-n jos,
În sus rămâi cu faţa,
Să ne privim nesăţios
Şi dulce toată viaţa;

Şi ca să-ţi fie pe deplin
Iubirea cunoscută,
Când sărutându-te mă-nclin,
Tu iarăşi mă sărută.

Ea-l asculta pe copilaş
Uimită şi distrasă,
Şi ruşinos şi drăgălaş,
Mai nu vrea, mai se lasă,

Şi-i zice-ncet: - Încă de mic
Te cunoşteam pe tine,
Şi guraliv şi de nimic,
Te-ai potrivi cu mine...

Dar un luceafăr, răsărit
Din liniştea uitării,
Dă orizon nemărginit
Singurătăţii mării;

Şi tainic genele le plec,
Căci mi le umple plânsul
Când ale apei valuri trec
Călătorind spre dânsul;

Luceşte c-un amor nespus,
Durerea să-mi alunge,
Dar se înalţă tot mai sus,
Ca să nu-l pot ajunge.

Pătrunde trist cu raze reci
Din lumea ce-l desparte...
În veci îl voi iubi şi-n veci
Va rămânea departe...

De-aceea zilele îmi sunt
Pustii ca nişte stepe,
Dar nopţile-s de-un farmec sfânt
Ce nu-l mai pot pricepe.

- Tu eşti copilă, asta e...
Hai ş-om fugi în lume,
Doar ni s-or pierde urmele
Şi nu ne-or şti de nume,

Căci amândoi vom fi cuminţi,
Vom fi voioşi şi teferi,
Vei pierde dorul de părinţi
Şi visul de luceferi.

...

Porni luceafărul. Creşteau
În cer a lui aripe,
Şi căi de mii de ani treceau
În tot atâtea clipe.

Un cer de stele dedesubt,
Deasupra-i cer de stele -
Părea un fulger ne'ntrerupt
Rătăcitor prin ele.

Şi din a chaosului văi,
Jur împrejur de sine,
Vedea, ca-n ziua cea dentâi,
Cum izvorau lumine;

Cum izvorând îl înconjor
Ca nişte mări, de-a-notul...
El zboară, gând purtat de dor,
Pân' piere totul, totul;

Căci unde-ajunge nu-i hotar,
Nici ochi spre a cunoaşte,
Şi vremea-ncearcă în zadar
Din goluri a se naşte.

Nu e nimic şi totuşi e
O sete care-l soarbe,
E un adânc asemene
Uitării celei oarbe.

- De greul negrei vecinicii,
Părinte, mă dezleagă
Şi lăudat pe veci să fii
Pe-a lumii scară-ntreagă;

O, cere-mi, Doamne, orice preţ
Dar dă-mi o altă soarte,
Căci tu izvor eşti de vieţi
Şi dătător de moarte;

Reia-mi al nemuririi nimb
Şi focul din privire,
Şi pentru toate dă-mi în schimb
O oră de iubire...

Din chaos, Doamne,-am apărut
Şi m-aş întoarce-n chaos...
Şi din repaos m-am născut,
Mi-e sete de repaos.

- Hyperion, ce din genuni
Răsai c-o-ntreagă lume,
Nu cere semne şi minuni
Care n-au chip şi nume;

Tu vrei un om să te socoţi
Cu ei să te asameni?
Dar piară oamenii cu toţi,
S-ar naşte iarăşi oameni.

Ei numai doar durează-n vânt
Deşerte idealuri -
Când valuri află un mormânt,
Răsar în urmă valuri;

Ei doar au stele cu noroc
Şi prigoniri de soarte,
Noi nu avem nici timp, nici loc
Şi nu cunoaştem moarte.

Din sânul vecinicului ieri
Trăieşte azi ce moare,
Un soare de s-ar stinge-n cer
S-aprinde iarăşi soare;

Părând pe veci a răsări,
Din urmă moartea-l paşte,
Căci toţi se nasc spre a muri
Şi mor spre a se naşte.

Iar tu, Hyperion, rămâi
Oriunde ai apune...
Cere-mi cuvântul meu dentâi -
Să-ţi dau înţelepciune?

Vrei să dau glas acelei guri,
Ca dup-a ei cântare
Să se ia munţii cu păduri
Şi insulele-n mare?

Vrei poate-n faptă să arăţi
Dreptate şi tărie?
Ţi-aş da pământul în bucăţi
Să-l faci împărăţie.

Îţi dau catarg lângă catarg,
Oştiri spre a străbate
Pământu-n lung şi marea-n larg,
Dar moartea nu se poate...

Şi pentru cine vrei să mori?
Întoarce-te, te-ndreaptă
Spre-acel pământ rătăcitor
Şi vezi ce te aşteaptă.

...

În locul lui menit din cer
Hyperion se-ntoarse
Şi, ca şi-n ziua cea de ieri,
Lumina şi-o revarsă.

Căci este sara-n asfinţit
Şi noaptea o să-nceapă;
Răsare luna liniştit
Şi tremurând din apă

Şi umple cu-ale ei scântei
Cărările din crânguri.
Sub şirul lung de mândri tei
Şedeau doi tineri singuri:

- O, lasă-mi capul meu pe sân,
Iubito, să se culce
Sub raza ochiului senin
Şi negrăit de dulce;

Cu farmecul luminii reci
Gândirile străbate-mi,
Revarsă linişte de veci
Pe noaptea mea de patimi.

Şi de asupra mea rămâi
Durerea mea de-o curmă,
Căci eşti iubirea mea dentâi
Şi visul meu din urmă.

Hyperion vedea de sus
Uimirea-n a lor faţă:
Abia un braţ pe gât i-a pus
Şi ea l-a prins în braţe...

Miroase florile-argintii
Şi cad, o dulce ploaie,
Pe creştetele-a doi copii
Cu plete lungi, bălaie.

Ea, îmbătată de amor,
Ridică ochii. Vede
Luceafărul. Şi-ncetişor
Dorinţele-i încrede:

- Cobori în jos, luceafăr blând,
Alunecând pe-o rază,
Pătrunde-n codru şi în gând,
Norocu-mi luminează!

El tremură ca alte dăţi
În codri şi pe dealuri,
Călăuzind singurătăţi
De mişcătoare valuri;

Dar nu mai cade ca-n trecut
În mări din tot înaltul:
- Ce-ţi pasă ţie, chip de lut,
Dac-oi fi eu sau altul?

Trăind în cercul vostru strâmt
Norocul vă petrece,
Ci eu în lumea mea mă simt
Nemuritor şi rece.

merci @Sémiramis :) ne parlant pas un mot de cette langue je l'ai écouté là, https://www.youtube.com/watch?v=tsvnEZav37g
Eléa Il y a 6 ans

merci Sémiramis

ne parlant pas un mot de cette langue je l'ai écouté là,


https://www.youtube.com/watch?v=tsvnEZav37g

( La traduction française elle ne vos riens... donc... ) It was many and many a year ago, In a kingdom by the sea, That a maiden there lived whom you may know By the name of Annabel Lee; And this maiden she lived with no other thought Than to love and be loved by me. I was a child and she was a child, In this kingdom by the sea, But we loved with a love that was more than love— I and my Annabel Lee— With a love that the wingèd seraphs of Heaven Coveted her and me. And this was the reason that, long ago, In this kingdom by the sea, A wind blew out of a cloud, chilling My beautiful Annabel Lee; So that her highborn kinsmen came And bore her away from me, To shut her up in a sepulchre In this kingdom by the sea. The angels, not half so happy in Heaven, Went envying her and me— Yes!—that was the reason (as all men know, In this kingdom by the sea) That the wind came out of the cloud by night, Chilling and killing my Annabel Lee. But our love it was stronger by far than the love Of those who were older than we— Of many far wiser than we— And neither the angels in Heaven above Nor the demons down under the sea Can ever dissever my soul from the soul Of the beautiful Annabel Lee; For the moon never beams, without bringing me dreams Of the beautiful Annabel Lee; And the stars never rise, but I feel the bright eyes Of the beautiful Annabel Lee; And so, all the night-tide, I lie down by the side Of my darling—my darling—my life and my bride, In her sepulchre there by the sea— In her tomb by the sounding sea. - Annabel Lee Edgar A Poe
AnonymeIl y a 6 ans

( La traduction française elle ne vos riens... donc... )

It was many and many a year ago,
In a kingdom by the sea,
That a maiden there lived whom you may know
By the name of Annabel Lee;
And this maiden she lived with no other thought
Than to love and be loved by me.

I was a child and she was a child,
In this kingdom by the sea,
But we loved with a love that was more than love—
I and my Annabel Lee—
With a love that the wingèd seraphs of Heaven
Coveted her and me.

And this was the reason that, long ago,
In this kingdom by the sea,
A wind blew out of a cloud, chilling
My beautiful Annabel Lee;
So that her highborn kinsmen came
And bore her away from me,
To shut her up in a sepulchre
In this kingdom by the sea.

The angels, not half so happy in Heaven,
Went envying her and me—
Yes!—that was the reason (as all men know,
In this kingdom by the sea)
That the wind came out of the cloud by night,
Chilling and killing my Annabel Lee.

But our love it was stronger by far than the love
Of those who were older than we—
Of many far wiser than we—
And neither the angels in Heaven above
Nor the demons down under the sea
Can ever dissever my soul from the soul
Of the beautiful Annabel Lee;

For the moon never beams, without bringing me dreams
Of the beautiful Annabel Lee;
And the stars never rise, but I feel the bright eyes
Of the beautiful Annabel Lee;
And so, all the night-tide, I lie down by the side
Of my darling—my darling—my life and my bride,
In her sepulchre there by the sea—
In her tomb by the sounding sea.

- Annabel Lee
Edgar A Poe

Je ne savais pas où mettre ça, le topic poésie c'est de la création et ça c'en est pas, du coup je lâche ça ici: Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent ; ce sont Ceux dont un dessein ferme emplit l'âme et le front. Ceux qui d'un haut destin gravissent l'âpre cime. Ceux qui marchent pensifs, épris d'un but sublime. Ayant devant les yeux sans cesse, nuit et jour, Ou quelque saint labeur ou quelque grand amour. C'est le prophète saint prosterné devant l'arche, C'est le travailleur, pâtre, ouvrier, patriarche. Ceux dont le coeur est bon, ceux dont les jours sont pleins. Ceux-là vivent, Seigneur ! les autres, je les plains. Car de son vague ennui le néant les enivre, Car le plus lourd fardeau, c'est d'exister sans vivre. Inutiles, épars, ils traînent ici-bas Le sombre accablement d'être en ne pensant pas. Ils s'appellent vulgus, plebs, la tourbe, la foule. Ils sont ce qui murmure, applaudit, siffle, coule, Bat des mains, foule aux pieds, bâille, dit oui, dit non, N'a jamais de figure et n'a jamais de nom ; Troupeau qui va, revient, juge, absout, délibère, Détruit, prêt à Marat comme prêt à Tibère, Foule triste, joyeuse, habits dorés, bras nus, Pêle-mêle, et poussée aux gouffres inconnus. Ils sont les passants froids sans but, sans noeud, sans âge ; Le bas du genre humain qui s'écroule en nuage ; Ceux qu'on ne connaît pas, ceux qu'on ne compte pas, Ceux qui perdent les mots, les volontés, les pas. L'ombre obscure autour d'eux se prolonge et recule ; Ils n'ont du plein midi qu'un lointain crépuscule, Car, jetant au hasard les cris, les voix, le bruit, Ils errent près du bord sinistre de la nuit. Quoi ! ne point aimer ! suivre une morne carrière Sans un songe en avant, sans un deuil en arrière, Quoi ! marcher devant soi sans savoir où l'on va, Rire de Jupiter sans croire à Jéhova, Regarder sans respect l'astre, la fleur, la femme, Toujours vouloir le corps, ne jamais chercher l'âme, Pour de vains résultats faire de vains efforts, N'attendre rien d'en haut ! ciel ! oublier les morts ! Oh non, je ne suis point de ceux-là ! grands, prospères, Fiers, puissants, ou cachés dans d'immondes repaires, Je les fuis, et je crains leurs sentiers détestés ; Et j'aimerais mieux être, ô fourmis des cités, Tourbe, foule, hommes faux, coeurs morts, races déchues, Un arbre dans les bois qu'une âme en vos cohues ! V. Hugo
Theo Putnam Il y a 6 ans

Je ne savais pas où mettre ça, le topic poésie c'est de la création et ça c'en est pas, du coup je lâche ça ici:

Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent ; ce sont
Ceux dont un dessein ferme emplit l'âme et le front.
Ceux qui d'un haut destin gravissent l'âpre cime.
Ceux qui marchent pensifs, épris d'un but sublime.
Ayant devant les yeux sans cesse, nuit et jour,
Ou quelque saint labeur ou quelque grand amour.
C'est le prophète saint prosterné devant l'arche,
C'est le travailleur, pâtre, ouvrier, patriarche.
Ceux dont le coeur est bon, ceux dont les jours sont pleins.
Ceux-là vivent, Seigneur ! les autres, je les plains.
Car de son vague ennui le néant les enivre,
Car le plus lourd fardeau, c'est d'exister sans vivre.
Inutiles, épars, ils traînent ici-bas
Le sombre accablement d'être en ne pensant pas.
Ils s'appellent vulgus, plebs, la tourbe, la foule.
Ils sont ce qui murmure, applaudit, siffle, coule,
Bat des mains, foule aux pieds, bâille, dit oui, dit non,
N'a jamais de figure et n'a jamais de nom ;
Troupeau qui va, revient, juge, absout, délibère,
Détruit, prêt à Marat comme prêt à Tibère,
Foule triste, joyeuse, habits dorés, bras nus,
Pêle-mêle, et poussée aux gouffres inconnus.
Ils sont les passants froids sans but, sans noeud, sans âge ;
Le bas du genre humain qui s'écroule en nuage ;
Ceux qu'on ne connaît pas, ceux qu'on ne compte pas,
Ceux qui perdent les mots, les volontés, les pas.
L'ombre obscure autour d'eux se prolonge et recule ;
Ils n'ont du plein midi qu'un lointain crépuscule,
Car, jetant au hasard les cris, les voix, le bruit,
Ils errent près du bord sinistre de la nuit.

Quoi ! ne point aimer ! suivre une morne carrière
Sans un songe en avant, sans un deuil en arrière,
Quoi ! marcher devant soi sans savoir où l'on va,
Rire de Jupiter sans croire à Jéhova,
Regarder sans respect l'astre, la fleur, la femme,
Toujours vouloir le corps, ne jamais chercher l'âme,
Pour de vains résultats faire de vains efforts,
N'attendre rien d'en haut ! ciel ! oublier les morts !
Oh non, je ne suis point de ceux-là ! grands, prospères,
Fiers, puissants, ou cachés dans d'immondes repaires,
Je les fuis, et je crains leurs sentiers détestés ;
Et j'aimerais mieux être, ô fourmis des cités,
Tourbe, foule, hommes faux, coeurs morts, races déchues,
Un arbre dans les bois qu'une âme en vos cohues !

V. Hugo

Comment ça, Hugo c'est pas un poète ni un créateur ? :D Merci pour le partage & Belle journée à tous bande de gnous Sauvages
AnonymeIl y a 6 ans

Comment ça, Hugo c'est pas un poète ni un créateur ?

Merci pour le partage & Belle journée à tous bande de gnous Sauvages

[quote="Churinga"]Comment ça, Hugo c'est pas un poète ni un créateur ? :D[/quote] Nan mais c'est pas MA création. Et t'as très bien compris. Petit merdeux :D
Theo Putnam Il y a 6 ans

Comment ça, Hugo c'est pas un poète ni un créateur ?
@Churinga
Nan mais c'est pas MA création. Et t'as très bien compris. Petit merdeux

[color=navy]J'vous ai déplacés dans le topic adéquat, arrêtez de vous crêper le chignon :p [/color]
Isa Il y a 6 ans

J'vous ai déplacés dans le topic adéquat, arrêtez de vous crêper le chignon

Comme un éléphant son ivoire, J’ai en bouche un bien précieux. Pourpre mort !.. J’achète ma gloire Au prix des mots mélodieux. [b]L'éléphant[/b] - [i]Guillaume Apollinaire[/i]
Sémiramis Il y a 6 ans

Comme un éléphant son ivoire,
J’ai en bouche un bien précieux.
Pourpre mort !.. J’achète ma gloire
Au prix des mots mélodieux.

L'éléphant - Guillaume Apollinaire

[b]Le vieil homme[/b] - [i]Aragon[/i] Moi qui n'ai jamais pu me faire à mon visage Que m'importe traîner dans la clarté des cieux Les coutures les traits et les taches de l'âge Mais lire les journaux demande d'autres yeux Comment courir avec ce cœur qui bat trop vite Que s'est-il donc passé La vie et je suis vieux Tout pèse L'ombre augmente aux gestes qu'elle imite Le monde extérieur se fait plus exigeant Chaque jour autrement je connais mes limites Je me sens étranger toujours parmi les gens J'entends mal je perds intérêt à tant de choses Le jour n'a plus pour moi ses doux reflets changeants Le printemps qui revient est sans métamorphoses Il ne m'apporte plus la lourdeur des lilas Je crois me souvenir lorsque je sens les roses Je ne tiens plus jamais jamais entre mes bras La mer qui se ruait et me roulait d'écume Jusqu'à ce qu'à la fin tous les deux fussions las Voici déjà beau temps que je n'ai plus coutume De défier la neige et gravir les sommets Dans l'éblouissement du soleil et des brumes Même comme autrefois je ne puis plus jamais Partir dans les chemins devant moi pour des heures Sans calculer ce que revenir me permet Revenir Ces pas-ci vont vers d'autres demeures Je ne reprendrai pas les sentiers parcourus Dieu merci le repos de l'homme c'est qu'il meure Et le sillon jamais ne revoit la charrue On se fait lentement à cette paix profonde Elle avance vers vous comme l'eau d'une crue Elle monte elle monte en vous elle féconde Chaque minute Elle fait à tout ce lointain Amer et merveilleux comme la fin du monde Et de la sentir proche est plus frais qu'au matin Avant l'épanouissement de la lumière Le parfum de l'étoile en dernier qui s'éteint Quand ce qui fut malheur ou bonheur se nomme hiei Pourtant l'étoile brille encore et le cœur bat Pourtant quand je croyais cette fièvre première Apaisée à la fin comme un vent qui tomba Quand je croyais le trouble aboli le vertige Oublié l'air ancien balbutié trop bas Que l'écho le répète au loin Voyons que dis-je Déjà je perds le fil ténu de ma pensée Insensible déjà seul et sourd aux prodiges Quand je croyais le seuil de l'ombre outrepassé Le frisson d'autrefois revient dans mon absence Et comme d'une main mon front est caressé Le jour au plus profond de moi reprend naissance
Sémiramis Il y a 6 ans

Le vieil homme - Aragon


Moi qui n'ai jamais pu me faire à mon visage
Que m'importe traîner dans la clarté des cieux
Les coutures les traits et les taches de l'âge



Mais lire les journaux demande d'autres yeux
Comment courir avec ce cœur qui bat trop vite
Que s'est-il donc passé
La vie et je suis vieux



Tout pèse
L'ombre augmente aux gestes qu'elle imite
Le monde extérieur se fait plus exigeant
Chaque jour autrement je connais mes limites



Je me sens étranger toujours parmi les gens

J'entends mal je perds intérêt à tant de choses

Le jour n'a plus pour moi ses doux reflets changeants



Le printemps qui revient est sans métamorphoses
Il ne m'apporte plus la lourdeur des lilas
Je crois me souvenir lorsque je sens les roses



Je ne tiens plus jamais jamais entre mes bras
La mer qui se ruait et me roulait d'écume
Jusqu'à ce qu'à la fin tous les deux fussions las



Voici déjà beau temps que je n'ai plus coutume
De défier la neige et gravir les sommets
Dans l'éblouissement du soleil et des brumes



Même comme autrefois je ne puis plus jamais
Partir dans les chemins devant moi pour des heures
Sans calculer ce que revenir me permet



Revenir

Ces pas-ci vont vers d'autres demeures
Je ne reprendrai pas les sentiers parcourus
Dieu merci le repos de l'homme c'est qu'il meure



Et le sillon jamais ne revoit la charrue
On se fait lentement à cette paix profonde
Elle avance vers vous comme l'eau d'une crue



Elle monte elle monte en vous elle féconde
Chaque minute
Elle fait à tout ce lointain
Amer et merveilleux comme la fin du monde



Et de la sentir proche est plus frais qu'au matin

Avant l'épanouissement de la lumière

Le parfum de l'étoile en dernier qui s'éteint



Quand ce qui fut malheur ou bonheur se nomme hiei
Pourtant l'étoile brille encore et le cœur bat
Pourtant quand je croyais cette fièvre première



Apaisée à la fin comme un vent qui tomba
Quand je croyais le trouble aboli le vertige
Oublié l'air ancien balbutié trop bas



Que l'écho le répète au loin

Voyons que dis-je
Déjà je perds le fil ténu de ma pensée
Insensible déjà seul et sourd aux prodiges



Quand je croyais le seuil de l'ombre outrepassé
Le frisson d'autrefois revient dans mon absence
Et comme d'une main mon front est caressé

Le jour au plus profond de moi reprend naissance

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AnonymeIl y a 6 ans

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AnonymeIl y a 6 ans

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AnonymeIl y a 6 ans

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AnonymeIl y a 6 ans

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Un autre de Mihai Eminescu, traduit cette fois : Vezi, rândunelele se duc, Les hirondelles vont, Se scutur frunzele de nuc, Se décrochent les feuilles de noyer, S-aşează bruma peste vii – Le givre enveloppe la vigne– De ce nu-mi vii, de ce nu-mi vii? Pourquoi ne reviens-tu pas, pourquoi ne reviens-tu pas ? * O, vino iar în al meu braţ, O, viens encore dans mes bras, Să te privesc cu mult nesaţ, Sous mon regard, sous mon désir, Să razim dulce capul meu Poser doucement ma tête De sânul tău, de sânul tău! Sur ton sein , sur ton sein ! * Ţi-aduci aminte cum pe-atunci Rappelles-toi de l’époque Când ne primblam prin văi şi lunci, On se promenait à travers les vallées et prairies, Te ridicam de subsuori Je te soulevais De-atâtea ori, de-atâtea ori? Tant de fois, tant de fois ? * În lumea asta sunt femei Dans ce monde se sont des femmes Cu ochi ce izvorăsc scântei… Qui avec des yeux font des étincelles … Dar, oricât ele sunt de sus, Toutefois, peu importe, Ca tine nu-s, ca tine nu-s! Elles ne sont pas comme toi, pas comme toi ! * Căci tu înseninezi mereu Tu éclaires toujours Viaţa sufletului meu, La vie de mon âme, Mai mândră decât orice stea, Plus fière qu’une étoile, Iubita mea, iubita mea! Mon amour, mon amour ! * Târzie toamnă e acum, C’est maintenant la fin de l’automne, Se scutur frunzele pe drum, Les feuilles parsèment la route, Şi lanurile sunt pustii… Et les champs sont déserts … De ce nu-mi vii, de ce nu-mi vii? Pourquoi ne reviens tu pas, pourquoi ne reviens-tu pas ?
Sémiramis Il y a 6 ans

Un autre de Mihai Eminescu, traduit cette fois :

Vezi, rândunelele se duc,
Les hirondelles vont,
Se scutur frunzele de nuc,
Se décrochent les feuilles de noyer,
S-aşează bruma peste vii –
Le givre enveloppe la vigne–
De ce nu-mi vii, de ce nu-mi vii?
Pourquoi ne reviens-tu pas, pourquoi ne reviens-tu pas ?

*

O, vino iar în al meu braţ,
O, viens encore dans mes bras,
Să te privesc cu mult nesaţ,
Sous mon regard, sous mon désir,
Să razim dulce capul meu
Poser doucement ma tête
De sânul tău, de sânul tău!
Sur ton sein , sur ton sein !

*

Ţi-aduci aminte cum pe-atunci
Rappelles-toi de l’époque
Când ne primblam prin văi şi lunci,
On se promenait à travers les vallées et prairies,
Te ridicam de subsuori
Je te soulevais
De-atâtea ori, de-atâtea ori?
Tant de fois, tant de fois ?

*

În lumea asta sunt femei
Dans ce monde se sont des femmes
Cu ochi ce izvorăsc scântei…
Qui avec des yeux font des étincelles …
Dar, oricât ele sunt de sus,
Toutefois, peu importe,
Ca tine nu-s, ca tine nu-s!
Elles ne sont pas comme toi, pas comme toi !

*

Căci tu înseninezi mereu
Tu éclaires toujours
Viaţa sufletului meu,
La vie de mon âme,
Mai mândră decât orice stea,
Plus fière qu’une étoile,
Iubita mea, iubita mea!
Mon amour, mon amour !

*

Târzie toamnă e acum,
C’est maintenant la fin de l’automne,
Se scutur frunzele pe drum,
Les feuilles parsèment la route,
Şi lanurile sunt pustii…
Et les champs sont déserts …
De ce nu-mi vii, de ce nu-mi vii?
Pourquoi ne reviens tu pas, pourquoi ne reviens-tu pas ?

Il y a des troubadours, des poètes, des écrivains, qui parfois laissent des écrits, mais Saez c'est autre chose, un verbe accrochant les mots aux étoiles, tramant l'intime dans le grandiose, donnant à l'histoire rendez-vous. Il n'est pas un personnage de scène évoluant dans le monde des vanités, Saez s'en est évadé. Non plus poète, mais poème. Le poète s'est désintégré, il est hors du temps, loin de tous, Saez est une œuvre, c'est tout.
AnonymeIl y a 6 ans

Il y a des troubadours, des poètes, des écrivains, qui parfois laissent des écrits, mais Saez c'est autre chose, un verbe accrochant les mots aux étoiles, tramant l'intime dans le grandiose, donnant à l'histoire rendez-vous.
Il n'est pas un personnage de scène évoluant dans le monde des vanités, Saez s'en est évadé. Non plus poète, mais poème. Le poète s'est désintégré, il est hors du temps, loin de tous, Saez est une œuvre, c'est tout.

[b]Prométhée[/b] Louise Ackermann Frappe encor, Jupiter, accable-moi, mutile L’ennemi terrassé que tu sais impuissant ! Écraser n’est pas vaincre, et ta foudre inutile S’éteindra dans mon sang, Avant d’avoir dompté l’héroïque pensée Qui fait du vieux Titan un révolté divin ; C’est elle qui te brave, et ta rage insensée N’a cloué sur ces monts qu’un simulacre vain. Tes coups n’auront porté que sur un peu d’argile ; Libre dans les liens de cette chair fragile, L’âme de Prométhée échappe à ta fureur. Sous l’ongle du vautour qui sans fin me dévore, Un invisible amour fait palpiter encore Les lambeaux de mon coeur. Si ces pics désolés que la tempête assiège Ont vu couler parfois sur leur manteau de neige Des larmes que mes yeux ne pouvaient retenir, Vous le savez, rochers, immuables murailles Que d’horreur cependant je sentais tressaillir, La source de mes pleurs était dans mes entrailles ; C’est la compassion qui les a fait jaillir. Ce n’était point assez de mon propre martyre ; Ces flancs ouverts, ce sein qu’un bras divin déchire Est rempli de pitié pour d’autres malheureux. Je les vois engager une lutte éternelle ; L’image horrible est là ; j’ai devant la prunelle La vision des maux qui vont fondre sur eux. Ce spectacle navrant m’obsède et m’exaspère. Supplice intolérable et toujours renaissant, Mon vrai, mon seul vautour, c’est la pensée amère Que rien n’arrachera ces germes de misére Que ta haine a semés dans leur chair et leur sang. Pourtant, ô Jupiter, l’homme est ta créature ; C’est toi qui l’as conçu, c’est toi qui l’as formé, Cet être déplorable, infirme, désarmé, Pour qui tout est danger, épouvante, torture, Qui, dans le cercle étroit de ses jours enfermé, Étouffe et se débat, se blesse et se lamente. Ah ! quand tu le jetas sur la terre inclémente, Tu savais quels fléaux l’y devaient assaillir, Qu’on lui disputerait sa place et sa pâture, Qu’un souffle l’abattrait, que l’aveugle Nature Dans son indifférence allait l’ensevelir. Je l’ai trouvé blotti sous quelque roche humide, Ou rampant dans les bois, spectre hâve et timide Qui n’entendait partout que gronder et rugir, Seul affamé, seul triste au grand banquet des êtres, Du fond des eaux, du sein des profondeurs champêtres Tremblant toujours de voir un ennemi surgir. Mais quoi ! sur cet objet de ta haine immortelle, Imprudent que j’étais, je me suis attendri ; J’allumai la pensée et jetai l’étincelle Dans cet obscur limon dont tu l’avais pétri. Il n’était qu’ébauché, j’achevai ton ouvrage. Plein d’espoir et d’audace, en mes vastes desseins J’aurais sans hésiter mis les cieux au pillage, Pour le doter après du fruit de mes larcins. Je t’ai ravi le feu ; de conquête en conquête J’arrachais de tes mains ton sceptre révéré. Grand Dieu ! ta foudre à temps éclata sur ma tête ; Encore un attentat, l’homme était délivré ! La voici donc ma faute, exécrable et sublime. Compatir, quel forfait ! Se dévouer, quel crime ! Quoi ! j’aurais, impuni, défiant tes rigueurs, Ouvert aux opprimés mes bras libérateurs ? Insensé ! m’être ému quand la pitié s’expie ! Pourtant c’est Prométhée, oui, c’est ce même impie Qui naguère t’aidait à vaincre les Titans. J’étais à tes côtés dans l’ardente mêlée ; Tandis que mes conseils guidaient les combattants, Mes coups faisaient trembler la demeure étoilée. Il s’agissait pour moi du sort de l’univers : Je voulais en finir avec les dieux pervers. Ton règne allait m’ouvrir cette ère pacifique Que mon coeur transporté saluait de ses voeux. En son cours éthéré le soleil magnifique N’aurait plus éclairé que des êtres heureux. La Terreur s’enfuyait en écartant les ombres Qui voilaient ton sourire ineffable et clément, Et le réseau d’airain des Nécessités sombres Se brisait de lui-même aux pieds d’un maître aimant. Tout était joie, amour, essor, efflorescence ; Lui-même Dieu n’était que le rayonnement De la toute-bonté dans la toute-puissance. O mes désirs trompés ! O songe évanoui ! Des splendeurs d’un tel rêve, encor l’oeil ébloui, Me retrouver devant l’iniquité céleste. Devant un Dieu jaloux qui frappe et qui déteste, Et dans mon désespoir me dire avec horreur : « Celui qui pouvait tout a voulu la douleur ! » Mais ne t’abuse point ! Sur ce roc solitaire Tu ne me verras pas succomber en entier. Un esprit de révolte a transformé la terre, Et j’ai dès aujourd’hui choisi mon héritier. Il poursuivra mon oeuvre en marchant sur ma trace, Né qu’il est comme moi pour tenter et souffrir. Aux humains affranchis je lègue mon audace, Héritage sacré qui ne peut plus périr. La raison s’affermit, le doute est prêt à naître. Enhardis à ce point d’interroger leur maître, Des mortels devant eux oseront te citer : Pourquoi leurs maux ? Pourquoi ton caprice et ta haine ? Oui, ton juge t’attend, – la conscience humaine ; Elle ne peut t’absoudre et va te rejeter. Le voilà, ce vengeur promis à ma détresse ! Ah ! quel souffle épuré d’amour et d’allégresse En traversant le monde enivrera mon coeur Le jour où, moins hardie encor que magnanime, Au lieu de l’accuser, ton auguste victime Niera son oppresseur ! Délivré de la Foi comme d’un mauvais rêve, L’homme répudiera les tyrans immortels, Et n’ira plus, en proie à des terreurs sans trêve, Se courber lâchement au pied de tes autels. Las de le trouver sourd, il croira le ciel vide. Jetant sur toi son voile éternel et splendide, La Nature déjà te cache à son regard ; Il ne découvrira dans l’univers sans borne, Pour tout Dieu désormais, qu’un couple aveugle et morne, La Force et le Hasard. Montre-toi, Jupiter, éclate alors, fulmine, Contre ce fugitif à ton joug échappé ! Refusant dans ses maux de voir ta main divine, Par un pouvoir fatal il se dira frappé. Il tombera sans peur, sans plainte, sans prière ; Et quand tu donnerais ton aigle et ton tonnerre Pour l’entendre pousser, au fort de son tourment, Un seul cri qui t’atteste, une injure, un blasphème, Il restera muet : ce silence suprême Sera ton châtiment. Tu n’auras plus que moi dans ton immense empire Pour croire encore en toi, funeste Déité. Plutôt nier le jour ou l’air que je respire Que ta puissance inique et que ta cruauté. Perdu dans cet azur, sur ces hauteurs sublimes, Ah ! j’ai vu de trop près tes fureurs et tes crimes ; J’ai sous tes coups déjà trop souffert, trop saigné ; Le doute est impossible à mon coeur indigné. Oui ! tandis que du Mal, oeuvre de ta colère, Renonçant désormais à sonder le mystère, L’esprit humain ailleurs portera son flambeau, Seul je saurai le mot de cette énigme obscure, Et j’aurai reconnu, pour comble de torture, Un Dieu dans mon bourreau.
Sémiramis Il y a 6 ans

Prométhée
Louise Ackermann

Frappe encor, Jupiter, accable-moi, mutile
L’ennemi terrassé que tu sais impuissant !
Écraser n’est pas vaincre, et ta foudre inutile
S’éteindra dans mon sang,

Avant d’avoir dompté l’héroïque pensée
Qui fait du vieux Titan un révolté divin ;
C’est elle qui te brave, et ta rage insensée
N’a cloué sur ces monts qu’un simulacre vain.
Tes coups n’auront porté que sur un peu d’argile ;
Libre dans les liens de cette chair fragile,
L’âme de Prométhée échappe à ta fureur.
Sous l’ongle du vautour qui sans fin me dévore,
Un invisible amour fait palpiter encore
Les lambeaux de mon coeur.

Si ces pics désolés que la tempête assiège
Ont vu couler parfois sur leur manteau de neige
Des larmes que mes yeux ne pouvaient retenir,
Vous le savez, rochers, immuables murailles
Que d’horreur cependant je sentais tressaillir,
La source de mes pleurs était dans mes entrailles ;
C’est la compassion qui les a fait jaillir.

Ce n’était point assez de mon propre martyre ;
Ces flancs ouverts, ce sein qu’un bras divin déchire
Est rempli de pitié pour d’autres malheureux.
Je les vois engager une lutte éternelle ;
L’image horrible est là ; j’ai devant la prunelle
La vision des maux qui vont fondre sur eux.
Ce spectacle navrant m’obsède et m’exaspère.
Supplice intolérable et toujours renaissant,
Mon vrai, mon seul vautour, c’est la pensée amère
Que rien n’arrachera ces germes de misére
Que ta haine a semés dans leur chair et leur sang.

Pourtant, ô Jupiter, l’homme est ta créature ;
C’est toi qui l’as conçu, c’est toi qui l’as formé,
Cet être déplorable, infirme, désarmé,
Pour qui tout est danger, épouvante, torture,
Qui, dans le cercle étroit de ses jours enfermé,
Étouffe et se débat, se blesse et se lamente.
Ah ! quand tu le jetas sur la terre inclémente,
Tu savais quels fléaux l’y devaient assaillir,
Qu’on lui disputerait sa place et sa pâture,
Qu’un souffle l’abattrait, que l’aveugle Nature
Dans son indifférence allait l’ensevelir.
Je l’ai trouvé blotti sous quelque roche humide,
Ou rampant dans les bois, spectre hâve et timide
Qui n’entendait partout que gronder et rugir,
Seul affamé, seul triste au grand banquet des êtres,
Du fond des eaux, du sein des profondeurs champêtres
Tremblant toujours de voir un ennemi surgir.

Mais quoi ! sur cet objet de ta haine immortelle,
Imprudent que j’étais, je me suis attendri ;
J’allumai la pensée et jetai l’étincelle
Dans cet obscur limon dont tu l’avais pétri.
Il n’était qu’ébauché, j’achevai ton ouvrage.
Plein d’espoir et d’audace, en mes vastes desseins
J’aurais sans hésiter mis les cieux au pillage,
Pour le doter après du fruit de mes larcins.
Je t’ai ravi le feu ; de conquête en conquête
J’arrachais de tes mains ton sceptre révéré.
Grand Dieu ! ta foudre à temps éclata sur ma tête ;
Encore un attentat, l’homme était délivré !

La voici donc ma faute, exécrable et sublime.
Compatir, quel forfait ! Se dévouer, quel crime !
Quoi ! j’aurais, impuni, défiant tes rigueurs,
Ouvert aux opprimés mes bras libérateurs ?
Insensé ! m’être ému quand la pitié s’expie !
Pourtant c’est Prométhée, oui, c’est ce même impie
Qui naguère t’aidait à vaincre les Titans.
J’étais à tes côtés dans l’ardente mêlée ;
Tandis que mes conseils guidaient les combattants,
Mes coups faisaient trembler la demeure étoilée.
Il s’agissait pour moi du sort de l’univers :
Je voulais en finir avec les dieux pervers.

Ton règne allait m’ouvrir cette ère pacifique
Que mon coeur transporté saluait de ses voeux.
En son cours éthéré le soleil magnifique
N’aurait plus éclairé que des êtres heureux.
La Terreur s’enfuyait en écartant les ombres
Qui voilaient ton sourire ineffable et clément,
Et le réseau d’airain des Nécessités sombres
Se brisait de lui-même aux pieds d’un maître aimant.
Tout était joie, amour, essor, efflorescence ;
Lui-même Dieu n’était que le rayonnement
De la toute-bonté dans la toute-puissance.

O mes désirs trompés ! O songe évanoui !
Des splendeurs d’un tel rêve, encor l’oeil ébloui,
Me retrouver devant l’iniquité céleste.
Devant un Dieu jaloux qui frappe et qui déteste,
Et dans mon désespoir me dire avec horreur :
« Celui qui pouvait tout a voulu la douleur ! »

Mais ne t’abuse point ! Sur ce roc solitaire
Tu ne me verras pas succomber en entier.
Un esprit de révolte a transformé la terre,
Et j’ai dès aujourd’hui choisi mon héritier.
Il poursuivra mon oeuvre en marchant sur ma trace,
Né qu’il est comme moi pour tenter et souffrir.
Aux humains affranchis je lègue mon audace,
Héritage sacré qui ne peut plus périr.
La raison s’affermit, le doute est prêt à naître.
Enhardis à ce point d’interroger leur maître,
Des mortels devant eux oseront te citer :
Pourquoi leurs maux ? Pourquoi ton caprice et ta haine ?
Oui, ton juge t’attend, – la conscience humaine ;
Elle ne peut t’absoudre et va te rejeter.

Le voilà, ce vengeur promis à ma détresse !
Ah ! quel souffle épuré d’amour et d’allégresse
En traversant le monde enivrera mon coeur
Le jour où, moins hardie encor que magnanime,
Au lieu de l’accuser, ton auguste victime
Niera son oppresseur !

Délivré de la Foi comme d’un mauvais rêve,
L’homme répudiera les tyrans immortels,
Et n’ira plus, en proie à des terreurs sans trêve,
Se courber lâchement au pied de tes autels.
Las de le trouver sourd, il croira le ciel vide.
Jetant sur toi son voile éternel et splendide,
La Nature déjà te cache à son regard ;
Il ne découvrira dans l’univers sans borne,
Pour tout Dieu désormais, qu’un couple aveugle et morne,
La Force et le Hasard.

Montre-toi, Jupiter, éclate alors, fulmine,
Contre ce fugitif à ton joug échappé !
Refusant dans ses maux de voir ta main divine,
Par un pouvoir fatal il se dira frappé.
Il tombera sans peur, sans plainte, sans prière ;
Et quand tu donnerais ton aigle et ton tonnerre
Pour l’entendre pousser, au fort de son tourment,
Un seul cri qui t’atteste, une injure, un blasphème,
Il restera muet : ce silence suprême
Sera ton châtiment.

Tu n’auras plus que moi dans ton immense empire
Pour croire encore en toi, funeste Déité.
Plutôt nier le jour ou l’air que je respire
Que ta puissance inique et que ta cruauté.
Perdu dans cet azur, sur ces hauteurs sublimes,
Ah ! j’ai vu de trop près tes fureurs et tes crimes ;
J’ai sous tes coups déjà trop souffert, trop saigné ;
Le doute est impossible à mon coeur indigné.
Oui ! tandis que du Mal, oeuvre de ta colère,
Renonçant désormais à sonder le mystère,
L’esprit humain ailleurs portera son flambeau,
Seul je saurai le mot de cette énigme obscure,
Et j’aurai reconnu, pour comble de torture,
Un Dieu dans mon bourreau.

Il avait dit : — Tel jour cet astre reviendra. — Quelle huée ! Ayez pour Vishnou, pour Indra, Pour Brahma, pour Odin ou pour Baal un culte ; Affirmez par le fer, par le feu, par l'insulte, L'idole informe et vague au fond des bleus éthers, Et tous les Jéhovahs et tous les Jupiters Échoués dans notre âme obscure sur la grève De Dieu, gouffre où le vrai flotte et devient le rêve ; Sur les Saint-Baboleyns et sur les Saint-Andrés Soyez absurde et sombre autant que vous voudrez ; Dites que vous avez vu, parmi les mouettes Et les aigles, passer dans l'air des silhouettes De maisons qu'en leurs bras tenaient des chérubins ; Dites que pour avoir aperçu dans leurs bains Des déesses, rondeurs célestes, gorges blanches, On est cerf à jamais errant parmi les branches ; Croyez à tout, aux djinns, aux faunes, aux démons Apportant Dieu tremblant et pâle sur les monts ; Soyez bonze au Tonquin, mage dans les Chaldées ; Croyez que les Lédas sont d'en haut fécondées Et que les cygnes font aux vierges des enfants ; Donnez l'Égypte aux bœufs et l'Inde aux éléphants ; Affirmez l'oignon dieu, Vénus, Ève, et leur pomme ; Et le soleil cloué sur place par un homme Pour offrir un plus long carnage à des soldats ; Inventez des Korans, des Talmuds, des Védas, Soyez un imposteur, un charlatan, un fourbe, C'est bien. Mais n'allez pas calculer une courbe, Compléter le savoir par l'intuition, Et, quand on ne sait quel flamboyant alcyon Passe, astre formidable, à travers les étoiles, N'allez pas mesurer le trou qu'il fait aux toiles Du grand plafond céleste, et rechercher l'emploi Qu'il a dans ce chaos d'où sort la vaste loi ; Laissez errer là-haut la torche funéraire ; Ne questionnez point sur son itinéraire Ce fantôme, de nuit et de clarté vêtu ; Ne lui demandez pas : Où vas-tu ? D'où viens-tu ? Ne faites pas, ainsi que l'essaim sur l'Hymète, Rôder le chiffre en foule autour de la comète ; Ne soyez pas penseur, ne soyez pas savant, Car vous seriez un fou. Docte, obstiné, rêvant, Ne faites pas lutter l'espace avec le nombre ; Laissez ses yeux de flamme à ce masque de l'ombre ; Ne fixez pas sur eux vos yeux ; et ce manteau De lueur où s'abrite un sombre incognito, Ne le soulevez pas, car votre main savante Y trouverait la vie et non pas l'épouvante, Et l'homme ne veut point qu'on touche à sa terreur ; Il y tient ; le calcul l'irrite ; sa fureur Contre quiconque chercher à l'éclairer, commence Au point où la raison ressemble à la démence ; Alors il a beau jeu. Car imagine-t-on Rien qui semble ici-bas mieux fait pour Charenton Qu'un ascète perdu dans des recherches sombres Après le chiffre, après le rêve, après des ombres, Guetteur pâle, appliquant des verres grossissants Aux faits connus, aux faits possibles, au bon sens, Regardant le ciel spectre au fond du télescope, Chez les astres voyant, chez les hommes myope ! Quoi de plus ressemblant aux insensés que ceux Qui, voyant les secrets d'en haut venir vers eux, Marchent à leur rencontre et donnent aux algèbres L'ordre de prendre un peu de lumière aux ténèbres, Et, sondant l'infini, mer qui veut se voiler, Disent à la science impassible d'aller Voir de près telle ou telle étoile voyageuse, Et de ne revenir, ruisselante plongeuse, De l'abîme qu'avec cette perle, le vrai ! D'ailleurs ce diamant, cet or, ce minerai, Le réel, quel mineur le trouve ? Qui donc creuse Et fouille assez avant dans la nature affreuse Pour pouvoir affirmer quoi que que ce soit ? Hormis L'autel connu, les jougs sacrés, les dieux permis, Et le temple doré que la foule contemple, Et l'espèce de ciel qui s'adapte à ce temple, Rien n'est certain. Est-il rien de plus surprenant Qu'un rêveur qui demande au mystère tonnant, À ces bleus firmaments où se croisent les sphères, De lui conter à lui curieux leurs affaires, Et qui veut avec l'ombre et le gouffre profond Entrer en pourparlers pour savoir ce qu'ils font, Quel jour un astre sort, quel jour un soleil rentre, Et qui, pour éclairer l'immensité de l'antre Où la Pléïade avec Sirius se confond, Allume sa chandelle et dit : J'ai vu le fond ! Un pygmée à ce point peut-il être imbécile ? Oui, Cardan de Pavie, Hicétas de Sicile Furent extravagants, mais parmi les songeurs Qui veillent, épiant les nocturnes rougeurs, En est-il un, parmi les pires, qui promette Le retour de ce monstre éperdu, la comète ? La comète est un monde incendié qui court, Furieux, au delà du firmament trop court ; Elle a la ressemblance affreuse de l'épée ; Est-ce qu'on ne voit pas que c'est une échappée ? Peut-être est-ce un enfer dans le ciel envolé. Ah ! vous ouvrez sa porte ! Ah ! vous avez sa clé ! Comme du haut d'un pont on voit l'eau fuir sous l'arche, Vous voyez son voyage et vous suivez sa marche ; Vous distinguez de loin sa sinistre maison ; Ah ! vous savez au juste et de quelle façon Elle s'évade et prend la fuite dans l'abîme ! Ce qu'ignorait Jésus, ce que le Kéroubime Ne sait pas, ce que Dieu connaît, vous le voyez ! Les yeux d'une lumière invisible noyés, Pensif, vous souhaitez déjà la bienvenue Dans notre gouffre d'ombre à l'immense inconnue ! Vous savez le total quand Dieu jette les dés ! Quoi ! cet astre est votre astre, et vous lui défendez De s'attarder, d'errer dans quelque route ancienne, Et de perdre son temps, et votre heure est la sienne ! Ah ! vous savez le rhythme énorme de la nuit ! Il faut que ce volcan échevelé qui fuit, Que cette hydre, terreur du Cancer et de l'Ourse, Se souvienne de vous au milieu de sa course Et tel jour soit exacte à votre rendez-vous ! Quoi ! pour avoir, ainsi qu'à l'épouse l'époux, Donné vos nuits à l'âpre algèbre, quoi ! pour être Attentif au zénith comme au dogme le prêtre, Quoi ! pour avoir pâli sur les nombres hagards Qui d'Hermès et d'Euclide ont troublé les regards, Vous voilà le seigneur des profondes contrées ! Vous avez dans la cage horrible vos entrées ! Vous pouvez, grâce au chiffre escorté de zéros, Prendre aux cheveux l'étoile à travers les barreaux ! Vous connaissez les mœurs des fauves météores, Vous datez les déclins, vous réglez les aurores, Vous montez l'escalier des firmaments vermeils, Vous allez et venez dans la fosse aux soleils ! Quoi ! vous tenez le ciel comme Orphée une lyre ! En vertu des bouquins qu'on peut sur les quais lire Qui sur les parapets s'étalent tout l'été Feuilletés par le vent sans curiosité, Vous atome, âme aveugle à tâtons élargie, De par Bezout, de par l'X et l'Y grec, magie Dont l'informe grimoire emplit votre grenier, Vous nain, vous avez fait l'Infini prisonnier ! Votre altière hypothèse à vos calculs l'attelle ! Vous savez tout ! Le temps que met l'aube immortelle À traverser l'azur d'un bout à l'autre bout, Ce qui, dans les chaos, couve, fermente et bout, Le bouvier, le lion, le chien, les dioscures, La possibilité des rencontres obscures, L'empyrée en tous sens par mille feux rayé, Les cercles que peut faire un satan ennuyé En crachant dans le puits de l'abîme, les ondes Du divin tourbillon qui tourmente les mondes Et les secoue ainsi que le vent le sapin, Vous avez tout noté sur votre calepin ! Vous êtes le devin d'en haut, le cicerone Du pâle Aldebaran inquiet sur son trône ! Vous êtes le montreur d'Allioth, d'Arcturus, D'Orion, des lointains univers apparus, Et de tous les passants de la forêt des astres ! Vous en savez plus long que les grands Zoroastres Et qu'Esdras qui hantait les chênes de Membré ; Vous êtes le cornac du prodige effaré ; La comète est à vous ; vous êtes son pontife ; Et vous avez lié votre fil à la griffe De cet épouvantable oiseau mystérieux, Et vous l'allez tirer à vous du fond des cieux ! Londre, offre ton Bedlam ! Paris, ouvre Bicêtre ! Tout cela s'écroula sur Halley. Votre ancêtre, Ô rêveurs ! c'est le noir Prométhée, et vos cœurs, Mordus comme le sien par les vautours moqueurs, Saignent, et vous avez au pied la même chaîne V.Hugo
Ganaz Il y a 6 ans

Il avait dit : — Tel jour cet astre reviendra. —

Quelle huée ! Ayez pour Vishnou, pour Indra,
Pour Brahma, pour Odin ou pour Baal un culte ;
Affirmez par le fer, par le feu, par l'insulte,
L'idole informe et vague au fond des bleus éthers,
Et tous les Jéhovahs et tous les Jupiters
Échoués dans notre âme obscure sur la grève
De Dieu, gouffre où le vrai flotte et devient le rêve ;
Sur les Saint-Baboleyns et sur les Saint-Andrés
Soyez absurde et sombre autant que vous voudrez ;
Dites que vous avez vu, parmi les mouettes
Et les aigles, passer dans l'air des silhouettes
De maisons qu'en leurs bras tenaient des chérubins ;
Dites que pour avoir aperçu dans leurs bains
Des déesses, rondeurs célestes, gorges blanches,
On est cerf à jamais errant parmi les branches ;
Croyez à tout, aux djinns, aux faunes, aux démons
Apportant Dieu tremblant et pâle sur les monts ;
Soyez bonze au Tonquin, mage dans les Chaldées ;
Croyez que les Lédas sont d'en haut fécondées
Et que les cygnes font aux vierges des enfants ;
Donnez l'Égypte aux bœufs et l'Inde aux éléphants ;
Affirmez l'oignon dieu, Vénus, Ève, et leur pomme ;
Et le soleil cloué sur place par un homme
Pour offrir un plus long carnage à des soldats ;
Inventez des Korans, des Talmuds, des Védas,
Soyez un imposteur, un charlatan, un fourbe,
C'est bien. Mais n'allez pas calculer une courbe,
Compléter le savoir par l'intuition,
Et, quand on ne sait quel flamboyant alcyon
Passe, astre formidable, à travers les étoiles,
N'allez pas mesurer le trou qu'il fait aux toiles
Du grand plafond céleste, et rechercher l'emploi
Qu'il a dans ce chaos d'où sort la vaste loi ;
Laissez errer là-haut la torche funéraire ;
Ne questionnez point sur son itinéraire
Ce fantôme, de nuit et de clarté vêtu ;
Ne lui demandez pas : Où vas-tu ? D'où viens-tu ?
Ne faites pas, ainsi que l'essaim sur l'Hymète,
Rôder le chiffre en foule autour de la comète ;
Ne soyez pas penseur, ne soyez pas savant,
Car vous seriez un fou. Docte, obstiné, rêvant,
Ne faites pas lutter l'espace avec le nombre ;
Laissez ses yeux de flamme à ce masque de l'ombre ;
Ne fixez pas sur eux vos yeux ; et ce manteau
De lueur où s'abrite un sombre incognito,
Ne le soulevez pas, car votre main savante
Y trouverait la vie et non pas l'épouvante,
Et l'homme ne veut point qu'on touche à sa terreur ;
Il y tient ; le calcul l'irrite ; sa fureur
Contre quiconque chercher à l'éclairer, commence
Au point où la raison ressemble à la démence ;
Alors il a beau jeu. Car imagine-t-on
Rien qui semble ici-bas mieux fait pour Charenton
Qu'un ascète perdu dans des recherches sombres
Après le chiffre, après le rêve, après des ombres,
Guetteur pâle, appliquant des verres grossissants
Aux faits connus, aux faits possibles, au bon sens,
Regardant le ciel spectre au fond du télescope,
Chez les astres voyant, chez les hommes myope !
Quoi de plus ressemblant aux insensés que ceux
Qui, voyant les secrets d'en haut venir vers eux,
Marchent à leur rencontre et donnent aux algèbres
L'ordre de prendre un peu de lumière aux ténèbres,
Et, sondant l'infini, mer qui veut se voiler,
Disent à la science impassible d'aller
Voir de près telle ou telle étoile voyageuse,
Et de ne revenir, ruisselante plongeuse,
De l'abîme qu'avec cette perle, le vrai !
D'ailleurs ce diamant, cet or, ce minerai,
Le réel, quel mineur le trouve ? Qui donc creuse
Et fouille assez avant dans la nature affreuse
Pour pouvoir affirmer quoi que que ce soit ? Hormis
L'autel connu, les jougs sacrés, les dieux permis,
Et le temple doré que la foule contemple,
Et l'espèce de ciel qui s'adapte à ce temple,
Rien n'est certain. Est-il rien de plus surprenant
Qu'un rêveur qui demande au mystère tonnant,
À ces bleus firmaments où se croisent les sphères,
De lui conter à lui curieux leurs affaires,
Et qui veut avec l'ombre et le gouffre profond
Entrer en pourparlers pour savoir ce qu'ils font,
Quel jour un astre sort, quel jour un soleil rentre,
Et qui, pour éclairer l'immensité de l'antre
Où la Pléïade avec Sirius se confond,
Allume sa chandelle et dit : J'ai vu le fond !
Un pygmée à ce point peut-il être imbécile ?
Oui, Cardan de Pavie, Hicétas de Sicile
Furent extravagants, mais parmi les songeurs
Qui veillent, épiant les nocturnes rougeurs,
En est-il un, parmi les pires, qui promette
Le retour de ce monstre éperdu, la comète ?
La comète est un monde incendié qui court,
Furieux, au delà du firmament trop court ;
Elle a la ressemblance affreuse de l'épée ;
Est-ce qu'on ne voit pas que c'est une échappée ?
Peut-être est-ce un enfer dans le ciel envolé.
Ah ! vous ouvrez sa porte ! Ah ! vous avez sa clé !
Comme du haut d'un pont on voit l'eau fuir sous l'arche,
Vous voyez son voyage et vous suivez sa marche ;
Vous distinguez de loin sa sinistre maison ;
Ah ! vous savez au juste et de quelle façon
Elle s'évade et prend la fuite dans l'abîme !
Ce qu'ignorait Jésus, ce que le Kéroubime
Ne sait pas, ce que Dieu connaît, vous le voyez !
Les yeux d'une lumière invisible noyés,
Pensif, vous souhaitez déjà la bienvenue
Dans notre gouffre d'ombre à l'immense inconnue !
Vous savez le total quand Dieu jette les dés !
Quoi ! cet astre est votre astre, et vous lui défendez
De s'attarder, d'errer dans quelque route ancienne,
Et de perdre son temps, et votre heure est la sienne !
Ah ! vous savez le rhythme énorme de la nuit !
Il faut que ce volcan échevelé qui fuit,
Que cette hydre, terreur du Cancer et de l'Ourse,
Se souvienne de vous au milieu de sa course
Et tel jour soit exacte à votre rendez-vous !
Quoi ! pour avoir, ainsi qu'à l'épouse l'époux,
Donné vos nuits à l'âpre algèbre, quoi ! pour être
Attentif au zénith comme au dogme le prêtre,
Quoi ! pour avoir pâli sur les nombres hagards
Qui d'Hermès et d'Euclide ont troublé les regards,
Vous voilà le seigneur des profondes contrées !
Vous avez dans la cage horrible vos entrées !
Vous pouvez, grâce au chiffre escorté de zéros,
Prendre aux cheveux l'étoile à travers les barreaux !
Vous connaissez les mœurs des fauves météores,
Vous datez les déclins, vous réglez les aurores,
Vous montez l'escalier des firmaments vermeils,
Vous allez et venez dans la fosse aux soleils !
Quoi ! vous tenez le ciel comme Orphée une lyre !
En vertu des bouquins qu'on peut sur les quais lire
Qui sur les parapets s'étalent tout l'été
Feuilletés par le vent sans curiosité,
Vous atome, âme aveugle à tâtons élargie,
De par Bezout, de par l'X et l'Y grec, magie
Dont l'informe grimoire emplit votre grenier,
Vous nain, vous avez fait l'Infini prisonnier !
Votre altière hypothèse à vos calculs l'attelle !
Vous savez tout ! Le temps que met l'aube immortelle
À traverser l'azur d'un bout à l'autre bout,
Ce qui, dans les chaos, couve, fermente et bout,
Le bouvier, le lion, le chien, les dioscures,
La possibilité des rencontres obscures,
L'empyrée en tous sens par mille feux rayé,
Les cercles que peut faire un satan ennuyé
En crachant dans le puits de l'abîme, les ondes
Du divin tourbillon qui tourmente les mondes
Et les secoue ainsi que le vent le sapin,
Vous avez tout noté sur votre calepin !
Vous êtes le devin d'en haut, le cicerone
Du pâle Aldebaran inquiet sur son trône !
Vous êtes le montreur d'Allioth, d'Arcturus,
D'Orion, des lointains univers apparus,
Et de tous les passants de la forêt des astres !
Vous en savez plus long que les grands Zoroastres
Et qu'Esdras qui hantait les chênes de Membré ;
Vous êtes le cornac du prodige effaré ;
La comète est à vous ; vous êtes son pontife ;
Et vous avez lié votre fil à la griffe
De cet épouvantable oiseau mystérieux,
Et vous l'allez tirer à vous du fond des cieux !
Londre, offre ton Bedlam ! Paris, ouvre Bicêtre !

Tout cela s'écroula sur Halley.

Votre ancêtre,
Ô rêveurs ! c'est le noir Prométhée, et vos cœurs,
Mordus comme le sien par les vautours moqueurs,
Saignent, et vous avez au pied la même chaîne

V.Hugo

je le trouve magnifique ce poème, il exprime le temps qui passe les états d'ames sur la mort et la mélancolie, je l'ai découvert à travers Mylène Farmer qui l'avait interprétée musicalement, du coup je me suis intéressé au grand poète qu'était Charles Baudelaire je vous mets le poème en entier, ainsi que la vidéo ou Mylène Farmer le chante en musique^^ Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible, Dont le doigt nous menace et nous dit : » Souviens-toi ! Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d’effroi Se planteront bientôt comme dans une cible, Le plaisir vaporeux fuira vers l’horizon Ainsi qu’une sylphide au fond de la coulisse ; Chaque instant te dévore un morceau du délice A chaque homme accordé pour toute sa saison. Trois mille six cents fois par heure, la Seconde Chuchote : Souviens-toi ! – Rapide, avec sa voix D’insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois, Et j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde ! Remember ! Souviens-toi, prodigue ! Esto memor ! (Mon gosier de métal parle toutes les langues.) Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues Qu’il ne faut pas lâcher sans en extraire l’or ! Souviens-toi que le Temps est un joueur avide Qui gagne sans tricher, à tout coup ! c’est la loi. Le jour décroît ; la nuit augmente, souviens-toi ! Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide. Tantôt sonnera l’heure où le divin Hasard, Où l’auguste Vertu, ton épouse encor vierge, Où le repentir même (oh ! la dernière auberge !), Où tout te dira : Meurs, vieux lâche ! il est trop tard ! » https://www.youtube.com/watch?v=w1vnTFR2JrQ
Solstice Il y a 6 ans

je le trouve magnifique ce poème, il exprime le temps qui passe les états d'ames sur la mort et la mélancolie, je l'ai découvert à travers Mylène Farmer qui l'avait interprétée musicalement, du coup je me suis intéressé au grand poète qu'était Charles Baudelaire je vous mets le poème en entier, ainsi que la vidéo ou Mylène Farmer le chante en musique^^

Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit : » Souviens-toi !
Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d’effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible,

Le plaisir vaporeux fuira vers l’horizon
Ainsi qu’une sylphide au fond de la coulisse ;
Chaque instant te dévore un morceau du délice
A chaque homme accordé pour toute sa saison.

Trois mille six cents fois par heure, la Seconde
Chuchote : Souviens-toi ! – Rapide, avec sa voix
D’insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois,
Et j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde !

Remember ! Souviens-toi, prodigue ! Esto memor !
(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)
Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues
Qu’il ne faut pas lâcher sans en extraire l’or !

Souviens-toi que le Temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup ! c’est la loi.
Le jour décroît ; la nuit augmente, souviens-toi !
Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide.

Tantôt sonnera l’heure où le divin Hasard,
Où l’auguste Vertu, ton épouse encor vierge,
Où le repentir même (oh ! la dernière auberge !),
Où tout te dira : Meurs, vieux lâche ! il est trop tard ! »


https://www.youtube.com/watch?v=w1vnTFR2JrQ

[...] [i]L'étranger s'assied dans la splendeur insolente des pierres[/i] Ha ha ha mes bras mes pauvres bras mes chevilles Vous avez brisé mes os étreint ma gorge et percé mes joues Ma tête est exposée aux oiseaux sur les murs déshonorés L'orgueil des jets d'eau s'est tu le jour s'est fait de plâtre Il ne bat plus jamais une seule porte dans les nuits Mon peuple est dispersé le saule pleure pleure [...] A.
Sémiramis Il y a 6 ans

[...]

L'étranger s'assied dans la splendeur insolente des pierres
Ha ha ha mes bras mes pauvres bras mes chevilles
Vous avez brisé mes os étreint ma gorge et percé mes joues
Ma tête est exposée aux oiseaux sur les murs déshonorés
L'orgueil des jets d'eau s'est tu le jour s'est fait de plâtre
Il ne bat plus jamais une seule porte dans les nuits
Mon peuple est dispersé le saule pleure pleure

[...]

A.