Je vous prête là un poème de Pierre Reverdy, mes amis! BONNE CHANCE Avec du sang dans les rigoles Et tant de soleil sous la peau Tant de promesse au creux des ombres Et le ciel entre les barreaux Avec du plomb dans les prunelles Et des rires dans les ruisseaux Dans l’éther où grouillent les nombres Le vent rageur dans les roseaux La lumière sur les décombres Et la nuit aux cils des rideaux Un malheur que rien ne console La douleur et ses oripeaux Dans la poitrine nue d’un homme Le splendide décor Où le cœur joue son rôle faux Quand la peur décharge ses ondes Jusqu’à l’écume des naseaux Cratères de l’oubli Sève des étincelles Tous ces volcans furieux Qui se sont assoupis La mémoire a perdu son pas de manivelle Un nom qui n’a plus de chair qu’un numéro Une voix sans timbre qui chante Dans le vide où fondent les mots La neige ne peut plus ni monter ni descendre Parce qu’il n’y a plus ni de bas ni de haut Et dans cet avenir lourd comme un soir sans lampe Aucun signe de la main Pas un froissement d’aile Rien Pas même un écho
musashi Il y a 7 ans

Je vous prête là un poème de Pierre Reverdy, mes amis!

BONNE CHANCE

Avec du sang dans les rigoles
Et tant de soleil sous la peau
Tant de promesse au creux des ombres
Et le ciel entre les barreaux
Avec du plomb dans les prunelles
Et des rires dans les ruisseaux
Dans l’éther où grouillent les nombres
Le vent rageur dans les roseaux
La lumière sur les décombres
Et la nuit aux cils des rideaux
Un malheur que rien ne console
La douleur et ses oripeaux
Dans la poitrine nue d’un homme
Le splendide décor
Où le cœur joue son rôle faux
Quand la peur décharge ses ondes
Jusqu’à l’écume des naseaux

Cratères de l’oubli
Sève des étincelles
Tous ces volcans furieux
Qui se sont assoupis
La mémoire a perdu son pas de manivelle
Un nom qui n’a plus de chair qu’un numéro

Une voix sans timbre qui chante
Dans le vide où fondent les mots
La neige ne peut plus ni monter ni descendre
Parce qu’il n’y a plus ni de bas ni de haut

Et dans cet avenir lourd comme un soir sans lampe
Aucun signe de la main
Pas un froissement d’aile
Rien
Pas même un écho

"Ce que l'étreinte ressuscite, c'est la virginité des amants. (...) J'ai beau porter la main sur cette personne, rassasier mon avidité, elle reste hors de ma prise, rejaillissant toujours neuve de nos enlacements. Je suis resté au bord de l'autre, éternel étranger, comme Moïse au seuil de la Terre promise" p. 87 le paradoxe amoureux Pascal Bruckner
suffragettes AB Il y a 7 ans

"Ce que l'étreinte ressuscite, c'est la virginité des amants. (...) J'ai beau porter la main sur cette personne, rassasier mon avidité, elle reste hors de ma prise, rejaillissant toujours neuve de nos enlacements. Je suis resté au bord de l'autre, éternel étranger, comme Moïse au seuil de la Terre promise" p. 87 le paradoxe amoureux Pascal Bruckner

https://www.youtube.com/watch?v=cUGBvOgwWT0 Les espaces du sommeil de Robert Desnos "Dans la nuit il y a naturellement les sept merveilles du monde et la grandeur et le tragique et le charme. Les forêts s’y heurtent confusément avec des créatures de légende cachées dans les fourrés. Il y a toi. Dans la nuit il y a le pas du promeneur et celui de l’assassin et celui du sergent de ville et la lumière du réverbère et celle de la lanterne du chiffonnier. Il y a toi. Dans la nuit passent les trains et les bateaux et le mirage des pays où il fait jour. Les derniers souffles du crépuscule et les premiers frissons de l’aube. Il y a toi. Un air de piano, un éclat de voix. Une porte claque. Une horloge. Et pas seulement les êtres et les choses et les bruits matériels. Mais encore moi qui me poursuis ou sans cesse me dépasse. Il y a toi l’immolée, toi que j’attends. Parfois d’étranges figures naissent à l’instant du sommeil et disparaissent. Quand je ferme les yeux, des floraisons phosphorescentes apparaissent et se fanent et renaissent comme des feux d’artifice charnus. Des pays inconnus que je parcours en compagnie de créatures. Il y a toi sans doute, ô belle et discrète espionne. Et l’âme palpable de l’étendue. Et les parfums du ciel et des étoiles et le chant du coq d’il y a 2 000 ans et le cri du paon dans des parcs en flamme et des baisers. Des mains qui se serrent sinistrement dans une lumière blafarde et des essieux qui grincent sur des routes médusantes. Il y a toi sans doute que je ne connais pas, que je connais au contraire. Mais qui, présente dans mes rêves, t’obstines à s’y laisser deviner sans y paraître. Toi qui restes insaisissable dans la réalité et dans le rêve. Toi qui m’appartiens de par ma volonté de te posséder en illusion mais qui n’approches ton visage du mien que mes yeux clos aussi bien au rêve qu’à la réalité. Toi qu’en dépit d’une rhétorique facile où le flot meurt sur les plages, où la corneille vole dans des usines en ruines, où le bois pourrit en craquant sous un soleil de plomb, Toi qui es à la base de mes rêves et qui secoues mon esprit plein de métamorphoses et qui me laisses ton gant quand je baise ta main. Dans la nuit, il y a les étoiles et le mouvement ténébreux de la mer, des fleuves, des forêts, des villes, des herbes, des poumons de millions et millions d’êtres. Dans la nuit il y a les merveilles du mondes. Dans la nuit il n’y a pas d’anges gardiens mais il y a le sommeil. Dans la nuit il y a toi. Dans le jour aussi."
suffragettes AB Il y a 7 ans


https://www.youtube.com/watch?v=cUGBvOgwWT0

Les espaces du sommeil de Robert Desnos

"Dans la nuit il y a naturellement les sept merveilles
du monde et la grandeur et le tragique et le charme.
Les forêts s’y heurtent confusément avec des créatures de légende
cachées dans les fourrés.
Il y a toi.
Dans la nuit il y a le pas du promeneur et celui de l’assassin
et celui du sergent de ville et la lumière du réverbère
et celle de la lanterne du chiffonnier.
Il y a toi.
Dans la nuit passent les trains et les bateaux et le mirage des pays
où il fait jour. Les derniers souffles du crépuscule
et les premiers frissons de l’aube.
Il y a toi.
Un air de piano, un éclat de voix.
Une porte claque. Une horloge.
Et pas seulement les êtres et les choses et les bruits matériels.
Mais encore moi qui me poursuis ou sans cesse me dépasse.
Il y a toi l’immolée, toi que j’attends.
Parfois d’étranges figures naissent à l’instant du sommeil et disparaissent.
Quand je ferme les yeux, des floraisons phosphorescentes apparaissent
et se fanent et renaissent comme des feux d’artifice charnus.
Des pays inconnus que je parcours en compagnie de créatures.
Il y a toi sans doute, ô belle et discrète espionne.
Et l’âme palpable de l’étendue.
Et les parfums du ciel et des étoiles et le chant du coq d’il y a 2 000 ans
et le cri du paon dans des parcs en flamme et des baisers.
Des mains qui se serrent sinistrement dans une lumière blafarde
et des essieux qui grincent sur des routes médusantes.
Il y a toi sans doute que je ne connais pas, que je connais au contraire.
Mais qui, présente dans mes rêves, t’obstines à s’y laisser deviner sans y paraître.
Toi qui restes insaisissable dans la réalité et dans le rêve.
Toi qui m’appartiens de par ma volonté de te posséder en illusion
mais qui n’approches ton visage du mien que mes yeux clos
aussi bien au rêve qu’à la réalité.
Toi qu’en dépit d’une rhétorique facile où le flot meurt sur les plages,
où la corneille vole dans des usines en ruines,
où le bois pourrit en craquant sous un soleil de plomb,
Toi qui es à la base de mes rêves et qui secoues mon esprit plein de métamorphoses
et qui me laisses ton gant quand je baise ta main.
Dans la nuit, il y a les étoiles et le mouvement ténébreux de la mer,
des fleuves, des forêts, des villes, des herbes,
des poumons de millions et millions d’êtres.
Dans la nuit il y a les merveilles du mondes.
Dans la nuit il n’y a pas d’anges gardiens mais il y a le sommeil.
Dans la nuit il y a toi.
Dans le jour aussi."

merci du partage. Pas sûr d'aimer le dernier vers (ouais je me permets, comme ça, plus de respect.) Mais j'aime bien. Un préféré de Desnos? Celui-là?
musashi Il y a 7 ans

merci du partage. Pas sûr d'aimer le dernier vers (ouais je me permets, comme ça, plus de respect.)
Mais j'aime bien. Un préféré de Desnos? Celui-là?

je découvre tout juste, bien aimé la diction de georgio, et puis mon sommeil manquant d'espace cette semaine, le titre m'a accroché. Eh oui ce satané jour n'est souvent qu'un gros rabat-joie après "les profondeurs de la nuit", forcément :)! Au diable le jour et son réveil tonitruant qui écourte les songes nocturnes et symphoniques.
suffragettes AB Il y a 7 ans

je découvre tout juste, bien aimé la diction de georgio, et puis mon sommeil manquant d'espace cette semaine, le titre m'a accroché. Eh oui ce satané jour n'est souvent qu'un gros rabat-joie après "les profondeurs de la nuit", forcément ! Au diable le jour et son réveil tonitruant qui écourte les songes nocturnes et symphoniques.

"prendre corps" de ghérasim luca chanté par arthur H https://www.youtube.com/watch?v=qclTGuX31eY
suffragettes AB Il y a 6 ans

"prendre corps" de ghérasim luca chanté par arthur H


https://www.youtube.com/watch?v=qclTGuX31eY

j'habite une idée touffue émanée d'une forêt qui brûle dans le noir une odeur de feuilles liquide mon sang parfum d'été dedans dehors pour la nouvelle saison je ne suis ni homme ni femme me voici tout feu tout flamme Démesure - James Noël
AnonymeIl y a 6 ans

j'habite une idée touffue
émanée
d'une forêt qui brûle dans le noir

une odeur de feuilles
liquide mon sang
parfum d'été
dedans dehors

pour la nouvelle saison
je ne suis ni homme
ni femme
me voici
tout feu tout flamme

Démesure - James Noël

Bizarre déité, brune comme les nuits, Au parfum mélangé de musc et de havane, œuvre de quelque obi, le Faust de la savane, Sorcière au flanc d’ébène, enfant des noirs minuits, Je préfère au constance, à l’opium, aux nuits, L’élixir de ta bouche où l’amour se pavane ; Quand vers toi mes désirs partent en caravane, Tes yeux sont la citerne où boivent mes ennuis. Par ces deux grands yeux noirs, soupiraux de ton âme, Ô démon sans pitié ! verse-moi moins de flamme ; Je ne suis pas le Styx pour t’embrasser neuf fois, Hélas ! et je ne puis, Mégère libertine, Pour briser ton corsage et te mettre aux abois, Dans l’enfer de ton lit devenir Proserpine ! Charles Baudelaire - [i]Sed non satiata[/i] ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Le lit constellé vogue par à-coups Partant du nombril la Grande Ourse et juste au-dessus de la hanche l’étoile du berger * Par vagues insensées tu te découvres Je sens mes cheveux pousser L’île est en vue J’écarte les touffes de ta toison et m’accorde du miel le subtil rayon * Je n’imagine rien Je n’invente rien Je crois sur-le-champ Je vois et touche l’objet de ma croyance ce divin pubis * Comme un lierre fou je m’enroule autour de tes branches Ton écorce s’attendrit et s’ouvre Goutte à goutte je reçois ta sève Un moment et je commence à bourgeonner * Au fond des iris lestes et radieux on dirait la vulve réjouie de sa soif * Arbre de chair savant de volupté Il s’étire vers la cime et l’abîme Coupe k’infini en deux * Celui qui n’a jamais goûté à l’interdit qu’il me jette la première pomme * Misérables hypocrites qui montez au lit du pied droit et invoquez le nom de Dieu avant de copuler De la porte donnant sur le plaisir vous ne connaîtrez que le trou aveugle de la serrure * Que restera-t-il de la collision Après l’embrasement que lira-t-on dans les cendres ? La chair s’est détachée de la chair Arbre déraciné l’homme gît auprès de la femme Abdellatif Laâbi - [i]Les fruits du corps (extraits)[/i] ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ [p align=right]prendre corps[/p] Je te flore tu me faune Je te peau je te porte et te fenêtre tu m’os tu m’océan tu m’audace tu me météorite Je te clef d’or je t’extraordinaire tu me paroxysme Tu me paroxysme et me paradoxe je te clavecin tu me silencieusement tu me miroir je te montre [p align=center]Tu me mirage tu m’oasis tu m’oiseau tu m’insecte tu me cataracte[/p] Je te lune tu me nuage tu me marée haute Je te transparente tu me pénombre tu me translucide tu me château vide et me labyrinthe Tu me paralaxe et me parabole tu me debout et couché tu m’oblique [p align=right]Je t’équinoxe je te poète tu me danse je te particulier tu me perpendiculaire et soupente Tu me visible tu me silhouette tu m’infiniment tu m’indivisible tu m’ironie Je te fragile je t’ardente je te phonétiquement tu me hiéroglyphe[/p] Tu m’espace tu me cascade je te cascade à mon tour mais toi tu me fluide tu m’étoile filante tu me volcanique nous nous pulvérisable [p align=right]Nous nous scandaleusement jour et nuit nous nous aujourd’hui même tu me tangente je te concentrique Tu me soluble tu m’insoluble tu m’asphyxiant et me libératrice tu me pulsatrice Tu me vertige tu m’extase tu me passionnément tu m’absolu je t’absente tu m’absurde prendre corps[/p] Je te narine je te hanche tu me hantes je te poitrine je buste ta poitrine puis te visage je te corsage tu m’odeur tu me vertige tu glisses je te cuisse je te caresse je te frissonne tu m’enjambes tu m’insupportable je t’amazone je te gorge je te ventre je te jupe je te jarretelle je te bas je te Bach oui je te Bach pour clavecin sein et flûte je te tremblante tu me séduis tu m’absorbes je te dispute je te risque je te grimpe tu me frôles je te nage mais toi tu me tourbillonnes tu m’effleures tu me cernes tu me chair cuir peau et morsure tu me slip noir tu me ballerines rouges et quand tu ne haut-talon pas mes sens tu les crocodiles tu les phoques tu les fascines tu me couvres je te découvre je t’invente parfois tu te livres tu me lèvres humides je te délivre je te délire tu me délires et passionnes je t’épaule je te vertèbre je te cheville je te cils et pupilles et si je ne m’omoplate pas avant mes poumons même à distance tu m’aisselles je te respire jour et nuit je te respire je te bouche je te palais je te dents je te griffe je te vulve je te paupières je te haleine je t’aine je te sang je te cou je te mollets je te certitude je te joues et te veines je te mains je te sueur je te langue je te nuque je te navigue je t’ombre je te corps et te fantôme je te rétine dans mon souffle tu m’iris je t’écris tu me penses Ghérasim Luca - [i]La fin du monde (extraits)[/i]
AnonymeIl y a 6 ans

Bizarre déité, brune comme les nuits,
Au parfum mélangé de musc et de havane,
œuvre de quelque obi, le Faust de la savane,
Sorcière au flanc d’ébène, enfant des noirs minuits,

Je préfère au constance, à l’opium, aux nuits,
L’élixir de ta bouche où l’amour se pavane ;
Quand vers toi mes désirs partent en caravane,
Tes yeux sont la citerne où boivent mes ennuis.

Par ces deux grands yeux noirs, soupiraux de ton âme,
Ô démon sans pitié ! verse-moi moins de flamme ;
Je ne suis pas le Styx pour t’embrasser neuf fois,

Hélas ! et je ne puis, Mégère libertine,
Pour briser ton corsage et te mettre aux abois,
Dans l’enfer de ton lit devenir Proserpine !

Charles Baudelaire - Sed non satiata


~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~


Le lit constellé
vogue par à-coups
Partant du nombril
la Grande Ourse
et juste au-dessus de la hanche
l’étoile du berger

*

Par vagues insensées
tu te découvres
Je sens mes cheveux pousser
L’île est en vue
J’écarte les touffes de ta toison
et m’accorde du miel
le subtil rayon

*

Je n’imagine rien
Je n’invente rien
Je crois sur-le-champ
Je vois et touche
l’objet de ma croyance
ce divin pubis

*

Comme un lierre fou
je m’enroule
autour de tes branches
Ton écorce s’attendrit
et s’ouvre
Goutte à goutte
je reçois ta sève
Un moment
et je commence à bourgeonner

*

Au fond des iris
lestes et radieux
on dirait la vulve
réjouie de sa soif

*

Arbre de chair
savant de volupté
Il s’étire
vers la cime
et l’abîme
Coupe k’infini
en deux

*

Celui qui n’a jamais
goûté à l’interdit
qu’il me jette
la première pomme

*

Misérables hypocrites
qui montez au lit
du pied droit
et invoquez le nom de Dieu
avant de copuler
De la porte
donnant sur le plaisir
vous ne connaîtrez
que le trou aveugle
de la serrure

*

Que restera-t-il de la collision
Après l’embrasement
que lira-t-on dans les cendres ?
La chair
s’est détachée de la chair
Arbre déraciné
l’homme gît
auprès de la femme

Abdellatif Laâbi - Les fruits du corps (extraits)


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[p align=right]prendre corps[/p]


Je te flore
tu me faune

Je te peau
je te porte
et te fenêtre
tu m’os
tu m’océan
tu m’audace
tu me météorite


Je te clef d’or
je t’extraordinaire
tu me paroxysme

Tu me paroxysme
et me paradoxe
je te clavecin
tu me silencieusement
tu me miroir
je te montre

[p align=center]Tu me mirage
tu m’oasis
tu m’oiseau
tu m’insecte
tu me cataracte[/p]



Je te lune
tu me nuage
tu me marée haute
Je te transparente
tu me pénombre
tu me translucide
tu me château vide
et me labyrinthe
Tu me paralaxe
et me parabole
tu me debout
et couché
tu m’oblique

[p align=right]Je t’équinoxe
je te poète
tu me danse
je te particulier
tu me perpendiculaire
et soupente


Tu me visible
tu me silhouette
tu m’infiniment
tu m’indivisible
tu m’ironie


Je te fragile
je t’ardente
je te phonétiquement
tu me hiéroglyphe[/p]

Tu m’espace
tu me cascade
je te cascade
à mon tour mais toi


tu me fluide




tu m’étoile filante

tu me volcanique

nous nous pulvérisable

[p align=right]Nous nous scandaleusement
jour et nuit
nous nous aujourd’hui même
tu me tangente
je te concentrique


Tu me soluble
tu m’insoluble
tu m’asphyxiant
et me libératrice
tu me pulsatrice


Tu me vertige
tu m’extase
tu me passionnément
tu m’absolu
je t’absente
tu m’absurde






prendre corps[/p]


Je te narine
je te hanche
tu me hantes
je te poitrine
je buste ta poitrine puis te visage
je te corsage

tu m’odeur tu me vertige
tu glisses
je te cuisse je te caresse
je te frissonne
tu m’enjambes
tu m’insupportable
je t’amazone
je te gorge je te ventre
je te jupe
je te jarretelle je te bas je te Bach
oui je te Bach pour clavecin sein et flûte

je te tremblante
tu me séduis tu m’absorbes
je te dispute
je te risque je te grimpe
tu me frôles
je te nage
mais toi tu me tourbillonnes
tu m’effleures tu me cernes
tu me chair cuir peau et morsure
tu me slip noir
tu me ballerines rouges
et quand tu ne haut-talon pas mes sens
tu les crocodiles
tu les phoques tu les fascines
tu me couvres
je te découvre je t’invente
parfois tu te livres


tu me lèvres humides
je te délivre je te délire
tu me délires et passionnes
je t’épaule je te vertèbre je te cheville
je te cils et pupilles
et si je ne m’omoplate pas avant mes poumons
même à distance tu m’aisselles
je te respire
jour et nuit je te respire
je te bouche
je te palais je te dents je te griffe
je te vulve je te paupières
je te haleine
je t’aine
je te sang je te cou
je te mollets je te certitude
je te joues et te veines
je te mains
je te sueur
je te langue
je te nuque
je te navigue
je t’ombre je te corps et te fantôme
je te rétine dans mon souffle
tu m’iris

je t’écris
tu me penses

Ghérasim Luca - La fin du monde (extraits)

"l'août soixante-trois" Aragon Sur des perches de bois haussant l'abri de chaume Comme les paysans à leurs foins entassés Foulant de mes pieds nus ce qui fut mon passé Je n'ai que cette paille à t'offrir pour royaume Je t'invente un pays qui ne soit que de nous A tes pas des oiseaux s'y lèvent dans un parc Où pareil au dieu Temps sans sa barbe et sa barque Entre mes bras épais j'enserre tes genoux Je te donne à courir mon âme et ma mémoire Mes champs de souvenirs mes songes mes forêts Mes bruyères d'effroi mes brouillards de regrets Les grandes fleurs d'oubli sur l'étang vert et noir Je te donne à dormir ce pays de traîneaux Ce pays de jardins et de peintes fenêtres Ses moulins que le vent semble ne point connaître Et ses berges glissant la torpeur des canaux Je t'en donne le ciel immense pour domaine Où l'homme passe un doigt frissonnant de nuée La terre du soleil d'août écobuée Où de petits chevaux lentement se promènent Orchestre de l'été nuageux et profond Alcôve d'un sommeil qui ressemble à l'enfance Quelle obscure lueur y garde souvenance De quelque Indonésie où règnent les typhons Accepte ô mon amour comme une orange amère De mes tremblantes mains ces vacances volées La vie est une chose étrangement ailée Asseyons-nous veux-tu Devine au loin la mer
suffragettes AB Il y a 6 ans

"l'août soixante-trois" Aragon

Sur des perches de bois haussant l'abri de chaume
Comme les paysans à leurs foins entassés
Foulant de mes pieds nus ce qui fut mon passé
Je n'ai que cette paille à t'offrir pour royaume

Je t'invente un pays qui ne soit que de nous
A tes pas des oiseaux s'y lèvent dans un parc
Où pareil au dieu Temps sans sa barbe et sa barque
Entre mes bras épais j'enserre tes genoux

Je te donne à courir mon âme et ma mémoire
Mes champs de souvenirs mes songes mes forêts
Mes bruyères d'effroi mes brouillards de regrets
Les grandes fleurs d'oubli sur l'étang vert et noir

Je te donne à dormir ce pays de traîneaux
Ce pays de jardins et de peintes fenêtres
Ses moulins que le vent semble ne point connaître
Et ses berges glissant la torpeur des canaux

Je t'en donne le ciel immense pour domaine
Où l'homme passe un doigt frissonnant de nuée
La terre du soleil d'août écobuée
Où de petits chevaux lentement se promènent

Orchestre de l'été nuageux et profond
Alcôve d'un sommeil qui ressemble à l'enfance
Quelle obscure lueur y garde souvenance
De quelque Indonésie où règnent les typhons

Accepte ô mon amour comme une orange amère
De mes tremblantes mains ces vacances volées
La vie est une chose étrangement ailée
Asseyons-nous veux-tu Devine au loin la mer

Tu ne traîneras plus, rêveur mélancolique, Deux talons paresseux sous un corps famélique : Viens ! je t'offre une plume et le coin d'un bureau, Rien ne te manquera ... - Qu'au front un numéro. Non ! je n'écris jamais que mon coeur ne s'en mêle ; J'honore dans la plume un souvenir de l'aile, Je ne la puis toucher sans un frémissement ; Elle me fait penser plus haut, plus librement. Contre la gloire en vain qu'un stoïque déclame, Je ne pourrai jamais terrasser dans mon âme, En lisant Marc-Aurèle, Épictète ou Zénon, Le rebelle désir d'éterniser mon nom. Ah ! je voudrais l'inscrire en sculpture profonde Sur la porte du Temps car où passe le monde, Où chaque illustre main gravant un souvenir Lègue au siècle nouveau celui qui va finir ! Je hais l'obscurité, je veux qu'on me renomme ; Quiconque a son pareil, celui-là n'est pas homme : Il porte encore au front la marque du troupeau. Je n'ai ni dieu prêché, ni maître, ni drapeau, Je n'ai point de patrie autre part qu'en mon rêve ; Vos moeurs sont un niveau que mon dédain soulève, Et, si je fais le bien, c'est une oeuvre de moi Que je dois à mon coeur et non pas à la loi. La médiocrité comme un affront me pèse : C'est un étroit pourpoint où je vis mal à l'aise ; Il me courbe les reins, je veux marcher debout, Ma respiration le fait craquer partout ! - La foule est bien nombreuse, et bien courte la vie ; La route que tu suis, bien d'autres l'ont suivie, Et bien peu sont debout ; mesure tes rivaux ! Estime à leur génie, enfant, ce que tu vaux. - Je les égalerai par l'âme ou par l'étude ; La génuflexion n'est pas mon attitude, Quand les regards sur moi ne tombent pas d'un dieu ! - L'avenir ait pitié de ton orgueil ! Adieu. [b]L'Ambition[/b] - Sully Prudhomme
Sémiramis Il y a 6 ans

Tu ne traîneras plus, rêveur mélancolique,
Deux talons paresseux sous un corps famélique :
Viens ! je t'offre une plume et le coin d'un bureau,
Rien ne te manquera ... - Qu'au front un numéro.

Non ! je n'écris jamais que mon coeur ne s'en mêle ;
J'honore dans la plume un souvenir de l'aile,
Je ne la puis toucher sans un frémissement ;
Elle me fait penser plus haut, plus librement.
Contre la gloire en vain qu'un stoïque déclame,
Je ne pourrai jamais terrasser dans mon âme,
En lisant Marc-Aurèle, Épictète ou Zénon,
Le rebelle désir d'éterniser mon nom.
Ah ! je voudrais l'inscrire en sculpture profonde
Sur la porte du Temps car où passe le monde,
Où chaque illustre main gravant un souvenir
Lègue au siècle nouveau celui qui va finir !
Je hais l'obscurité, je veux qu'on me renomme ;
Quiconque a son pareil, celui-là n'est pas homme :
Il porte encore au front la marque du troupeau.
Je n'ai ni dieu prêché, ni maître, ni drapeau,
Je n'ai point de patrie autre part qu'en mon rêve ;
Vos moeurs sont un niveau que mon dédain soulève,
Et, si je fais le bien, c'est une oeuvre de moi
Que je dois à mon coeur et non pas à la loi.
La médiocrité comme un affront me pèse :
C'est un étroit pourpoint où je vis mal à l'aise ;
Il me courbe les reins, je veux marcher debout,
Ma respiration le fait craquer partout !

- La foule est bien nombreuse, et bien courte la vie ;
La route que tu suis, bien d'autres l'ont suivie,
Et bien peu sont debout ; mesure tes rivaux !
Estime à leur génie, enfant, ce que tu vaux.
- Je les égalerai par l'âme ou par l'étude ;
La génuflexion n'est pas mon attitude,
Quand les regards sur moi ne tombent pas d'un dieu !

- L'avenir ait pitié de ton orgueil ! Adieu.

L'Ambition - Sully Prudhomme

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AnonymeIl y a 6 ans

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4 poèmes de Jean Richepin La flûte "Je n’étais qu’une plante inutile, un roseau. Aussi je végétais, si frêle, qu’un oiseau En se posant sur moi pouvait briser ma vie. Maintenant je suis flûte et l’on me porte envie. Car un vieux vagabond, voyant que je pleurais, Un matin en passant m’arracha du marais, De mon coeur, qu’il vida, fit un tuyau sonore, Le mit sécher un an, puis, le perçant encore, Il y fixa la gamme avec huit trous égaux ; Et depuis, quand sa lèvre aux souffles musicaux Éveille les chansons au creux de mon silence, Je tressaille, je vibre, et la note s’élance ; Le chapelet des sons va s’égrenant dans l’air ; On dirait le babil d’une source au flot clair ; Et dans ce flot chantant qu’un vague écho répète Je sais noyer le coeur de l’homme et de la bête." Désir d'infini "Tous, l’amant qui dans un baiser verse son âme, Le grand lis qui jaillit vers le soleil levant, L’oiseau de mer qui plane et se soûle de vent, Le martyr qui se jette en chantant dans la flamme, Le cerf qui, fou de rut, vers les étoiles brame, Le lion accroupi dans sa cage et rêvant, Le poète assoiffé de rythme, le savant Qui dans l’obscur coït d’un problème se pâme, Tous, un pareil désir, souvent à leur insu, Les travaille, et, toujours pareillement déçu, Il demeure quand même à jamais implacable. Ô désir d’infini, malgré tout persistant! Hélas ! il nous soutient autant qu’il nous accable. On en meurt, et la vie en est faite pourtant." Diagnostic "Le front est balafré de plis. Les yeux ardents Flambent de fièvre et sont noyés de pleurs. La bouche Fait un trou noir, béant, plein de bave et farouche Où la langue ballotte, où se collent les dents. Le ventre convulsé s’enfle, rentre en dedans, Puis ressort, bossué de nœuds, comme une souche, Et les poumons, crachant le spasme qui les bouche, S’essoufflent par la gorge en cris durs et stridents. Mais quel est donc ce mal, ce coup d’épilepsie, où l’on râle écumant, la cervelle épaissie, Les sens perdus, les nerfs détraqués, où la chair Semble un poisson vivant dans une poêle à frire? Hélas, ce mal, c’est notre ami, c’est le plus cher, C’est le consolateur des hommes, c’est le Rire." Déclaration "L’amour que je sens, l’amour qui me cuit, Ce n’est pas l’amour chaste et platonique, Sorbet à la neige avec un biscuit ; C’est l’amour de chair, c’est un plat tonique. Ce n’est pas l’amour des blondins pâlots Dont le rêve flotte au ciel des estampes. C’est l’amour qui rit parmi des sanglots Et frappe à coups drus l’enclume des tempes. C’est l’amour brûlant comme un feu grégeois. C’est l’amour féroce et l’amour solide. Surtout ce n’est pas l’amour des bourgeois. Amour de bourgeois, jardin d’invalide. Ce n’est pas non plus l’amour de roman, Faux, prétentieux, avec une glose De si, de pourquoi, de mais, de comment. C’est l’amour tout simple et pas autre chose. C’est l’amour vivant. C’est l’amour humain. Je serai sincère et tu seras folle, Mon coeur sur ton coeur, ma main dans ta main. Et cela vaut mieux que leur faribole ! C’est l’amour puissant. C’est l’amour vermeil. Je serai le flot, tu seras la dune. Tu seras la terre, et moi le soleil. Et cela vaut mieux que leur clair de lune !"
suffragettes AB Il y a 6 ans

4 poèmes de Jean Richepin

La flûte

"Je n’étais qu’une plante inutile, un roseau.
Aussi je végétais, si frêle, qu’un oiseau
En se posant sur moi pouvait briser ma vie.
Maintenant je suis flûte et l’on me porte envie.
Car un vieux vagabond, voyant que je pleurais,
Un matin en passant m’arracha du marais,
De mon coeur, qu’il vida, fit un tuyau sonore,
Le mit sécher un an, puis, le perçant encore,
Il y fixa la gamme avec huit trous égaux ;
Et depuis, quand sa lèvre aux souffles musicaux
Éveille les chansons au creux de mon silence,
Je tressaille, je vibre, et la note s’élance ;
Le chapelet des sons va s’égrenant dans l’air ;
On dirait le babil d’une source au flot clair ;
Et dans ce flot chantant qu’un vague écho répète
Je sais noyer le coeur de l’homme et de la bête."

Désir d'infini

"Tous, l’amant qui dans un baiser verse son âme,
Le grand lis qui jaillit vers le soleil levant,
L’oiseau de mer qui plane et se soûle de vent,
Le martyr qui se jette en chantant dans la flamme,

Le cerf qui, fou de rut, vers les étoiles brame,
Le lion accroupi dans sa cage et rêvant,
Le poète assoiffé de rythme, le savant
Qui dans l’obscur coït d’un problème se pâme,

Tous, un pareil désir, souvent à leur insu,
Les travaille, et, toujours pareillement déçu,
Il demeure quand même à jamais implacable.

Ô désir d’infini, malgré tout persistant!
Hélas ! il nous soutient autant qu’il nous accable.
On en meurt, et la vie en est faite pourtant."

Diagnostic

"Le front est balafré de plis. Les yeux ardents
Flambent de fièvre et sont noyés de pleurs. La bouche
Fait un trou noir, béant, plein de bave et farouche
Où la langue ballotte, où se collent les dents.
Le ventre convulsé s’enfle, rentre en dedans,
Puis ressort, bossué de nœuds, comme une souche,
Et les poumons, crachant le spasme qui les bouche,
S’essoufflent par la gorge en cris durs et stridents.
Mais quel est donc ce mal, ce coup d’épilepsie,
où l’on râle écumant, la cervelle épaissie,
Les sens perdus, les nerfs détraqués, où la chair
Semble un poisson vivant dans une poêle à frire?
Hélas, ce mal, c’est notre ami, c’est le plus cher,
C’est le consolateur des hommes, c’est le Rire."



Déclaration

"L’amour que je sens, l’amour qui me cuit,
Ce n’est pas l’amour chaste et platonique,
Sorbet à la neige avec un biscuit ;
C’est l’amour de chair, c’est un plat tonique.

Ce n’est pas l’amour des blondins pâlots
Dont le rêve flotte au ciel des estampes.
C’est l’amour qui rit parmi des sanglots
Et frappe à coups drus l’enclume des tempes.

C’est l’amour brûlant comme un feu grégeois.
C’est l’amour féroce et l’amour solide.
Surtout ce n’est pas l’amour des bourgeois.
Amour de bourgeois, jardin d’invalide.

Ce n’est pas non plus l’amour de roman,
Faux, prétentieux, avec une glose
De si, de pourquoi, de mais, de comment.
C’est l’amour tout simple et pas autre chose.

C’est l’amour vivant. C’est l’amour humain.
Je serai sincère et tu seras folle,
Mon coeur sur ton coeur, ma main dans ta main.
Et cela vaut mieux que leur faribole !

C’est l’amour puissant. C’est l’amour vermeil.
Je serai le flot, tu seras la dune.
Tu seras la terre, et moi le soleil.
Et cela vaut mieux que leur clair de lune !"


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AnonymeIl y a 6 ans

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[quote="Tyché"]… Dès l’aube, chers rayons, mon front songe à vous ceindre ! À peine il se redresse, il voit d’un œil qui dort Sur le marbre absolu, le temps pâle se peindre, L’heure sur moi descendre et croître jusqu’à l’or… (...) Battez, cymbales d’or, mamelles cadencées, Et roses palpitant sur ma pure paroi ! Que je m’évanouisse en mes vastes pensées, Sage Sémiramis, enchanteresse et roi ![/quote] @Sémiramis t'as un prétendant ;) Précisons que l'auteur est Paul Valéry
AnonymeIl y a 6 ans

… Dès l’aube, chers rayons, mon front songe à vous ceindre !
À peine il se redresse, il voit d’un œil qui dort
Sur le marbre absolu, le temps pâle se peindre,
L’heure sur moi descendre et croître jusqu’à l’or…

(...)

Battez, cymbales d’or, mamelles cadencées,
Et roses palpitant sur ma pure paroi !
Que je m’évanouisse en mes vastes pensées,
Sage Sémiramis, enchanteresse et roi !
@Tyché


Sémiramis t'as un prétendant

Précisons que l'auteur est Paul Valéry

[quote="Churinga"] @Sémiramis t'as un prétendant ;) [/quote] Pas qu'un ;)
Sémiramis Il y a 6 ans


Sémiramis t'as un prétendant
@Churinga

Pas qu'un

petit yoga poétique sur france culture :) poésie amoureuse persane: mots clés ; monde imaginal, métaphysique de la lumière, science du coeur, manifestation dans l'immanence de la lumière de dieu, anéantissement de l'égo et altérité. https://www.franceculture.fr/emissions/les-chemins-de-la-philosophie/philosophies-diran-24-la-poesie-amoureuse-une-anti-philosophie
suffragettes AB Il y a 6 ans

petit yoga poétique sur france culture
poésie amoureuse persane: mots clés ; monde imaginal, métaphysique de la lumière, science du coeur, manifestation dans l'immanence de la lumière de dieu, anéantissement de l'égo et altérité.
https://www.franceculture.fr/emissions/les-chemins-de-la-philosophie/philosophies-diran-24-la-poesie-amoureuse-une-anti-philosophie

Depuis quatre mille ans il tombait dans l'abîme. Il n'avait pas encor pu saisir une cime, Ni lever une fois son front démesuré. Il s'enfonçait dans l'ombre et la brume, effaré, Seul, et derrière lui, dans les nuits éternelles, Tombaient plus lentement les plumes de ses ailes. Il tombait foudroyé, morne, silencieux, Triste, la bouche ouverte et les pieds vers les cieux, L'horreur du gouffre empreinte à sa face livide. Il cria : Mort ! - les poings tendus vers l'ombre vide. Ce mot plus tard fut homme et s'appela Caïn. Il tombait. Tout à coup un roc heurta sa main ; Il l'étreignit, ainsi qu'un mort étreint sa tombe Et s'arrêta. Quelqu'un d'en haut lui cria : - Tombe ! Les soleils s'éteindront autour de toi, maudit ! Et la voix dans l'horreur immense se perdit. Et pâle, il regarda vers l'éternelle aurore. Les soleils étaient loin, mais ils brillaient encore. Satan dressa la tête et dit, levant ses bras : - Tu mens ! - Ce mot plus tard fut l'âme de judas. Pareil aux dieux d'airain debout sur leurs pilastres Il attendit mille ans, l'oeil fixé sur les astres. Les soleils étaient loin, mais ils brillaient toujours. La foudre alors gronda dans les cieux froids et sourds, Satan rit, et cracha du côté du tonnerre L'immensité qu'emplit l'ombre visionnaire, Frissonna. Ce crachat fut plus tard Barabbas. Un souffle qui passait le fit tomber plus bas... [b]Victor Hugo[/b] - [i]Et nox facta est, I[/i]
Sémiramis Il y a 6 ans

Depuis quatre mille ans il tombait dans l'abîme.

Il n'avait pas encor pu saisir une cime,
Ni lever une fois son front démesuré.
Il s'enfonçait dans l'ombre et la brume, effaré,
Seul, et derrière lui, dans les nuits éternelles,
Tombaient plus lentement les plumes de ses ailes.
Il tombait foudroyé, morne, silencieux,
Triste, la bouche ouverte et les pieds vers les cieux,
L'horreur du gouffre empreinte à sa face livide.
Il cria : Mort ! - les poings tendus vers l'ombre vide.
Ce mot plus tard fut homme et s'appela Caïn.

Il tombait. Tout à coup un roc heurta sa main ;
Il l'étreignit, ainsi qu'un mort étreint sa tombe
Et s'arrêta. Quelqu'un d'en haut lui cria : - Tombe !
Les soleils s'éteindront autour de toi, maudit !
Et la voix dans l'horreur immense se perdit.
Et pâle, il regarda vers l'éternelle aurore.
Les soleils étaient loin, mais ils brillaient encore.
Satan dressa la tête et dit, levant ses bras :
- Tu mens ! - Ce mot plus tard fut l'âme de judas.

Pareil aux dieux d'airain debout sur leurs pilastres
Il attendit mille ans, l'oeil fixé sur les astres.
Les soleils étaient loin, mais ils brillaient toujours.
La foudre alors gronda dans les cieux froids et sourds,
Satan rit, et cracha du côté du tonnerre
L'immensité qu'emplit l'ombre visionnaire,
Frissonna. Ce crachat fut plus tard Barabbas.

Un souffle qui passait le fit tomber plus bas...

Victor Hugo - Et nox facta est, I

Je n’ai visé qu’à l’horlogerie de l’âme, je n’ai transcrit que la douleur d’un ajustement avorté. Je suis un abîme complet. Ceux qui me croyaient capable d’une douleur entière, d’une belle douleur, d’angoisses remplies et charnues, d’angoisses qui sont un mélange d’objets, une trituration effervescente de forces et non un point suspendu - avec pourtant des impulsions mouvementées, déracinantes, qui viennent de la confrontation de mes forces avec ces abîmes d’absolu offert, (de la confrontation de forces au volume puissant) et il n’y a plus que les abîmes volumineux, l’arrêt, le froid,- ceux donc qui m’ont attribué plus de vie, qui m’ont pensé à un degré moindre de la chute du soi, qui m’ont cru plongé dans un bruit torturé, dans une noirceur violente avec laquelle je me battais, - sont perdus dans les ténèbres de l’homme. Antonin Artaud, Le Pèse-nerfs
Invisible Il y a 6 ans

Je n’ai visé qu’à l’horlogerie de l’âme, je n’ai transcrit que la douleur d’un ajustement avorté.
Je suis un abîme complet. Ceux qui me croyaient capable d’une douleur entière, d’une belle douleur, d’angoisses remplies et charnues, d’angoisses qui sont un mélange d’objets, une trituration effervescente de forces et non un point suspendu
- avec pourtant des impulsions mouvementées, déracinantes, qui viennent de la confrontation de mes forces avec ces abîmes d’absolu offert,
(de la confrontation de forces au volume puissant) et il n’y a plus que les abîmes volumineux, l’arrêt, le froid,-
ceux donc qui m’ont attribué plus de vie, qui m’ont pensé à un degré moindre de la chute du soi, qui m’ont cru plongé dans un bruit torturé, dans une noirceur violente avec laquelle je me battais,
- sont perdus dans les ténèbres de l’homme.

Antonin Artaud, Le Pèse-nerfs

Paul Eluard à peine défigurée https://www.youtube.com/watch?v=Y3O9D717XE8
suffragettes AB Il y a 6 ans

Paul Eluard
à peine défigurée


https://www.youtube.com/watch?v=Y3O9D717XE8

Du recueil "l'espace du dedans" de Henri Michaux, 3 poèmes écrits sous mescaline, à défaut de messe de noèl, un peu de mescaline :) Mon sang "Le bouillon de mon sang dans lequel je patauge Est mon chantre, ma laine, mes femmes. Il est sans croûte. Il s’enchante, il s’épand. Il m’emplit de vitres, de granits, de tessons. Il me déchire. Je vis dans les éclats. Dans la toux, dans l’atroce, dans la transe Il construit mes châteaux, Dans des toiles, dans des trames, dans des taches Il les illumine." Paix dans les brisements "l’espace a toussé sur moi et voilà que je ne suis plus les cieux roulent des yeux des yeux qui ne disent rien et ne savent pas grand-chose de mille écrasements écrasé allongé à l’infini témoin d’infini infini tout de même mis à l’infini patrie qui se propose qui n’emploie pas mes deux mains mais me broie mille mains que je reconnais et pourtant me connaissais qui m’embrasse et par brassage à moi me soustrait, m’ouvre et m’assimile à l’essaim je retourne des milliers d’ailes d’hirondelles tremblent sur ma vie prisme dans le prisme je me pose, j’ai séjour temps de la solennité je reçois les ondes qui donnent indifférence impure et précaire la petite vie s’éloigne de la Vie poussée des fantômes contre moi sillon la forme fendue d’un être immense m’accompagne et m’est sœur j’écoute les milliers de feuilles l’impression suraiguë du malaise de moi accompagne l’impression suraiguë de l’aise de moi de l’aise vertigineuse de l’aise à son extrême un désir d’union oh ce désir d’union fluide, fertile double du double double de tout redoublement pétales ouverts pétales sans fin, parfumés du parfum de l’indicible la fleur du perpétuel fontaines le pouls de la fenêtre s’éveille le pouls lumineux du point du jour éblouissant éblouissant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . je sais l’espace et l’espace mien qui me démange continuellement bougeons et bouillonnons ocelles infini d’ocelles qui pullule je me prête aux ocelles aux intimes déchirures, aux volutes je me plie aux mille plis qui me plient, me déplient qui traîtreusement, vertigineusement, m’effilochent je laisse en frissonnant tirer les sonnettes sans fin qui sans cesse pour rien m’appellent infini infini qui au corps me travaille et rit de mon fini qui en frémissements éludants et par retraits fait poussière de mon fini infini qui m’étend et sans effort, sans spectacle de mes prises me dessaisit Blanche vermine de broderies trop fines qui court partout et ne se rend nulle part trop fine, trop fine qui m’étire me mine m’effile espace qui en dentelles éperdument m’horripile me crible et l’esprit m’épile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . traversé de troupeaux de paroxysmes… vingt mille cascades coulent en moi l’enfer devient laine transport une âme immense veut entrer dans mon âme des îles incessamment chavirent dans mon océan passages passages à plis passages pétillants passages furieusement chiffonnés on me lape j’agonise j’aime, j’épouse ma mort dipht dipht dipht je coule on me laisse remourir encore je coule sable du sablier de mon temps précipitamment s’effondrant précipitamment comme torrents de montagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . il naît il naît des commencements trop trop trop vite qui se répètent et incessamment répètent que je répète que « ça se répète » et que je répète que je répète que je répète que « ça se répète » écho de l’écho de l’écho jamais éteint trop trop secoué pour dire ne puis présences multiples enlace… entrelace… ce qui entrelace… l’infini est serpent cependant le manteau de lumière, là, presque… bientôt une force une force d’agrandissement heureux effarante extension une force jusqu’au bout du monde comment calmer les ailes innombrables de la force qui m’élève qui m’élève de plus en plus? paix paix par graine broyée je fais la paix dans une douceur de soie m’élevant sans privilèges tous les feuillages des forêts de la terre ont le frémissement à l’unisson duquel je frissonne un étrange allongement un étrange prolongement un dénuement surabondant une continue lévitation pourrai-je jamais redescendre? sauf! j’ai brisé la coquille simple je sors du carcel de mon corps l’air l’au-delà de l’air est mon protecteur l’inondation a soulevé mes fardeaux l’abandon de l’empire de moi m’a étendu infiniment plus n’ai besoin de mon cadavre je ne vis plus que de la vie du temple dans la région du primordial, le récitant se tait celui qui est ici n’est plus revêtu hors de son corps le désert l’approvisionne le mal est immolé au bien l’impur au pur l’à-côté au droit le nombre à l’unique et le nom est immolé au sans nom pureté m’enfante j’ai passé la porte je passe une nouvelle porte sans bouger, je passe de nouvelles portes l’eau qui m’enlève, plus légère que les eaux de la terre enlève aussi les nuages épais du firmament de mon âme tremblement si petit en moi qui m’entretient une si grande paix… objet n’est plus obstacle savoir, calcul n’est plus obstacle mémoire n’est plus obstacle j’ai laissé derrière moi le sot, le sûr, le compétiteur à cause d’extrême minceur je passe à cause d’une minceur qui dans la nature n’a pas d’égale le courant léger, omnipotent m’a dépouillé mes déchets ne collent plus à moi purifié des masses purifié des densités tous rapports purifiés dans le miroir des miroirs éclairé par ce qui m’éteint porté par ce qui me noie je suis fleuve dans le fleuve qui passe que la tentation ne me vienne plus de m’arrêter de me fixer de me situer que la tentation de me vienne plus d’interférer bienheureuses ondes d’égalisation qui d’une arche solennelle surmontent chaque instant ondes qui donnent diadème et plaie une souffrance presque exquise traverse mon cœur dans ma poitrine liée au ciment aimant qui tient le monde fraternel indivisé et proche jusqu’en son plus lointain et tout enclos dans le sanctuaire cependant qu’un froid extrême saisit les membres de mon corps déserté mon âme déchargée de la charge de moi suit dans un infini qui l’anime et ne se précise pas la pente vers le haut vers le haut vers toujours plus haut la pente comment ne l’avais-je pas encore rencontrée? la pente qui aspire la merveilleusement simple inarrêtable ascension" Emportez-moi "Emportez-moi dans une caravelle, Dans une vieille et douce caravelle, Dans l'étrave, ou si l'on veut, dans l'écume, Et perdez-moi, au loin, au loin. Dans l'attelage d'un autre âge. Dans le velours trompeur de la neige. Dans l'haleine de quelques chiens réunis. Dans la troupe exténuée des feuilles mortes. Emportez-moi sans me briser, dans les baisers, Dans les poitrines qui se soulèvent et respirent, Sur les tapis des paumes et leur sourire, Dans les corridors des os longs et des articulations. Emportez-moi, ou plutôt enfouissez-moi"
suffragettes AB Il y a 6 ans

Du recueil "l'espace du dedans" de Henri Michaux, 3 poèmes écrits sous mescaline, à défaut de messe de noèl, un peu de mescaline

Mon sang

"Le bouillon de mon sang dans lequel je patauge
Est mon chantre, ma laine, mes femmes.
Il est sans croûte. Il s’enchante, il s’épand.
Il m’emplit de vitres, de granits, de tessons.
Il me déchire. Je vis dans les éclats.

Dans la toux, dans l’atroce, dans la transe
Il construit mes châteaux,
Dans des toiles, dans des trames, dans des taches
Il les illumine."

Paix dans les brisements

"l’espace a toussé sur moi
et voilà que je ne suis plus
les cieux roulent des yeux
des yeux qui ne disent rien
et ne savent pas grand-chose

de mille écrasements écrasé
allongé à l’infini
témoin d’infini
infini tout de même
mis à l’infini

patrie qui se propose
qui n’emploie pas mes deux mains
mais me broie mille mains
que je reconnais et pourtant me connaissais
qui m’embrasse et par brassage
à moi me soustrait, m’ouvre et m’assimile

à l’essaim je retourne
des milliers d’ailes d’hirondelles tremblent sur ma vie

prisme
dans le prisme je me pose, j’ai séjour
temps de la solennité

je reçois les ondes qui donnent indifférence
impure et précaire la petite vie s’éloigne de la Vie
poussée des fantômes contre moi

sillon
la forme fendue d’un être immense
m’accompagne et m’est sœur
j’écoute les milliers de feuilles

l’impression suraiguë du malaise de moi
accompagne l’impression suraiguë de l’aise de moi
de l’aise vertigineuse
de l’aise à son extrême

un désir d’union
oh ce désir d’union

fluide, fertile
double du double
double de tout redoublement

pétales ouverts
pétales sans fin, parfumés du parfum de l’indicible
la fleur du perpétuel

fontaines
le pouls de la fenêtre s’éveille
le pouls lumineux du point du jour
éblouissant
éblouissant

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

je sais
l’espace et l’espace mien qui me démange
continuellement bougeons et bouillonnons

ocelles
infini d’ocelles qui pullule
je me prête aux ocelles
aux intimes déchirures, aux volutes
je me plie aux mille plis qui me plient, me déplient
qui traîtreusement, vertigineusement, m’effilochent
je laisse en frissonnant tirer les sonnettes sans fin
qui sans cesse pour rien m’appellent

infini
infini qui au corps me travaille
et rit de mon fini
qui en frémissements éludants et par retraits
fait poussière de mon fini
infini qui m’étend
et sans effort, sans spectacle
de mes prises me dessaisit

Blanche vermine de broderies trop fines
qui court partout et ne se rend nulle part
trop fine, trop fine
qui m’étire
me mine
m’effile

espace
qui en dentelles éperdument m’horripile
me crible
et l’esprit m’épile

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

traversé de troupeaux de paroxysmes…
vingt mille cascades coulent en moi

l’enfer devient laine

transport
une âme immense veut entrer dans mon âme
des îles incessamment chavirent dans mon océan
passages
passages à plis
passages pétillants
passages furieusement chiffonnés

on me lape
j’agonise
j’aime, j’épouse ma mort

dipht
dipht
dipht

je coule
on me laisse remourir encore

je coule
sable du sablier de mon temps
précipitamment s’effondrant
précipitamment
comme torrents de montagne

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

il naît
il naît des commencements
trop
trop
trop vite
qui se répètent
et incessamment répètent
que je répète que « ça se répète »
et que je répète que je répète
que je répète que « ça se répète »
écho de l’écho de l’écho jamais éteint

trop
trop secoué pour dire
ne puis

présences multiples
enlace… entrelace… ce qui entrelace…
l’infini est serpent
cependant le manteau de lumière, là,
presque… bientôt

une force
une force d’agrandissement heureux
effarante extension
une force jusqu’au bout du monde
comment calmer les ailes innombrables de la force
qui m’élève
qui m’élève de plus en plus?

paix
paix par graine broyée
je fais la paix

dans une douceur de soie

m’élevant sans privilèges
tous les feuillages des forêts de la terre
ont le frémissement
à l’unisson duquel je frissonne

un étrange allongement
un étrange prolongement
un dénuement surabondant
une continue lévitation
pourrai-je jamais redescendre?

sauf!

j’ai brisé la coquille
simple je sors du carcel de mon corps

l’air
l’au-delà de l’air est mon protecteur

l’inondation a soulevé mes fardeaux
l’abandon de l’empire de moi m’a étendu infiniment
plus n’ai besoin de mon cadavre
je ne vis plus que de la vie du temple

dans la région du primordial, le récitant se tait

celui qui est ici n’est plus revêtu
hors de son corps le désert l’approvisionne

le mal est immolé au bien
l’impur au pur
l’à-côté au droit

le nombre à l’unique
et le nom est immolé au sans nom
pureté m’enfante
j’ai passé la porte
je passe une nouvelle porte
sans bouger, je passe de nouvelles portes

l’eau qui m’enlève, plus légère que les eaux de la terre
enlève aussi les nuages épais
du firmament de mon âme

tremblement si petit en moi
qui m’entretient une si grande paix…

objet n’est plus obstacle
savoir, calcul n’est plus obstacle
mémoire n’est plus obstacle

j’ai laissé derrière moi le sot, le sûr, le compétiteur

à cause d’extrême minceur je passe
à cause d’une minceur
qui dans la nature n’a pas d’égale
le courant léger, omnipotent m’a dépouillé
mes déchets ne collent plus à moi

purifié des masses
purifié des densités
tous rapports purifiés dans le miroir des miroirs
éclairé par ce qui m’éteint
porté par ce qui me noie
je suis fleuve dans le fleuve qui passe

que la tentation ne me vienne plus de m’arrêter
de me fixer de me situer
que la tentation de me vienne plus d’interférer
bienheureuses ondes d’égalisation
qui d’une arche solennelle surmontent chaque instant
ondes qui donnent diadème et plaie

une souffrance presque exquise
traverse mon cœur dans ma poitrine
liée au ciment aimant qui tient le monde fraternel
indivisé et proche jusqu’en son plus lointain
et tout enclos dans le sanctuaire

cependant qu’un froid extrême
saisit les membres de mon corps déserté
mon âme déchargée de la charge de moi
suit dans un infini qui l’anime et ne se précise pas
la pente vers le haut
vers le haut
vers toujours plus haut
la pente
comment ne l’avais-je pas encore rencontrée?
la pente qui aspire
la merveilleusement simple inarrêtable ascension"

Emportez-moi

"Emportez-moi dans une caravelle,
Dans une vieille et douce caravelle,
Dans l'étrave, ou si l'on veut, dans l'écume,
Et perdez-moi, au loin, au loin.

Dans l'attelage d'un autre âge.
Dans le velours trompeur de la neige.
Dans l'haleine de quelques chiens réunis.
Dans la troupe exténuée des feuilles mortes.

Emportez-moi sans me briser, dans les baisers,
Dans les poitrines qui se soulèvent et respirent,
Sur les tapis des paumes et leur sourire,
Dans les corridors des os longs et des articulations.

Emportez-moi, ou plutôt enfouissez-moi"

Des déesses et des mortelles Quand ils font voir les charmes nus Les sculpteurs grecs plument les ailes De la colombe de Vénus. Sous leur ciseau s’envole et tombe Le doux manteau qui la revêt Et sur son nid froid la colombe Tremble sans plume et sans duvet. Ô grands païens, je vous pardonne ! Les Grecs enlevant au contour Le fin coton que Dieu lui donne Otaient son mystère à l’amour ; Mais nos peintres tondant leurs toiles Comme des marbres de Paros, Fauchent sur les beaux corps sans voiles Le gazon où s’assied Éros. Pourtant jamais beauté chrétienne N’a fait à son trésor caché Une visite athénienne La lampe en main, comme Psyché. Au soleil tirant sans vergogne Le drap de la blonde qui dort, Comme Philippe de Bourgogne Vous trouveriez la toison d’or, Et la brune est toujours certaine D’amener autour de son doigt Pour le diable de La Fontaine Le cheveu que rien ne rend droit. Aussi j’aime tes courtisanes Et tes nymphes, ô Titien, Roi des tons chauds et diaphanes, Soleil du ciel Vénitien. Sous une courtine pourprée Elles étalent bravement, Dans sa pâleur mate et dorée Un corps superbe où rien ne ment. Une touffe d’ombre soyeuse Veloute, sur leur flanc poli Cette envergure harmonieuse Que trace l’aine avec son pli. Et l’on voit sous leurs doigts d’ivoire Naïf détail que nous aimons Germer la mousse blonde ou noire Dont Cypris tapisse ses monts. À Naples, ouvrant des cuisses rondes Sur un autel d’or Danaé Laisse du ciel en larmes blondes Pleuvoir Jupiter monnoyé. Et la tribune de Florence Au cant choqué montre Vénus Baignant avec indifférence Dans son manchon ses doigts menus, Maître, ma gondole à Venise Berçait un corps digne de toi Avec un flanc superbe où frise De quoi faire un ordre de roi. Pour rendre sa beauté complète Laisse moi faire, ô grand vieillard, Changeant mon luth pour ta palette, Une transposition d’art. Oh ! comme dans la rouge alcôve Sur la blancheur de ce beau corps J’aime à voir cette tache fauve Prendre le ton bruni des ors Et rappeler ainsi posée L’Amour sur sa mère endormi Ombrant de sa tête frisée Le beau sein qu’il cache à demi Dans une soie ondée et rousse Le fruit d’amour y rit aux yeux Comme une pêche sous la mousse D’un paradis mystérieux. Pommes authentiques d’Hespéride, Or crespelé, riche toison, Qu’aurait voulu cueillir Alcide Et qui ferait voguer Jason ! Sur ta laine annelée et fine Que l’art toujours voulut raser Ô douce barbe féminine Reçois mon vers comme un baiser Car il faut des oublis antiques Et des pudeurs d’un temps châtré Venger dans des strophes plastiques Grande Vénus, ton mont sacré ! Théophile Gautier, Musée secret
Maitre Kaio Il y a 6 ans

Des déesses et des mortelles
Quand ils font voir les charmes nus
Les sculpteurs grecs plument les ailes
De la colombe de Vénus.

Sous leur ciseau s’envole et tombe
Le doux manteau qui la revêt
Et sur son nid froid la colombe
Tremble sans plume et sans duvet.

Ô grands païens, je vous pardonne !
Les Grecs enlevant au contour
Le fin coton que Dieu lui donne
Otaient son mystère à l’amour ;

Mais nos peintres tondant leurs toiles
Comme des marbres de Paros,
Fauchent sur les beaux corps sans voiles
Le gazon où s’assied Éros.

Pourtant jamais beauté chrétienne
N’a fait à son trésor caché
Une visite athénienne
La lampe en main, comme Psyché.

Au soleil tirant sans vergogne
Le drap de la blonde qui dort,
Comme Philippe de Bourgogne
Vous trouveriez la toison d’or,

Et la brune est toujours certaine
D’amener autour de son doigt
Pour le diable de La Fontaine
Le cheveu que rien ne rend droit.

Aussi j’aime tes courtisanes
Et tes nymphes, ô Titien,
Roi des tons chauds et diaphanes,
Soleil du ciel Vénitien.

Sous une courtine pourprée
Elles étalent bravement,
Dans sa pâleur mate et dorée
Un corps superbe où rien ne ment.

Une touffe d’ombre soyeuse
Veloute, sur leur flanc poli
Cette envergure harmonieuse
Que trace l’aine avec son pli.

Et l’on voit sous leurs doigts d’ivoire
Naïf détail que nous aimons
Germer la mousse blonde ou noire
Dont Cypris tapisse ses monts.

À Naples, ouvrant des cuisses rondes
Sur un autel d’or Danaé
Laisse du ciel en larmes blondes
Pleuvoir Jupiter monnoyé.

Et la tribune de Florence
Au cant choqué montre Vénus
Baignant avec indifférence
Dans son manchon ses doigts menus,

Maître, ma gondole à Venise
Berçait un corps digne de toi
Avec un flanc superbe où frise
De quoi faire un ordre de roi.

Pour rendre sa beauté complète
Laisse moi faire, ô grand vieillard,
Changeant mon luth pour ta palette,
Une transposition d’art.

Oh ! comme dans la rouge alcôve
Sur la blancheur de ce beau corps
J’aime à voir cette tache fauve
Prendre le ton bruni des ors

Et rappeler ainsi posée
L’Amour sur sa mère endormi
Ombrant de sa tête frisée
Le beau sein qu’il cache à demi

Dans une soie ondée et rousse
Le fruit d’amour y rit aux yeux
Comme une pêche sous la mousse
D’un paradis mystérieux.

Pommes authentiques d’Hespéride,
Or crespelé, riche toison,
Qu’aurait voulu cueillir Alcide
Et qui ferait voguer Jason !

Sur ta laine annelée et fine
Que l’art toujours voulut raser
Ô douce barbe féminine
Reçois mon vers comme un baiser

Car il faut des oublis antiques
Et des pudeurs d’un temps châtré
Venger dans des strophes plastiques
Grande Vénus, ton mont sacré !


Théophile Gautier, Musée secret

3 poèmes de De Serge Venturini TRANSHUMANTS DU TRANSVISIBLE "Je suis le vent de nuit de l'été qui franchit le seuil de l'aujourd'hui et qui vient rafraîchir toutes les pièces ouvertes jusqu'à l'aurore. Je suis fils de la Terre, un errant transhumant. Je vais au-delà dans le ciel de toujours, la mort n'est plus mon ennemie. Je suis aussi le fils du ciel, passeur des mondes, des vivants et des morts, j'avance dans le temps, — je suis une force qui va de l'avant, trébuchant parfois, bégayant souvent. Je suis à l'image de ma pierre de parole, je suis un pont entre les hommes, — je suis un fragile pont qu'un missile pulvérise. Par l'orifice de ma bouche parlent les gens d'orée. — Nous sommes transvisibles. Nous parions plus loin que l'espace et le temps du cosmos. Nous bondissons du tremplin de la planète pour d'autres rebonds. Et, si nous prenons la balle au bond, elle est pour d'autres mains d'artisans. Vous ne nous verrez plus, ne nous cherchez pas, car la nuit sera devenue à vos yeux — introuvable. Bloc de terre, ma parole contient l'autre, les autres sont en moi, ils parlent en moi du devenir des mondes vers d'autres rivages étoilés. Je suis d'un autre bord et d'une autre lisière, — souffle le vent du temps." Paris, le 12 avril 2008 TRANSPARENCE DE L’INVISIBLE ou Le visage de Mandorla (Pour notre âme, les hommes sont des cristaux : ils sont la nature transparente. Novalis) "La poésie est transparence de l'invisible. Elle est dans la recherche charnelle de la transparence aux lèvres sensuelles, au galbe des formes de la femme gironde, même si le plus souvent elle n'apparaît qu'en formes décharnées d'anorexique. Si la beauté est fille de l'invisible, elle occupe toute la place en sa rose iridescence nacrée. Pour le voyant, — la beauté est irradiante. Son impact est percussion et tumulte. Elle foudroie dans sa furtive fulguriance. Rétive comme l'amande en sa coque dure, elle n'offre son lait que l'espace-temps d'un regard éclair. Ses lèvres fascinent, son toucher brûle les doigts de désir. Ses feux nourrissent, sa cosse recèle l'essentiel. Sous la verdeur de ses apparences, elle masque la réalité de son trésor, la source toujours cachée. Le poète ne cherche qu'à en briser l'écorce, à en déchirer le voile. Il veut embrasser ses lèvres entrouvertes dans sa contemplation, il brûle d'atteindre le secret de sa lumière, — son éblouissant mystère. Au cœur de la fragile vision de jaspe et de cornaline, il meurt d'enfoncer un doigt dans sa bouche, de caresser son noyau inviolable dans l'obscur. Sa lumière est pour le voyant révélation de son secret. Sa transparence met à jour la chair de l'invisible, — elle provoque le poète aux tremblements sacrés de la parole." Paris, le 6 février 2008 TIGRE DE L’ŒIL (Et que derrière un voile, invisible et présente, J’étais de ce grand corps, l’âme toute-puissante. Jean Racine, « Britannicus », I, 1, Agrippine, 1669) "Au-dessus des eaux mugissantes et glacées du fleuve des morts, il existe un pont entre le visible et l’invisible ; à peine un léger pont, étroit et tranchant comme un yatagan, tout au plus une fragile passerelle rouge et noire que l’on franchit, le temps d’une vision. Cette vision partant du visible s’ouvre vers l’invisible. Or, nous cheminons hennissant tel Pégase vers le transvisible. Les êtres visibles me sont souvent invisibles, alors que je vois, dans mes absences au monde réel, — les êtres invisibles. Lorsque mon regard transperce l’invisible, ils me sont manifestes dans la transparence, ils viennent sourdre du visible pour apparaître, tout droit venus de l’invisible couverts de cette rosée comme surgis d’une brume épaisse, connus et inconnus. Le beau, et cela n’est guère neuf, est l’expression de l’invisible, même si le mystère de ce monde demeure dans le visible, même si les temps où nous vivons refusent de regarder en face l’invisible, car ils refusent de sortir de la matière pour voir au-delà du corps. Chez eux, — l’œil n’écoute plus rien, n’entend plus ni langues rares, ni couleurs stridentes, ni parfums empourprés. Quand la porte du visible est enfin ouverte, alors dans toute sa splendeur les formes éclatantes émergent de l’invisible. Les corps animés deviennent musique, théâtre d’ombres portées au plus noir, — têtes renversées. Cependant nous ne sommes plus dans le monde des fantômes, dans le monde des fausses apparences, nous sommes dans le monde de l’être, — du devenir même aux formes changeantes et scintillantes, où nous apercevons l’espace-temps d’un instant, le déploiement de ces beautés neigeuses d’éclat qui toujours nous subjuguent. Ô Fravarti ! Elles vont ces corps-dansant, ces corps fluides, ces corps liquides se développant aux rayons du soleil naissant, corps brûlants entrevus, à la flamme d’une chandelle, au clair-obscur du désir, comme au plus profond de la nuit miroitante. Dans un mythe qui n’a pas encore dit son nom, étoile non-visible à l’œil nu, — ma présence dévoilée se révèle dès lors dans l’invisible. — Non ! Je ne suis pas hors du grand corps, — mais en plein cœur de la vision." Paris, le 22 décembre 2007
suffragettes AB Il y a 6 ans

3 poèmes de De Serge Venturini

TRANSHUMANTS DU TRANSVISIBLE

"Je suis le vent de nuit de l'été qui franchit le seuil de
l'aujourd'hui et qui vient rafraîchir toutes les pièces ouvertes
jusqu'à l'aurore. Je suis fils de la Terre, un errant transhumant.

Je vais au-delà dans le ciel de toujours, la mort n'est
plus mon ennemie. Je suis aussi le fils du ciel, passeur des
mondes, des vivants et des morts, j'avance dans le temps,
— je suis une force qui va de l'avant, trébuchant parfois,
bégayant souvent. Je suis à l'image de ma pierre de parole,
je suis un pont entre les hommes, — je suis un fragile pont
qu'un missile pulvérise.



Par l'orifice de ma bouche parlent les gens d'orée.

— Nous sommes transvisibles. Nous parions plus loin que
l'espace et le temps du cosmos. Nous bondissons du tremplin
de la planète pour d'autres rebonds. Et, si nous prenons la
balle au bond, elle est pour d'autres mains d'artisans. Vous ne
nous verrez plus, ne nous cherchez pas, car la nuit sera devenue
à vos yeux — introuvable.

Bloc de terre, ma parole contient l'autre, les autres sont
en moi, ils parlent en moi du devenir des mondes vers d'autres
rivages étoilés. Je suis d'un autre bord et d'une autre lisière,
— souffle le vent du temps."

Paris, le 12 avril 2008

TRANSPARENCE DE L’INVISIBLE

ou

Le visage de Mandorla



(Pour notre âme, les hommes sont des cristaux :

ils sont la nature transparente.

Novalis)


"La poésie est transparence de l'invisible. Elle est dans la recherche charnelle de la transparence aux lèvres sensuelles, au galbe des formes de la femme gironde, même si le plus souvent elle n'apparaît qu'en formes décharnées d'anorexique. Si la beauté est fille de l'invisible, elle occupe toute la place en sa rose iridescence nacrée. Pour le voyant, — la beauté est irradiante.



Son impact est percussion et tumulte. Elle foudroie dans sa furtive fulguriance. Rétive comme l'amande en sa coque dure, elle n'offre son lait que l'espace-temps d'un regard éclair. Ses lèvres fascinent, son toucher brûle les doigts de désir.



Ses feux nourrissent, sa cosse recèle l'essentiel. Sous la verdeur de ses apparences, elle masque la réalité de son trésor, la source toujours cachée. Le poète ne cherche qu'à en briser l'écorce, à en déchirer le voile. Il veut embrasser ses lèvres entrouvertes dans sa contemplation, il brûle d'atteindre le secret de sa lumière, — son éblouissant mystère.



Au cœur de la fragile vision de jaspe et de cornaline, il meurt d'enfoncer un doigt dans sa bouche, de caresser son noyau inviolable dans l'obscur. Sa lumière est pour le voyant révélation de son secret. Sa transparence met à jour la chair de l'invisible, — elle provoque le poète aux tremblements sacrés de la parole."

Paris, le 6 février 2008

TIGRE DE L’ŒIL



(Et que derrière un voile, invisible et présente,

J’étais de ce grand corps, l’âme toute-puissante.

Jean Racine, « Britannicus », I, 1, Agrippine, 1669)



"Au-dessus des eaux mugissantes et glacées du fleuve des morts, il existe un pont entre le visible et l’invisible ; à peine un léger pont, étroit et tranchant comme un yatagan, tout au plus une fragile passerelle rouge et noire que l’on franchit, le temps d’une vision. Cette vision partant du visible s’ouvre vers l’invisible.



Or, nous cheminons hennissant tel Pégase vers le transvisible. Les êtres visibles me sont souvent invisibles, alors que je vois, dans mes absences au monde réel, — les êtres invisibles.



Lorsque mon regard transperce l’invisible, ils me sont manifestes dans la transparence, ils viennent sourdre du visible pour apparaître, tout droit venus de l’invisible couverts de cette rosée comme surgis d’une brume épaisse, connus et inconnus.



Le beau, et cela n’est guère neuf, est l’expression de l’invisible, même si le mystère de ce monde demeure dans le visible, même si les temps où nous vivons refusent de regarder en face l’invisible, car ils refusent de sortir de la matière pour voir au-delà du corps. Chez eux, — l’œil n’écoute plus rien, n’entend plus ni langues rares, ni couleurs stridentes, ni parfums empourprés.

Quand la porte du visible est enfin ouverte, alors dans toute sa splendeur les formes éclatantes émergent de l’invisible. Les corps animés deviennent musique, théâtre d’ombres portées au plus noir, — têtes renversées.



Cependant nous ne sommes plus dans le monde des fantômes, dans le monde des fausses apparences, nous sommes dans le monde de l’être, — du devenir même aux formes changeantes et scintillantes, où nous apercevons l’espace-temps d’un instant, le déploiement de ces beautés neigeuses d’éclat qui toujours nous subjuguent. Ô Fravarti !



Elles vont ces corps-dansant, ces corps fluides, ces corps liquides se développant aux rayons du soleil naissant, corps brûlants entrevus, à la flamme d’une chandelle, au clair-obscur du désir, comme au plus profond de la nuit miroitante.



Dans un mythe qui n’a pas encore dit son nom, étoile non-visible à l’œil nu, — ma présence dévoilée se révèle dès lors dans l’invisible. — Non ! Je ne suis pas hors du grand corps,

— mais en plein cœur de la vision."



Paris, le 22 décembre 2007



De Raynaldo Pierre Louis TRANSCENDANCE FANTOMATIQUE L'espace mord le temps le temps mord l'espace Morsures cosmiques de deux corps l'espace et le temps s'entremangent. Ma grammaire amputée désormais Je mendie des mots à l'ombre où des milliers de fantômes transcendent l'espace d'un point à l'autre. EXORCISME DANS LE BLEU DE L'ENCRE Semence d'étoiles dans les oxymores de la terre sur toutes les hyperboles en slalom dans les falaises du poème. Pêle-mêle je jette mon corps dans le bleu de l'encre je salis mon sang mon sang devient bleu. Toute cette peinture dense qui serpente tel torrent dans les labyrinthes de mon corps substitue les escarboucles fantastiques et la baguette magique de Circé. Pour avoir porté l'insomnie des dieux fatigués Et comme preuve de surmenage et d'exorcisme je réclame ce dire cabalistique! LA NUIT DANS MA CHAIR D'EPONGE La nuit me traverse telle une flèche ma chair d'éponge l'absorbe. La nuit grandit sur mes sens Et sa racine a pris corps sur mes cellules diploïdes; encore la nuit chevauche ma chair.
suffragettes AB Il y a 6 ans

De Raynaldo Pierre Louis

TRANSCENDANCE FANTOMATIQUE

L'espace mord le temps
le temps mord l'espace
Morsures cosmiques de deux corps
l'espace et le temps s'entremangent.

Ma grammaire amputée désormais
Je mendie des mots à l'ombre
où des milliers de fantômes
transcendent l'espace d'un point à l'autre.

EXORCISME DANS LE BLEU DE L'ENCRE

Semence d'étoiles dans les oxymores de la terre
sur toutes les hyperboles en slalom
dans les falaises du poème.

Pêle-mêle je jette mon corps dans le bleu de l'encre
je salis mon sang
mon sang devient bleu.

Toute cette peinture dense
qui serpente tel torrent
dans les labyrinthes de mon corps
substitue les escarboucles fantastiques
et la baguette magique de Circé.

Pour avoir porté l'insomnie des dieux fatigués
Et comme preuve de surmenage et d'exorcisme
je réclame ce dire cabalistique!

LA NUIT DANS MA CHAIR D'EPONGE

La nuit me traverse telle une flèche
ma chair d'éponge l'absorbe.
La nuit grandit sur mes sens
Et sa racine a pris corps
sur mes cellules diploïdes;
encore la nuit chevauche ma chair.

La maison du matin rit au bord de la mer, La maison blanche, au toit de tuiles rose clair. Derrière un pâle écran de frêle mousseline, Le soleil luit, voilé comme une perle fine ; Et du haut des rochers redoutés du marin, Tout l’espace frissonne au vent frais du matin. Lyda, debout au seuil que la vigne décore, Un enfant sur les bras, sourit, grave, à l’aurore, Et laisse, regardant au large, le vent fou Dénouer ses cheveux mal fixés sur son cou. Par l’escalier du ciel l’enfantine journée Descend, légère et blanche, et de fleurs couronnée, Et, pour mieux l’accueillir, la mer au sein changeant Scintille à l’horizon, toute blanche d’argent… Mais déjà les enfants s’échappent ; vers la plage Ils courent, mi-vêtus, chercher le coquillage. En vain Lyda les gronde : enivrés du ciel clair Leur rire de cristal s’éparpille dans l’air… La maison du matin rit au bord de la mer. La Maison du matin Albert Samain
Sémiramis Il y a 6 ans

La maison du matin rit au bord de la mer,
La maison blanche, au toit de tuiles rose clair.
Derrière un pâle écran de frêle mousseline,
Le soleil luit, voilé comme une perle fine ;
Et du haut des rochers redoutés du marin,
Tout l’espace frissonne au vent frais du matin.
Lyda, debout au seuil que la vigne décore,
Un enfant sur les bras, sourit, grave, à l’aurore,
Et laisse, regardant au large, le vent fou
Dénouer ses cheveux mal fixés sur son cou.
Par l’escalier du ciel l’enfantine journée
Descend, légère et blanche, et de fleurs couronnée,
Et, pour mieux l’accueillir, la mer au sein changeant
Scintille à l’horizon, toute blanche d’argent…
Mais déjà les enfants s’échappent ; vers la plage
Ils courent, mi-vêtus, chercher le coquillage.
En vain Lyda les gronde : enivrés du ciel clair
Leur rire de cristal s’éparpille dans l’air…
La maison du matin rit au bord de la mer.

La Maison du matin
Albert Samain

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AnonymeIl y a 6 ans

.

[quote="Rodolphe33"]Notre Dame de Theophile Gautier Las de ce calme plat où d'avance fanées, Comme une eau qui s'endort, croupissent nos années ; Las d'étouffer ma vie en un salon étroit, Avec de jeunes fats et des femmes frivoles, Echangeant sans profit de banales paroles ; Las de toucher toujours mon horizon du doigt. Pour me refaire au grand et me rélargir l'âme, Ton livre dans ma poche, aux tours de Notre-Dame ; Je suis allé souvent, Victor, A huit heures, l'été, quand le soleil se couche, Et que son disque fauve, au bord des toits qu'il touche, Etc etc[/quote] Etc etc je crois que c'est le vers que je préfère
AnonymeIl y a 6 ans

Notre Dame de Theophile Gautier

Las de ce calme plat où d'avance fanées,
Comme une eau qui s'endort, croupissent nos années ;
Las d'étouffer ma vie en un salon étroit,
Avec de jeunes fats et des femmes frivoles,
Echangeant sans profit de banales paroles ;
Las de toucher toujours mon horizon du doigt.

Pour me refaire au grand et me rélargir l'âme,
Ton livre dans ma poche, aux tours de Notre-Dame ;
Je suis allé souvent, Victor,
A huit heures, l'été, quand le soleil se couche,
Et que son disque fauve, au bord des toits qu'il touche,
Etc etc
@Rodolphe33


Etc etc je crois que c'est le vers que je préfère

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AnonymeIl y a 6 ans

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[quote="suffragettes AB"]De Raynaldo Pierre Louis TRANSCENDANCE FANTOMATIQUE L'espace mord le temps le temps mord l'espace Morsures cosmiques de deux corps l'espace et le temps s'entremangent. Ma grammaire amputée désormais Je mendie des mots à l'ombre où des milliers de fantômes transcendent l'espace d'un point à l'autre. EXORCISME DANS LE BLEU DE L'ENCRE Semence d'étoiles dans les oxymores de la terre sur toutes les hyperboles en slalom dans les falaises du poème. Pêle-mêle je jette mon corps dans le bleu de l'encre je salis mon sang mon sang devient bleu. Toute cette peinture dense qui serpente tel torrent dans les labyrinthes de mon corps substitue les escarboucles fantastiques et la baguette magique de Circé. Pour avoir porté l'insomnie des dieux fatigués Et comme preuve de surmenage et d'exorcisme je réclame ce dire cabalistique! LA NUIT DANS MA CHAIR D'EPONGE La nuit me traverse telle une flèche ma chair d'éponge l'absorbe. La nuit grandit sur mes sens Et sa racine a pris corps sur mes cellules diploïdes; encore la nuit chevauche ma chair.[/quote] Inconnu et... intéressant. Saisissant. J'y reviendrai. Je vous propose un petit trésor de Marina Tsvetaieva: Tentative de jalousie Comment ça va la vie avec une autre, Plus simple, n'est-ce pas ? - Rames, claquez ! - S'est-il vite, le profil de la côte, le souvenir, s'est-il vite masqué. De moi, de moi, île désamarrée ? (Voguant de par le ciel, pas sur les flots !) Ames ! Jamais amantes ne serez ! Soeurs vous serez ! Soeurs : vous ! C'est votre lot ! Comment ça va la vie près d'une femme Simple ? C'est comment sans divinités ? Votre souveraine, prince profane, Détrônâtes (ledit trône quitté) Comment ça va la vie, les froissis d'ailes, Les tracas ? Le lever, comment se passe ? Pauvre créditaire de l'immortelle Médiocrité, comment faites-vous face ? "Tressauts et syncopes, stop ! Je suis quitte ! Un toit me louerai ! Suffit, le déluge !" Comment ça va avec n'importe qui ? Comment ça va la vie avec un pastiche Pour vous qui trahîtes le Sinaï ? Comment ça va la vie près d'une d'ici-bas ? D'une si peu vôtre ? Son flanc vous plaît ? A toute bride Zeus ne fouette pas Votre front ? La honte vous laisse en paix ? Comment ça va "vivre", comment va-t-elle La force d'être ? Et de chanter, la force ? Pauvret, la blessure de l'immortelle Conscience, comment y faites-vous face ? Comment ça va la vie près d'un produit De pacotille ? Un peu abrupt, le prix ? Les marbres de Carrare, reconduits, Comment ça va la vie près d'un débris De plâtre. (Taillé dans la masse même, - Dieu, sa tête : presque aussitôt détruite !) Comment ça va être avec la cent-millième, Dites, pour vous qui connûtes Lilith ? L'or de pacotille vous intéresse Encore ? Las des grâces magiciennes, Comment ça va auprès d'une terrestre, C'est comment une femme sans sixième Sens ? Bon, la tête entre les deux mains : heureux ? Non ? Des fonds sans profondeur étant l'hôte, Comment ça va, l'ami ? Plus douloureux, Moins douloureux que pour moi près d'un autre ?" Je ne sais pas qui a donné cette traduction, mais elle est belle.
musashi Il y a 6 ans

De Raynaldo Pierre Louis

TRANSCENDANCE FANTOMATIQUE

L'espace mord le temps
le temps mord l'espace
Morsures cosmiques de deux corps
l'espace et le temps s'entremangent.

Ma grammaire amputée désormais
Je mendie des mots à l'ombre
où des milliers de fantômes
transcendent l'espace d'un point à l'autre.

EXORCISME DANS LE BLEU DE L'ENCRE

Semence d'étoiles dans les oxymores de la terre
sur toutes les hyperboles en slalom
dans les falaises du poème.

Pêle-mêle je jette mon corps dans le bleu de l'encre
je salis mon sang
mon sang devient bleu.

Toute cette peinture dense
qui serpente tel torrent
dans les labyrinthes de mon corps
substitue les escarboucles fantastiques
et la baguette magique de Circé.

Pour avoir porté l'insomnie des dieux fatigués
Et comme preuve de surmenage et d'exorcisme
je réclame ce dire cabalistique!

LA NUIT DANS MA CHAIR D'EPONGE

La nuit me traverse telle une flèche
ma chair d'éponge l'absorbe.
La nuit grandit sur mes sens
Et sa racine a pris corps
sur mes cellules diploïdes;
encore la nuit chevauche ma chair.


Inconnu et... intéressant. Saisissant. J'y reviendrai.


Je vous propose un petit trésor de Marina Tsvetaieva:

Tentative de jalousie

Comment ça va la vie avec une autre,
Plus simple, n'est-ce pas ? - Rames, claquez ! -
S'est-il vite, le profil de la côte,
le souvenir, s'est-il vite masqué.

De moi, de moi, île désamarrée ?
(Voguant de par le ciel, pas sur les flots !)
Ames ! Jamais amantes ne serez !
Soeurs vous serez ! Soeurs : vous ! C'est votre lot !

Comment ça va la vie près d'une femme
Simple ? C'est comment sans divinités ?
Votre souveraine, prince profane,
Détrônâtes (ledit trône quitté)

Comment ça va la vie, les froissis d'ailes,
Les tracas ? Le lever, comment se passe ?
Pauvre créditaire de l'immortelle
Médiocrité, comment faites-vous face ?

"Tressauts et syncopes, stop ! Je suis quitte !
Un toit me louerai ! Suffit, le déluge !"
Comment ça va avec n'importe qui ?
Comment ça va la vie avec un pastiche
Pour vous qui trahîtes le Sinaï ?

Comment ça va la vie près d'une d'ici-bas ?
D'une si peu vôtre ? Son flanc vous plaît ?
A toute bride Zeus ne fouette pas
Votre front ? La honte vous laisse en paix ?

Comment ça va "vivre", comment va-t-elle
La force d'être ? Et de chanter, la force ?
Pauvret, la blessure de l'immortelle
Conscience, comment y faites-vous face ?

Comment ça va la vie près d'un produit
De pacotille ? Un peu abrupt, le prix ?
Les marbres de Carrare, reconduits,
Comment ça va la vie près d'un débris

De plâtre. (Taillé dans la masse même,
- Dieu, sa tête : presque aussitôt détruite !)
Comment ça va être avec la cent-millième,
Dites, pour vous qui connûtes Lilith ?

L'or de pacotille vous intéresse
Encore ? Las des grâces magiciennes,
Comment ça va auprès d'une terrestre,
C'est comment une femme sans sixième

Sens ?

Bon, la tête entre les deux mains : heureux ?
Non ? Des fonds sans profondeur étant l'hôte,
Comment ça va, l'ami ? Plus douloureux,
Moins douloureux que pour moi près d'un autre ?"


Je ne sais pas qui a donné cette traduction, mais elle est belle.

[quote="Rodolphe33"][quote="Churinga"][quote="Rodolphe33"]Notre Dame de Theophile Gautier Las de ce calme plat où d'avance fanées, Comme une eau qui s'endort, croupissent nos années ; Las d'étouffer ma vie en un salon étroit, Avec de jeunes fats et des femmes frivoles, Echangeant sans profit de banales paroles ; Las de toucher toujours mon horizon du doigt. Pour me refaire au grand et me rélargir l'âme, Ton livre dans ma poche, aux tours de Notre-Dame ; Je suis allé souvent, Victor, A huit heures, l'été, quand le soleil se couche, Et que son disque fauve, au bord des toits qu'il touche, Etc etc[/quote] Etc etc je crois que c'est le vers que je préfère[/quote] Désolé d'avoir écorché la poésie de Theophile Gautier mais je ne pouvais, ici, y publier l'intégralité. Texte magnifique[/quote] Pas de soucis La poésie c'est déjà un truc d'écorché, c'est pour les vieilles branches qui perdent leur écorce
AnonymeIl y a 6 ans

Notre Dame de Theophile Gautier

Las de ce calme plat où d'avance fanées,
Comme une eau qui s'endort, croupissent nos années ;
Las d'étouffer ma vie en un salon étroit,
Avec de jeunes fats et des femmes frivoles,
Echangeant sans profit de banales paroles ;
Las de toucher toujours mon horizon du doigt.

Pour me refaire au grand et me rélargir l'âme,
Ton livre dans ma poche, aux tours de Notre-Dame ;
Je suis allé souvent, Victor,
A huit heures, l'été, quand le soleil se couche,
Et que son disque fauve, au bord des toits qu'il touche,
Etc etc
@Rodolphe33


Etc etc je crois que c'est le vers que je préfère
@Churinga


Désolé d'avoir écorché la poésie de Theophile Gautier mais je ne pouvais, ici, y publier l'intégralité.
Texte magnifique
@Rodolphe33


Pas de soucis
La poésie c'est déjà un truc d'écorché, c'est pour les vieilles branches qui perdent leur écorce

[quote="Benjam1"]Annabel Lee, Edgar Poe, lu par Jessaispasqui, tiré d'un ancien jeu vidéo The Dark Eye https://sendeyo.com/show/67b97e7f53 mdp: edgar[/quote] https://www.youtube.com/watch?v=5fk8kI9XG6U <3
musashi Il y a 6 ans

Annabel Lee, Edgar Poe, lu par Jessaispasqui, tiré d'un ancien jeu vidéo The Dark Eye

https://sendeyo.com/show/67b97e7f53
mdp: edgar
@Benjam1




https://www.youtube.com/watch?v=5fk8kI9XG6U <3