Hier soir à l'Aéronef, à Lille, la nouvelle coqueluche du rock français
De son précédent passage à l'Aéronef, Damien Saez avait gardé un souvenir indélébile. Cette forêt de poings tendus devant lui quand il avait interprété, en fin de concert, Menacés mais libres. C'était alors une nouvelle chanson, pas encore enregistrée, mais son titre optimiste et inquiet avait été repris avec fougue par une jeunesse non moins optimiste et non moins inquiète.
Ceux qui y étaient sont revenus en force hier soir, à 2000 cette fois. Pour reprendre en chœur, avec la nouvelle coqueluche du rock français, ces chansons qui sonnent comme des hymnes. A Massoud (" des milliards d'êtres humains, ça vaut pas des milliards "), à Saint-Petersbourg (" on a perdu la guerre, pas celle des canons mais celle des idées ") ou aux Fils de France (" honte à notre pays, revoilà l'ennemi ").
Le public connaît si bien les paroles que Damien Saez n'a parfois qu'à l'écouter, le poing levé lui aussi. Il laisse même, sur un morceau, le micro à Antoine, l'un de ses musiciens. Mais quand c'est lui chante, c'est une tout autre histoire. Dénudée de l'habillage électronique parfois trop présent en studio, sa voix file le frisson. Une voix qui rappelle tantôt celle de Brel (c'est tellement évident quand il parle d'Olga la Blonde ou de " ce pauvre bon dieu qui n'a rien demandé et qui sait plus son nom ", tantôt celle de Bertrand Cantat (dans cette rage à dénoncer " trop d'impérialisme, trop de capitalisme ", à faire chanter tout le monde " à la santé de George Bush ").
Dans un style qui n'appartient qu'à lui, Damien Saez marie la poésie pure, le réalisme abrupt et la révolte contestataire. Et comme c'est, en plus, musicalement irréprochable, le public est aux anges et scande " merci ". A ceux qui croient que les 15-25 ans (" vautrés) devant la télé ", n'aiment que des produits fabriqués comme Popstars, Marlène et Jenifer, il donne une leçon. Le rock français n'est pas mort. La preuve par Saez.