On l’aime ou on ne l’aime pas, le "Petit Prince" du Rock. Il est vrai que Damien Saez ne fait rien pour s’attirer la sympathie d’une bonne partie de l’auditoire francophone : arrogant, plaintif, mélancolique voire mégalomane, c’est-à-dire lui-même. Ses adorateurs lui vouent une passion inébranlable tandis que ses détracteurs (qui n’ont, pour la plupart, jamais écouté un de ses opus) tentent de contenir cette « mystification » en avançant divers qualificatifs qui ne veulent rien dire.
Pourtant, en 2004, le dijonnais met tout le monde d’accord avec Debbie. Un album mélodique (et non acoustique) où les textes sont peaufinés et matures. La claque s’abat sur la critique qui avait déjà rangé notre franco-hispano-algérien dans le genre « moralisateur lalanien de salon » (quand je vous dis que leurs qualificatifs ne veulent rien dire…). Alors que tant d’autres ont suivi Le Chemin de « Jeune et Con » afin de conquérir un Empyr, Saez ose et fait différent à chaque album. Pour preuve, la plage d’ouverture (« Debbie ») est un hymne à la fête, au laisser aller, à la vie ("Allez danse Debbie toute nue dans les bars/ Allez chante Charlie au gré des gyrophares/ Allez chante l’ami/ Allez danse la vie/ Allez transe la nuit/..."). Debbie n’est pas un personnage inventé de toute pièce mais une strip-teaseuse canadienne rencontrée lors d’un show à Paris. Rien de plus pour inspirer cette joie à l’entraînant jeu de cuivre. Ses thèmes de prédilection restent les mêmes : les affres de la mondialisation (« Autour de Moi les Fous »), la recherche d’identité (« Dans le Bleu de l’Absinthe »), le désespoir (« Tu y Crois »), les amours passionnels (« Clandestins ») et sexuels (« Marie ou Marilyn »). Pour beaucoup, ce LP sonne Noir Désir (voir Veuillez Rendre l'Âme) tant ce groupe a marqué le paysage musical français. Le mot écorché (titre « Debbie ») étant répété à plusieurs reprises, on ne peut s’empêcher de faire la corrélation entre les bordelais et notre jeunot. Hormis ce terme, rien ne peut réellement les rattacher tant au niveau de l’écriture que des compositions.
« Marie ou Marilyn » détonne punk ("Quand elle me dit : Vas-y/ Jusqu’au bout de la nuit/ Mets-là moi dans le trou/ Moi, ça me rend fou/…") tandis que le piano de « Marta » transpire la douceur ("Des ombres et des mystères/ Qui tournent autour de toi/…"), deux extrêmes chantés par un homme entier. Une fois n’est pas coutume, Damien se lance dans l’interprétation de « Tu y Crois », écrit par son ami Pierre Cholbi. « Autour de Moi les Fous » nous laisse spectateur d’un show politico-culturel, de l’invasion d’un « ailleurs » au détriment de notre propre identité, de notre parole. Et même si « Sakura » (titre caché) est chanté en japonais, Saez nous prouve une fois de plus son amour pour la langue française.
Posthuman666
Source : www.destination-rock.com