Emotion à fleur de peau et mélancolie en bandoulière, Damien Saez a comblé, il y quelques jours à Strasbourg, le palais de la musique.
Depuis la sortie de son premier album, Jours étranges en 2002, Saez n’a jamais perdu son public. Et lorsqu’il débarque sur scène, costard et cravate noirs, cheveux en bataille et regard modeste, la foule déjà en délire, entame une standing ovation qui sera la première d’une longue série.
Le chanteur sans attendre, armé de multiples guitares acoustiques, égrène ses complaintes écorchées, brocarde la vie urbaine et ses stock-options (Mégalopole). Le ton plaintif s’accorde avec le minimalisme de la musique. Voix nasillarde et maniérée à l’extrême, il joue à merveille son rôle de crooner mélancolique. Au risque de lasser.
Le public, lui, apprécie, et les cris d’amour fusent. Sur Déchireur, les mains s’agitent dès que le tempo s’accélère – enfin – un peu. Peut-être intimidé par une salle comble, le Dijonnais préfère enchaîner les chansons plutôt que de se livrer. Pour Eveillé, il quitte un moment se chaise et chante en bord de scène. Pour aussitôt revenir derrière les claviers d’un orgue et d’un piano à queue.
Un univers torturé
Tel l’adolescent attardé qu’il dit être resté, Damien Saez se fait le chantre de l’amour absolu mais malheureux et désespéré (Hallelujah). Une posture – visiblement sincère – qui ravit un public majoritairement féminin. Amour et mort faisant ici bon ménage. Et ainsi Torturé, le chanteur se fait aussi militant, dénonçant à l’envi mondialisation et pauvreté (Sauver cette étoile).
Au détour d’une phrase, l’air de rien, Saez se pose en héritier d’un certain Patrick Bruel. Et quelques minutes plus tard, briquets et téléphones portables en effet s’allument pour accompagner Jeune et con, qui le fit connaître en 2002.
Saez enchaîne ses comptines au romantisme parfois mièvre (Sait Petersbourg, Be my pincess) comme autant de variations entre gris clair et gris foncé. Pour son tube J’veux qu’on baise sur ma tombe, les poings se lèvent, tandis que résonnent ses appels à la résistance. Saez en rappel interpréta frénétiquement Sexe, J’hallucine et Marie ou Marilyn, repris en cœur. Puis s’en alla, visiblement ému d’avoir ainsi libéré un vent d’absolu.
Cédric Joubert & M. Mvx.