Damien Saez, 22 ans, démarre en fanfare, développant, pour ou contre son gré, une réputation insolente. Méfaits de la presse ? Réalité ? Nous l'avons rencontré dans les studios de Vallée FM pour une émission d'une heure, les propos ont été sans prétention, et les deux titres joués live, seul à la guitare, "Jeune et con" ainsi que "Fake plastic trees", reprise de Radiohead, ont montré que Saez est en tous cas un grand chanteur. Quelques extraits de cette rencontre sans le son.
A la première écoute de "Jeune et con", il est difficile de ne pas penser à Noir Désir et particulièrement au thème musical et chanté de "Un jour en France". Peux-tu donner ton avis là-dessus et nous dire quelles sont celles que tu admets, car on pense aussi aux Smashing Pumkins, U2 ou Jeff Buckley ?
Je ne suis pas vraiment d'accord sur le rapport qu'il peut y avoir entre "Jeune et con" et "Un jour en France". Si l'utilisation du mot France ne fait référence qu'à une seule chanson, c'est triste pour le paysage français. En effet au niveau de la voix, je vois la correspondance qu'il peut y avoir. Ce n'est pas un groupe qui m'a influencé. En rock, j'ai écouté peu de français mais plus d'anglo-saxons dont ceux que vous citez. Ces influences se font inconsciemment. Pour ce qui est du français, ma culture ici est plus celle de la chanson, Brel, Brassens. Mais les comparaisons ne me gênent plus.
Tu cites des anciens du répertoire national, tu penses qu'il n'y a pas eu de relais avec ces grands artistes au niveau de la chanson.
Je n'ai pas la prétention de dire que je connais bien la chanson française actuelle. Mais je trouve qu'elle est triste à mourir en général. Ce que j'écoute sur les radios en tous cas. Après l'enregistrement de mon disque, je me suis remis du Brassens et du Brel, et j'ai eu l'impression d'avoir quelqu'un qui me disait "bon aller, retourne à l'école apprendre à écrire!". Il y a une sorte de modestie qui vient naturellement, par rapport à eux, parce qu'il y a une finesse et une émotion qui se conjuguent parfaitement.
Tu as du mal à écouter l'album qui vient de sortir ?
Je ne l'écoute plus. Je l'ai trop écouté. Les gens ne peuvent pas vraiment se rendre compte, mais lorsque l'on est en studio, ça passe en boucle, pour les prises de batterie, de guitare, de basse, pour le mixage. Au bout d'un moment on n'a plus de recul.
C'est la scène qui va donner une deuxième vie à ces chansons ?
Forcément. J'attends cela avec impatience, mais je veux le préparer sérieusement, répéter longtemps, ça changera un peu de l'album. Déjà que certaines chansons ne sont plus ce qu'elles étaient au départ. "Rock'n roll Star" était un titre joué sur deux accords.
Les gens avec qui tu as travaillé en studio ont adouci le truc ?
Oui. Cela m'intéressait. Etant instrumentaliste, je ne connaissais pas trop le travail des machines. Les maquettes étaient très basiques, guitare-voix ou piano-voix. Je travaille plus à l'électrique pour la composition, mais pour les maquettes, je repasse à l'acoustique. Je considère qu'elles fonctionnent si elles peuvent être jouées ainsi. L'électrique et sa puissance sont plus pervers en raison du son, leur efficacité ne se fait pas grâce aux accords et à l'harmonie préfère procéder ainsi et faire le son après.
Tu savais quand même au début de l'enregistrement ce que tu aimerais entendre au final, ou est-ce que tu as laissé faire ton entourage professionnel ?
Tout s'est fait en groupe, avec Marcus Bell et Jean-Daniel Glorioso que j'ai rencontré avant de faire le travail de pré-production. Nous sommes partis ensemble dans l'aventure sans se demander qui ferait quoi. Il y avait simplement les mêmes envies de recherche. C'est ce qui fait que les morceaux se sont décomposés, qu'ils ont été reconstruits différemment. Certains sont restés intacts. Tous ne sont pas de moi.
Comment s'est passée ton arrivée dans le milieu musical ? Tu avais des connaissances, ou est-ce une histoire de chance ?
Non. Rien. Arrivé à Paris, j'ai rencontré des gens, je pense qu'on a toujours de la chance quand ça marche, et jamais quand ça marche pas. Cela fait partie des paramètres mais ce n'est pas très clair comme concept. On peut dire que j'ai eu de la chance aussi de pouvoir faire du piano, de pouvoir écrire et d'avoir une mère qui m'a mis des coups de pieds au cul et qui m'a même donné envie de me casser à 18 ans. Tout cela fait partie de la même chose. Si je ne l'avais pas fait là, je l'aurais fait à un autre moment. C'est une histoire de volonté. Si l'on ne croit qu'en une seule chose, au bout d'un moment, on l'atteint. Même au niveau de la vision que je pouvais avoir d'une maison de disques avant de me retrouver signé, rien n'a quasiment changé. J'ai pu faire ce que je voulais, de la musique à la pochette. C'est con, je ne peux même pas les insulter !
C'est plein d'espoir pour ceux qui arrivent derrière.
Oui, mais il faut marquer son identité au départ. Il faut montrer que l'on est sûr de soi. De toute façon il n'y aura pas à faire de concessions. Quelque part les personnes n'ont pas vraiment le choix.
Tu étais juriste dans le temps ?
Non.
Mais tu es arrivé avec un avocat ?
Ah oui ! Chacun son métier. Le mien n'est ni de faire du marketing ni de négocier des contrats.