Il est seul en scène aux Bouffes du Nord après la sortie de «Varsovie -L'Alhambra-Paris».
SEUL aux Bouffes du Nord. Cela lui ressemble bien : il y a du panache, de l'insolence, de l'orgueil chez Saez. On a beaucoup dit de lui qu'il était un chanteur générationnel, un ovni, un météore. Il assume volontiers. Il vient de sortir un triple-CD, Varsovie-L'Alhambra-Paris (chez Cinq-7-Wagram) : deux disques enregistrés seul au piano ou à la guitare, et un troisième avec des arrangements d'une esthétique croisant le rock et la chanson. À l'écoute, on retrouve le vent furieux des chansons de Brel, le lyrisme de Ferré, le pantelant abandon de Barbara, mais aussi la manière de cracher les mots qu'a inventée Noir Désir. Underground ? La semaine de sa sortie, son album se classe en troisième position des ventes. On ne le voit pas à la télé ? Un choix : « Ce n'est pas par snobisme, assure-t-il. Simplement, j'ai déjà assez de doigts pris dans l'engrenage. » L'envie de « n'être l'instrument de personne », le regret que les émissions de variétés d'aujourd'hui soient enregistrées « À l'époque de Gainsbourg, c'était en direct. On ne coupait pas. »
Embardées artistiques
Enfant, Damien Saez ne s'est pas fantasmé chanteur. Piano à 7 ans, Conservatoire. « Jusqu'à 17 ans, j'étais à quatre heures de piano par jour. Puis j'ai eu deux profs de français excellentissimes une révélation. » Les poèmes deviennent chansons et, à 20 ans, c'est le choc Jeune et con, qui devient en quelques mois l'hymne noir d'une génération de lycéens (« Puisqu'on est jeune et con/Puisqu'ils sont vieux et fous/Puisque des hommes crèvent sous les ponts/Mais ce monde s'en fout »).
Depuis neuf ans, il se soucie « de ne pas être dépendant d'une image », accepte que son public puisse être surpris par ses embardées artistiques. Après des années de prospérité chez Universal, il a choisi l'indépendance : il a produit lui-même Varsovie-L'Alhambra-Paris, mais aussi un album enregistré aux États-Unis et en anglais, qui paraîtra à l'automne. « Après ça, j'ai été six mois sans Carte bleue. »
Bertrand Dicale