L'année 2000 serait-elle l'année Saez ? Suite à l'accueil fait à son premier album Jours étranges, le personnage se pose désormais là, lorsque l'on passe en revue le paysage de la scène rock française. Après une coupure estivale récompensant une première série de dates réussies, Saez repart à la conquête du peuple de France à l'occasion d'une deuxième partie de tournée entamée en octobre dernier. Avant de rejoindre Dijon, pour un concert qui annonçait le retour de l'enfant prodige en son pays. Saez revenait à Nancy, ville où il assura son premier concert. Voilà un retour aux sources en forme de bilan pour celui qui est devenu, en moins d'un an, une véritable rock'n'roll Star...
L’arrivée à Nancy
14h00 : un bus en provenance de Paris arrive à destination et se gare devant un hôtel du centre ville. Les portes s’ouvrent, mais pas de Damien Saez en vue. Alors que les musiciens s’installent dans le hall de l’hôtel, on apprend que le chanteur de Jeune et con est resté dormir dans le bus. Peu après, une silhouette se fait plus distincte. Dos courbé et traînant les pieds, Saez arrive à son tour, une guitare en bandoulière et un sac à la main. Apparemment fatigué, mais tout de même souriant, Damien fait son entrée. Deux, trois vannes fusent entre lui et l’un de ses guitaristes : « Eh, Franck pour la partie de V-Rallye c’est quand tu veux, t’es qu’un loser. » Après les provocations, tout le monde se décide à aller prendre du repos et monte s’installer dans les chambres. Le voyage a été long.
Une promo détendue
Une heure plus tard, deux journalistes de Radio France Nancy-Lorraine demandent à voir Saez pour une interview prévue à 15heures. Petit moment d’attente et revoilà Damien dans le hall d’entrée. Frais et dispo, il répond aux questions et se prend au jeu de l’interview avec plaisir. Pendant ce temps, Antoine (clavier) et Franck, ses deux copains de lycée, nous confient que tout s’est rapidement enchaîné : «Les premiers concerts en janvier ont été un peu durs, on s’est même retrouvé dans les bars avec 5 ou 6 personnes. Mais après, c’est vite devenu de la folie, à chaque concert, on a toujours l’impression qu’il y’a de plus en plus de monde. » À 16h, Marcus Bell (bassiste) et Jean-Daniel (batterie) arrivent à leur tour à l’hôtel. Là encore, c’est l’occasion de voir que l’ambiance est détendue lorsque Saez s’adresse à son batteur : « Salut Jean’Da, tu sais quoi ? À l’Elysée Montmartre, on m’a dit que pour la première fois de ta vie, t’avais vraiment assuré à la batterie (rires) » À 17h15, tout le monde remballe et prend place dans un minibus, direction le site du festival Nancy Jazz Pulsation où Saez est à l’affiche ce soir aux cotés des rappeurs Saïan Supa Crew et du groupe Merzhin.
Sur un air de Radiohead…
Dans le grand parc attenant à la place Stanislas, des échos résonnent. La tribu, composée de Marcus, Jean-Da, Franck, Antoine et Saez, arrive au chapiteau où le concert se tiendra. Sans attendre, le groupe prend possession des lieux pour assurer la balance. À peine monté sur scène, Damien lance ses premiers accords de guitares électriques et s’amuse à rechercher les larsens les plus harmonieux, en ondulant sa gratte face à l’ampli. Jean-Da commence à rentrer dans le beat hypnotique et Marcus enchaîne le slap pour une totale impro. Deux, trois morceaux défilent en guise de dernier filage : Sauver cette étoile, suivi des surprenants High & dry et Fake Plastic Trees, qui ne manquent pas de nous rappeler l’ambiance du chapiteau itinérant de Radiohead. À 18h30, Saez et les siens reviennent dans les backstages où des fans privilégiés ont réussi à se glisser. Une brève séance de dédicace s’improvise et après avoir éconduit une journaliste qui souhaitait faire une interview après le concert, Damien n’hésite à brocarder son image en lançant : « Et oui, Saez il a la grosse tête, il snobe les journalistes depuis qu’il vend des disques… » Brièvement, il nous explique qu’une entrevue après la scène se résume souvent à rien : « Après la baffe que tu as pris sur scène, tu sors un truc énorme et tu n’es pas forcément aimable. C’est le moment où tu ne peux pas jouer le jeu. » Saez rejoint alors les autres dans la loge où se font les dernières mises au point. « Le rideau doit s’ouvrir avant que l’on arrive sur scène, on n’est pas au théâtre, c’est pas Les fourberies de Scapin qu’on joue ici… ».
Un set rock débridé
Depuis un moment, le chapiteau se remplit, les excités hurlent, les autres patientent plus sagement. Sur scène, le rideau s’ouvre. Il est 20h30 et Saez fait son apparition : « Alors Nancy, comment ca va ? Ca nous touche d’être là, parce que c’est ici qu’on a fait notre premier concert. Il y en a qui était déjà là ? » Le public acquiesce dans un grondement unanime. Revêtu d’un T-shirt tagué d’un provoquant Maman, baisse-moi, Saez débute le set avec un morceau à capella. Crépuscule arrive ensuite et le public devient hystérique lorsque le chanteur balance son bonnet dans la salle. Après J’veux m’en aller ponctué des accords des Pink Floyd et de leur We Don’t Need No Education, c’est au tour du fameux Jeune et con de retourner le public. Les titres se suivent : un inédit (Blackskirt), une reprise (My girl d’Otis Redding), Hallelujah, Amandine, jusque-là le set sonne particulièrement rock. Et cela se durcit encore quand Saez interpelle le public : « On va vous faire une petite reprise. Ca parle de bateau et de je ne sais plus quoi… Dédicace à Léonardo et Céline, vous avez le droit de siffler… » A capella, Saez débute le premier couplet sous les huées de la salle. Mais, ce Titanic-là dégénère vite en version punk. Jours étranges radoucit l’atmosphère et se termine sur une fin acoustique. Le groupe quitte alors la scène, mais le public ne l’entend pas de cette oreille. C’est l’heure rappel, Saez revient seul sur scène avec Madame s’en va, puis les autres le rejoignent pour entamer Sauver cette étoile. Au premier refrain, le public reprend les paroles, laissant le chanteur se reposer la voix. L’opération séduction a réussi, Saez entreprend alors de jouer Rock’n’roll star juste avant que le concert ne se termine.
Fin de soirée
21H30, le groupe retourne aux loges et reste enfermé pendant une demi-heure. En quittant les backstages, Saez et Franck sont rapidement sollicités pour signer des autographes. Tout le monde se retrouve ensuite pour manger. Pendant ce temps, le chapiteau continue de s’animer avec les Saïan Supa Crew. Aux environ de minuit, ce sont les Bretons de Merzhin qui ont investi la scène. Saez et sa bande quittent alors les lieux et se dirigent vers une autre salle où doit se produire Le Peuple de L’herbe. Le groupe s’éparpille dans le bar, chacun part de son côté. Pour Saez, la soirée prend fin à 2h00. Une silhouette disparaît dans le brouillard, un taxi file dans la nuit. Une étoile est passée.